Bannière salon 360 2025 articles

Au CES, la tech commence à se poser la question de ses besoins en énergie

  • AFP
  • parue le

Après des décennies d'insouciance, le secteur technologique, réuni au salon CES de Las Vegas, commence à chercher des solutions à ses énormes besoins en énergie, démultipliés par l'émergence du "cloud" et de l'intelligence artificielle (IA).

"S'il y a cinq ans, on m'avait proposé de faire le CES, je n'aurais pas forcément vu le sens", reconnaît Sébastien Fiedorow, patron d'Aerleum, une start-up française qui fabrique du carburant de synthèse à base de CO2 et d'hydrogène.

"Mais je pense qu'on est dans un CES très différent d'il y a cinq ans", dit le jeune entrepreneur présent pour la première fois à Las Vegas. "On est encore un peu à la marge, mais on est quand même là. C'est une bonne première opportunité."

Pour la première fois de son histoire, le Consumer Electronics Show a ajouté cette année une thématique "transition énergétique" à son offre.

Gary Shapiro, président du CTA, l'association professionnelle qui organise le CES, en parle comme d'un "grand sujet d'attention" pour le salon.

"Nous avons organisé une réunion, il y a un peu plus d'un an, avec les énergéticiens et les acteurs l'écosystème électronique" , dit-il, car "nous sommes préoccupés par le fait de savoir d'où va venir l'électricité" pour répondre à l'augmentation de la consommation.

- Centres de données -

Selon le ministère américain de l'Energie (DOE), les centres de stockage de données (data centers) ont pesé 4,4% des besoins en électricité des Etats-Unis en 2023.

Le DOE s'attend à ce que cette part monte jusqu'à 12% d'ici 2028, sans compter l'impact de l'électrification de l'économie, des voitures à l'industrie, en passant par l'agriculture.

"On a fait beaucoup sur le plan de l'efficacité énergétique" des appareils électroniques, souligne Gary Shapiro, mais "on a besoin de solutions innovantes du côté de la production d'énergie".

Au CES, beaucoup de ceux qui développent ces technologies sont venus d'Europe.

"Le fait qu'on soit là veut clairement dire quelque chose", considère Satish Jawalapersad, directeur général de la Néerlandaise LV Energy, qui génère de l'électricité à partir du bruit et des ondes.

"Dans ma description, vous ne m'avez pas entendu dire IA", glisse-t-il dans un sourire après avoir présenté l'activité de son entreprise. "Nous ne sommes pas les plus sexy. Le mot magique ici, c'est IA."

Si Aerleum a reçu des marques d'intérêt d'industriels américains, une autre start-up, DataGreen, n'a pas eu de nouvelles des géants du "cloud" (informatique à distance), alors qu'ils disent pouvoir diviser par dix la surface nécessaire à un data center.

"Pour l'instant, ils ne voient pas l'intérêt encore, mais on essaye de convaincre", résume Julien Choukroun, responsable IA de cette jeune pousse française qui a pourtant reçu un prix de l'innovation pour sa première visite au CES. "On ne peut plus continuer à augmenter les espaces de hangars (qui abritent les centre de données), ce n'est pas infini."

"On axe nos points forts sur la réduction de l'espace", dit-il. "Ca peut augmenter les revenus (des grands acteur du cloud). Et aussi l'utilisation de la chaleur" dégagée par les serveurs des centres de données, que DataGreen dit pouvoir réutiliser à 98%. "Ca peut les convaincre, plus que le +green+", en référence à la réduction de l'impact sur l'environnement, affirme Julien Choukroun.

- Nouvel état d'esprit -

Jordan Huyghe, du spécialiste des petits réacteurs nucléaires (SMR) Otrera, sait que les Amazon, Microsoft ou Google ont les moyens de changer la donne énergétique.

Amazon est déjà le premier acheteur mondial d'énergie renouvelable et Microsoft vient de signer un contrat qui va mener à la réouverture de la centrale de Three Mile Island, en Pennsylvanie.

"Pour pouvoir avancer sur des projets comme ceux-là, il faut lever des fonds", dit le responsable produit d'Otrera. "Donc les solutions peuvent venir de là. Ils peuvent mettre des billes."

"L'industrie du cloud? Ils ne nous parlent pas", constate Satish Jawalapersad, qui verrait pourtant bien sa technologie leur servir.

"Les data centers font beaucoup de bruit", rappelle-t-il. "Nous pourrions le capter et le leur restituer sous forme d'énergie."

Le dirigeant fait néanmoins état "de nombreuses pistes" avec d'autres clients potentiels aux Etats-Unis.

Même si elle est encore timide, Sébastien Fiedorow voit dans cette ouverture du CES un signal important.

"On produit des carburants et on a une technologie qui est loin du Consumer Electronic Show", reconnaît-il. "Cela démontre que l'état d'esprit est en train de changer."

Ajouter un commentaire