La France se prépare face à un possible manque de gaz russe

  • AFP
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La France se prépare si le gaz russe venait à manquer l'hiver prochain : un décret publié vendredi organise la manière dont des coupures ciblées pourraient être mises en œuvre chez de gros consommateurs, tandis que le remplissage des stockages a déjà commencé.

Ce décret, qui était attendu, encadre un possible "délestage", c'est-à-dire une interruption ou une réduction de l'approvisionnement pour certains clients industriels ou tertiaires (centres commerciaux, salles de concert, stades...).

Le dispositif, qui ne ciblera pas les particuliers, concerne moins de 5 000 gros consommateurs, avec des exceptions prévues pour les services publics essentiels (hôpitaux, écoles...) et certaines entreprises. "C'est un dispositif de dernier recours qui vise à préserver l'approvisionnement général des consommateurs de gaz et notamment des particuliers", souligne-t-on au gouvernement.

Les autorités planchaient sur ce texte depuis l'an dernier et son adoption était prévue avant le déclenchement de la guerre en Ukraine, qui fait aujourd'hui craindre pour l'approvisionnement en gaz russe. "Mais évidemment ce décret prend un relief particulier vu la crise que nous vivons aujourd'hui", souligne une source gouvernementale.

D'après le décret, ces gros consommateurs vont recevoir une enquête de la part du gestionnaire du réseau de gaz leur demandant plusieurs informations comme leur activité ou "les conséquences économiques qu'il subirait en cas de réduction ou d'arrêt de sa consommation de gaz", ainsi qu'un moyen de contact pour lui transmettre à tout moment un ordre de délestage. Ils devront répondre sous deux mois maximum, au risque d'une amende.

L'Union européenne a décidé jeudi soir d'arrêter dès le mois d'août ses achats de charbon russe mais le gaz, dont certains pays comme l'Allemagne sont très dépendants, échappe pour l'heure aux sanctions.

D'autres pays comme la Pologne sont cependant favorables à des mesures plus sévères contre le secteur énergétique russe et Moscou pourrait aussi être tenté d'utiliser l'arme gazière, même si cela apparaît improbable au vu des importants revenus générés par le secteur.

Remplissage des stockages

La France, qui compte sur la Russie pour environ 17% de son gaz, serait moins affectée que ses voisins européens en cas de rupture des livraisons mais subirait malgré tout des conséquences.

"Si les importations de gaz russe cessaient, nous serions probablement capables d'en remplacer à peu près la moitié mais le reste, à très court terme, devrait être réalisé, obtenu, compensé par une réduction des consommations et particulièrement dans les secteurs industriels", estimait jeudi le président d'Engie, Jean-Pierre Clamadieu.

L'impact serait "très significatif" sur l'économie européenne, selon lui.

Sans gaz russe, le gestionnaire du réseau de transport GRTgaz confirme que des réduction de consommation devraient être envisagées notamment en cas d'hiver froid.

"Il y a des situations où on s'attend à ce qu'on ne soit pas complètement capables de faire face à la pointe (de consommation) et qu'on puisse être amenés à des mécanismes de délestage", indique à l'AFP Thierry Trouvé, le directeur général de GRTgaz. "On ne peut pas l'exclure totalement".

Pour l'heure, la priorité est au remplissage des stockages de gaz en vue de l'hiver prochain malgré les prix inhabituellement élevés actuellement pour la saison. Ils doivent être remplis à au moins 85% avant la prochaine saison froide.

"On a démarré la campagne d'injection une quinzaine de jours plus tôt que d'habitude", dès la mi-mars, souligne Thierry Trouvé. Le niveau de remplissage des stockages était descendu jusqu'à 19% à la fin de l'hiver et est remonté à un peu plus de 22% cette semaine, a-t-il précisé.

"On sort de l'hiver avec des stocks relativement bien remplis, on n'est pas à des niveaux exceptionnellement bas, et le gaz continue à arriver en France", souligne-t-on aussi au gouvernement.

Pour diversifier ses approvisionnements, la France a pris des mesures pour augmenter ses capacités d'importations de gaz naturel liquéfié (GNL) dans ses terminaux méthaniers et envisage même de construire un nouveau terminal méthanier flottant.

L'Hexagone a été la destination numéro un pour le GNL américain au mois de mars, selon les données de S&P Global.

Commentaires

Zamur
Avec les livraisons du gaz en baisse, les écologistes constateront que ce combustible n'est pas si sale.
Zamur
Le volume du gaz livré à notre pays risque de diminuer sensiblement, donc les écologistes verront que ce combustible n'est pas si sale.

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