- AFP
- parue le
La journée sera longue à Bakou : les négociateurs de près de 200 pays, frustrés de deux semaines de tractations stériles, attendent vendredi d'ultimes propositions de compromis financier entre pays riches et en développement à la conférence sur le changement climatique de l'ONU en Azerbaïdjan.
Un texte au dernier moment
Les discussions se sont poursuivies dans la nuit de jeudi à vendredi, avec de nombreuses allées et venues de ministres et diplomates entre les bureaux des délégations brésilienne, européenne, américaine, chinoise... et de la présidence azerbaïdjanaise du sommet.
Un projet d'accord était promis pour midi heure locale (08H00 GMT), selon la présidence de la COP29, mais l'heure est passée sans qu'aucun texte ne soit publié.
Les participants s'attendent désormais à ce que ce texte soit rendu public au dernier moment, vendredi à 18H00 (14H00 GMT) selon un négociateur à l'AFP, soit l'heure officielle de fin de la COP, jamais respectée. Beaucoup s'attendent à une prolongation dans la nuit, voire samedi.
« Pire COP de mémoire récente »
Des négociateurs et des ONG critiquent la gestion de la conférence par les Azerbaïdjanais, inexpérimentés pour mener des négociations entre près de 200 pays. "C'est la pire COP de mémoire récente", va jusqu'à dire Mohamed Adow, au nom du grand réseau Climate Action Network.
La question centrale, au "stade olympique" de Bakou, est de déterminer combien d'argent les pays développés, au nom de leur responsabilité historique dans le dérèglement climatique, accepteront de transférer aux pays en développement, pour les aider à affronter un climat plus destructeur et à investir dans les énergies bas carbone.
"Nous ne demandons qu'1% du PIB mondial. Est-ce trop demander pour sauver des vies ?" demande Juan Carlos Monterrey Gomez, négociateur du Panama.
Depuis le début du sommet, le 11 novembre, des tempêtes ont tué des Philippines au Honduras, l'Espagne panse ses plaies après des inondations meurtrières, l'Equateur a déclaré l'urgence nationale à cause de la sécheresse et des incendies....
« Au moins » 500 milliards de dollars par an
L'arrière-plan inédit de cette 29e COP est une année 2024 qui sera vraisemblablement la plus chaude jamais mesurée. Et, neuf ans après l'accord de Paris, l'humanité va encore brûler plus de pétrole, de gaz et de charbon que l'année passée.
Un projet d'accord publié jeudi matin a mécontenté tout le monde car, à la place de chiffres figuraient des "X", et parce qu'il ne tranchait pas entre deux visions très opposées.
L'heure est venue des chiffres, mais combien ? "Au moins" 500 milliards de dollars par an de la part des pays développés d'ici 2030, demande la plus grande alliance de pays en développement. À comparer aux 116 milliards de finance climatique fournie en 2022.
Les Européens, premiers contributeurs mondiaux, répètent qu'ils veulent "continuer à montrer la voie" : un terme soigneusement choisi, venu directement de l'accord de Paris, en signe de bonne volonté. Mais le resserrement budgétaire limite leur marge de manœuvre.
Les Américains se sont dits "profondément inquiets" du dernier texte. Le commissaire européen Wopke Hoekstra a dénoncé un travail "inacceptable" et directement interpellé le président de la COP29, le ministre Moukhtar Babaïev, ancien cadre de la compagnie pétrolière azerbaïdjanaise, en lui demandant de montrer "du leadership". Américains et Européens n'ont pas encore révélé combien ils étaient prêts à payer.
La Chine refuse toute obligation
"Ils tournent en rond dans leurs jeux géopolitiques", a déploré la ministre colombienne Susan Muhamad.
Les pays développés négocient en fait en parallèle davantage d'"ambition" pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais s'opposent aux pays producteurs de pétrole comme l'Arabie saoudite. Le groupe arabe a explicitement prévenu qu'il n'accepterait aucun texte ciblant "les combustibles fossiles".
Ce qui fait désordre un an après la COP28 de Dubaï, qui a appelé à lancer la transition vers la sortie des combustibles fossiles. En public, les pays donnent de la voix. Mais en coulisses, Chinois, Occidentaux, Etats insulaires... Tous se parlent encore. Le ministre irlandais Eamon Ryan confie à l'AFP qu'"il y a de l'espace pour un accord".
La Chine, clé pour trouver l'équilibre entre Occidentaux et Sud, a appelé "toutes les parties à se retrouver à mi-chemin". Pékin a toutefois tracé une ligne rouge: elle ne veut aucune obligation financière. Pas question de renégocier la règle onusienne de 1992 qui stipule que la responsabilité de la finance climatique incombe aux pays développés.