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Après l'abandon d'un projet de reconversion à la biomasse de la centrale électrique de Cordemais (Loire-Atlantique), annoncé jeudi par EDF, le site continuera de fonctionner tout au charbon au moins jusqu'en 2024, malgré l'engagement présidentiel d'en finir avec ce combustible.
Emmanuel Macron avait promis de fermer toutes les centrales à charbon d'ici la fin du quinquennat, un objectif confirmé dans la loi en 2019.
Deux des quatre dernières centrales à charbon, combustible le plus nocif pour le climat, ont déjà fermé et une autre doit s'éteindre l'an prochain.
En ce qui concerne Cordemais, RTE, le gestionnaire du réseau à haute tension avait souligné dans son dernier bilan que la centrale serait nécessaire à l'approvisionnement de la région Ouest au moins jusqu'en 2024 et la mise en service du réacteur nucléaire EPR de Flamanville, en Normandie.
Face à ces risques de tension en matière d'alimentation électrique les prochains hivers, un projet de reconversion partielle à la biomasse, Ecocombust, semblait bien avancé.
Jeudi, EDF a annoncé son abandon pour des raisons de coût et de retrait d'un partenaire.
Le retrait du Suez entraîne "un retard dans la date de mise en service industrielle à 2024", ce qui implique que la centrale "n'aurait pas pu produire de l'électricité via un combustible alternatif au charbon sur la période 2022-2024", a indiqué EDF.
La centrale, inaugurée en bord de Loire en 1970, continuera donc de fonctionner à 100% au charbon au moins jusqu'en 2024. Selon le ministère de la Transition écologique, la centrale sera utilisée "à la marge", pour répondre aux besoins de la région Ouest, "durant les pointes de consommation en hiver, pendant quelques dizaines à quelques centaines d'heures par an tout au plus".
« Pas d'impact sur l'emploi »
Le plafond de fonctionnement de la centrale a été fixé à 750 heures par an, soit cinq fois moins qu'aujourd'hui, selon EDF.
"Le prix de revient du combustible de substitution (des granulés de déchets de bois, NDLR) n'est pas compétitif par rapport au charbon", a indiqué Denis Florenty, directeur de projet Ecocombust, au cours d'une conférence téléphonique.
Le groupe Suez, spécialisé dans le recyclage de déchets, a expliqué à l'AFP avoir décidé de se désengager "compte tenu de l'incertitude actuelle sur l'existence d'un marché aval pérenne et rentable sur le long terme".
Suez, partenaire d'EDF sur ce projet, "avait en charge une partie de la construction de l'usine" de pellets, a précisé M. Florenty. "Le fait qu'ils se retirent (...) rajoutait de l'ordre de 8 mois au planning de réalisation".
Cela aurait décalé "la mise en service prévue après la période annoncée par RTE", entre 2022 et 2024, pendant laquelle le fonctionnement de la centrale de Cordemais sera crucial, a-t-il ajouté. "Si faire le projet Ecocombust ne permet pas de répondre à cette période (...) ça n'a plus de sens."
"On sort un produit trop cher pour les attentes du marché" et qui "arrive un peu tard pour les besoins de Cordemais", a résumé M. Florenty, confessant "un peu de tristesse".
En mars, Ecocombust qui consiste à la fois à adapter la centrale au combustible alternatif et à produire des granulés en créant une usine de production dédiée, avait reçu l'avis favorable d'une commission d'enquête publique.
L'investissement était alors estimé à 114 millions d'euros pour l'usine de pellets (149 millions aujourd'hui, selon EDF) et 20 millions d'euros pour l'adaptation de la centrale.
La décision d'arrêter Ecocombust, "n'a pas d'impact sur l'emploi de la centrale de Cordemais", a assuré EDF qui fait travailler quelque 350 personnes sur le site.
Ecocombust a "toujours été activement soutenu par l'ensemble du territoire", a fait valoir la CGT, à l'initiative du projet en 2015. Le président du département Michel Ménard (PS) a déploré une annonce "couperet alors que tous les voyants semblaient au vert".
Ce projet s'annonçait "prometteur" avec la "perspective de mettre à la disposition d'autres pays une technologie limitant à la fois les émissions de CO2 par l'utilisation de bois de classe B et assurant leur dépollution au moment de la fabrication des pellets" a réagi le sénateur EELV Ronan Dantec.
La maire PS de Nantes Johanna Rolland a regretté de son côté une "mauvaise nouvelle" pour le territoire, et notamment pour l'emploi, pour ce qui représentait une option "alternative à la combustion du charbon au regard de l'épuisement des ressources".