En Allemagne, un virage énergétique inachevé

  • AFP
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Dans les plaines du nord de l'Allemagne, une centaine de conteneurs tapissent un champ battu par les vents : ils stockeront bientôt de l'électricité verte, jalon supplémentaire dans la course à la transition énergétique qui passe par l'abandon du charbon prévu au plus tard en 2038.

Des batteries pour « combler une lacune »

L'installation construite à Bollingstedt, un village près de Kiel, pourra dès le printemps alimenter 170 000 foyers pendant deux heures le matin et le soir. Après les mâts d'éolienne et les panneaux solaires, l'Allemagne se couvre progressivement d'unités de stockage d'énergie renouvelable.

Ces batteries de grande capacité "comblent une lacune " en permettant d'emmagasiner l'électricité excédentaire et de la restituer aux heures de forte demande, explique Tobias Badelt, porte-parole d'Eco-Stor, l'entreprise qui installe le parc de Bollingstedt.

Dans la campagne pour les élections législatives de dimanche, la question des prix de l'énergie s'est imposée aux candidats qui ont rivalisé de promesses pour ramener les coûts à des niveaux plus supportables pour les ménages et les entreprises.

Car la première économie européenne mène une transformation énergétique aux allures d'acrobatie : sevrée de gaz russe bon marché depuis l'invasion russe de l'Ukraine, elle prévoit de fermer ses centrales à charbon en 2038 au plus tard, après avoir éteint ses derniers réacteurs nucléaire en 2023 - une décision prise une décennie plus tôt par l'ancienne chancelière Angela Merkel après la catastrophe de Fukushima.

Un réseau électrique sous tension

Restent les renouvelables - éolien, solaire, biomasse, hydraulique - qui ont connu un bond spectaculaire et ont couvert près de 60% de l'électricité produite dans le pays l'an dernier, pour un objectif de 80% à l'horizon 2030.

Mais la production intermittente des renouvelables met le réseau sous tension : lors des pics de soleil et de vent, l'infrastructure est saturée, et lors des creux, le pays importe du courant à prix fort. Cet hiver, l'Allemagne a dû s'appuyer sur le nucléaire français et le charbon polonais pour éviter des coupures.

Pour parer à ce déséquilibre, les batteries stationnaires connaissent un développement exponentiel : quelque 100 nouveaux grands systèmes de stockage d'une capacité de 0,8 GWh, proche de la capacité installée d'un réacteur nucléaire, ont été mis en service en 2024, plus du double de l'année précédente.

Il en faudra cependant beaucoup plus pour pallier l'intermittence du solaire et l'éolien. Et le pays doit s'équiper d'un deuxième parc de production -de centrales au gaz convertissables à l'hydrogène- car les batteries ne peuvent assurer que quelques heures de réserve.

L'Allemagne doit aussi étendre le réseau de transport d'électricité, très insuffisant pour acheminer l'énergie produite au nord par les éoliennes vers les zones de consommation au sud.

Autant de chantiers qui n'avancent pas assez vite et que l'implosion en novembre du gouvernement centriste d'Olaf Scholz a encore retardé. Alors que les besoins en électricité vont exploser avec l'essor des chauffages décarbonés et des véhicules électriques.

Climat et croissance

Favoris des sondages, Friedrich Merz a attaqué la politique énergétique "idéologique" du chancelier sortant social-démocrate Olaf Scholz et de ses alliés du parti des Verts.

S'il ne remet pas en cause la sortie progressive des énergies fossiles et les objectifs climatiques, "nous ne sortirons de nulle part tant que nous n'aurons pas décidé où nous entrerons", a-t-il prévenu, estimant qu'un arrêt de la production d'électricité au charbon et au gaz sans alternative valable "mettrait grandement en danger l'industrie en Allemagne".

Les conservateurs ont évoqué, avec des pincettes, une possible relance du nucléaire. La perspective n'est pas jugée très réaliste par les experts : les installations sont déjà en cours de démantèlement, le personnel manque et il faudrait recommencer les procédures d'autorisation.

Autant d'ambiguïtés qui inquiètent les militants écologistes.

Les milliards d'investissements nécessaires pour financer les technologies vertes, comme la production d'hydrogène, placera aussi le futur gouvernement face à un dilemme budgétaire. Les conservateurs sont arc-boutés sur la rigueur des finances publiques et réticents à assouplir les sacro-saintes règles d'endettement du pays.

Si le prochain parlement ne parvient pas à assouplir cette règle, "les fonds manqueront aussi pour la transition énergétique", dit à l'AFP Wilfried Rickels, de l'institut économique IfW à Kiel.

Commentaires

sirius
Un imbroglio qui ne s'explique que par les conséquences d'une politique énergétique fondée sur l'idéologie et non sur une analyse objective des besoins .
Serge Rochain
Vous ferez de gros progres en cessant de vous prendre pour éclairé face à des questions dont vous n'avez pas la moindre idée en dehors des fakes que fait circuler le lobby nucléaires depuis que l'Allemagne a cesser d'utiliser le nucléaire montrant ainsi qu'un autrre chelin est non seulement possible mais préfrable car l'Alleamagne n'a jamais autant été emmeteur de GES que l'orsqu'ils utilisaient le nucléaire avec le charbon comme régulateur de la stabilité du réseau électrique national, faute de disposer comme la France d'une grande capacité hydraulique flexible : https://www.cleanenergywire.org/factsheets/germanys-energy-consumption-and-power-mix-charts
Schricke Daniel
Je crois qu'en matière de "Fakes" (émises, en particulier, par le lobby nucléaire !... Vraiment ?) notre ami Serge, omniscient, qui concentre à lui seul toutes les connaissances scientifiques du monde (??) semble être au faite de sa gloire quand il écrit (je cite); "l'Alleamagne n'a jamais autant été emmeteur de GES que l'orsqu'ils utilisaient le nucléaire avec le charbon comme régulateur de la stabilité du réseau électrique national" (Phautes d'autografe inclusent !...) Là, il fallait oser ! Et il l'a fait !... Comme aurait pu le dire un certain Audiard ("les tontons flingueurs"), "C'est à ça qu'on le reconnaît!"
Soeren Kjaersgaard
J’ai calculé le besoin de batteries si la Norvège, la Suède, le Danemark et l’Allemagne remplaçaient leur consommation de pétrole, de charbon et de gaz dans leur production d’électricité en 2024 par plus d’éolien et de solaire + une batterie. Si vous estimez les pertes dues à la charge et à la décharge de la batterie à 3 % + 3 %, vous constatez qu’en calculant à partir des chiffres horaires d’Entsoe pour la production et la consommation d’électricité en 2024, vous devrez acquérir 20 GW de capacité nette supplémentaire pour l’éolien + le solaire et une batterie d’une capacité de 16 TWh. 16 TWh correspondent à 7,7 jours de consommation moyenne d’électricité dans les 4 pays cités. J’ai estimé le coût total de ce projet à environ 950 milliards €, ce qui correspond à environ 9000 € pour chacun des 105 millions d’habitants des 4 pays. Une alimentation électrique de 89 GW serait alors atteinte. La consommation totale d’énergie des 4 pays en 2023 était de 515 GW. D’autres ont-ils effectué des calculs similaires et avec quel résultat ?
Jérôme RYCKEWAERT
Merci et bravo pour le calcul.... quelle conclusion en tirez-vous quant au choix stratégique allemand ?
Serge Rochain
C'est bien antérieurement à Angela Merckel que la décision d'arreter le nucléaire avait été prise, l'affaire Fukushima n'a fait que déclencher la mise en application de la décision. Si l'Allemagne doit faire face à de lourds investissements tant en productions supplémentaires qu'en capacités de stokage des excedents, et de transport depuis le Nord producteur vers le Sud consommateur, des économies substentielles avec la fin des indemnisations des propriétaires de mines, et de centrales à charbon ainsi que celles des propriétaires de centrales nucléaires, tous arrétés avant la fin des contrats les liant avec l'Etat, vont beaucoup aider ce dernier à financer ces investissements.
Jean Fluchère
Serge Rochain, vous dites n'importe quoi. les batteries ne stabiliseront pas le réseau.
d.deville
Les renouvelables représentent peut-être 60% de la production allemande, mais pour chaque Kwh, environ 400G de CO2 sont rejettés, pour l'électricité française, c'est huit fois moins ! Quelle idée d'investir dans l'éolien pour supprimer le nucléaire plutot que le charbon ?
Jérôme RYCKEWAERT
Non mais je rêve : pour compenser des énergies ''renouvelables'' à efficacité intermittente, vous vous rendez compte de la quantité de ressources et de matériaux dans lesquels les allemands vont devoir investir pour mettre en place ces batteries à fonctionnement intermittent un peu le matin... un peu le soir ?? C'est totalement un non-sens et du gaspillage de ressources !! Décidément les dirigeants allemands font n'importe quoi et ils imposent leur dogme anti-nucléaire aux autres pour tenter de sauver la face. J'aimne beaucoup le calcul de Soeren et le commentaire de Jean : en effet Serge vous dites n'importe quoi parce quand on aura vraiment besoin de plus d'électricité, c'est le déploiement massif de l'énergie nucléaire de 4ème génération ainsi que les SMR-AMR qui feront le job.
Marfaing
D'abord constatons que les prévisions de consommation d'électricité tant en Allemagne qu'en France ne sont pas au rendez-vous. La réalité est qu’en 2024, la consommation d'électricité (la charge du réseau) en Allemagne était supérieure de 1,3 % à l'année précédente. Et pour les subventions aux énergies fossiles. D'après des calculs du Fonds monétaire international (FMI), les subventions aux combustibles fossiles ont atteint un niveau record de sept billions (7 000 milliards) de dollars américains en 2022. Portées par l'augmentation des aides aux consommateurs et aux entreprises pour faire face à la flambée mondiale. Et pour les nucléophiles ! le devis des futurs EPR2 repoussé de « plusieurs mois ». Jamais les délais ne sont respectés ! La facture des six EPR2 a déjà bondi de 30%, à 67,4 milliards d'euros selon un chiffrage prévisionnel. Jamais les budgets ne sont respectés ! La France espère un taux zéro, comme le programme tchèque de Dukovany, financé à plus de 90% par un prêt étatique à taux zéro. Qui payent ce cadeau pour faire baisser artificiellement le prix du nucléaire, sinon les contribuables. Parmi ses griefs, la Cour constate qu'EDF a refusé "de manière délibérée et persistante" de lui communiquer des informations "sur la rentabilité et le coût de production prévisionnels" de Flamanville et de l'EPR2, comme recommandé dans son rapport de 2020. Or la Cour a fait les comptes et prévoit "une rentabilité médiocre pour Flamanville 3". On sait pourquoi

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