Une tarification progressive de l'électricité existe déjà en Californie.
La tarification progressive se veut plus juste pour les ménages modestes et entend inciter les gros consommateurs à réduire leurs consommations d'énergie (électricité, gaz, eau). À l’étranger, une tarification progressive de l’électricité existe déjà en Italie, en Californie ou encore au Japon.
Principe et avantages
Une tarification progressive consiste à augmenter par paliers successifs le prix d’un bien en fonction de son niveau de consommation. Ce type de tarification peut s’appliquer à des besoins essentiels comme l’eau ou l’énergie. Il vise principalement à contribuer à une meilleure maîtrise de la consommation et à permettre aux ménages de réduire leurs factures.
Dans le cadre d’une tarification progressive, les premiers kWh d’électricité (ou m3 de gaz) consommés pour satisfaire les besoins de base d’un foyer sont peu chers afin d’en garantir l’accès aux plus modestes. Les tranches de consommation élevées, dites « de confort » et jugées excessives, sont pénalisées par un prix du kWh plus élevé.
Les ménages à faible revenu bénéficient ainsi de factures réduites, car ils consomment généralement moins et ne paient que les tarifs des tranches les plus basses, qui sont moins chers. Les tarifs bas pour les consommations essentielles sont compensés par des tarifs plus élevés pour les usages non essentiels, ce qui permet de maintenir des prix abordables pour les besoins de base sur le long terme. Les ménages plus aisés, en voyant leurs factures augmenter, sont incités à investir dans des améliorations énergétiques, ce qui peut aussi dynamiser le marché de la rénovation thermique.
Enfin, moins de consommation électrique signifie également moins de pression sur le réseau, réduisant ainsi les besoins d'investissement et donc le coût de l'électricité.
Limites
Outre la difficulté de fixer le niveau des différentes tranches, les modalités de mise en place d’une telle tarification s’avèrent particulièrement complexes dans certains cas (par exemple, la consommation des inactifs à domicile ou celle de particuliers dans des résidences secondaires).
La tarification progressive appliquée uniquement aux énergies en réseau (électricité, gaz) pourrait pousser les ménages à se tourner vers des énergies non régulées et parfois plus polluantes pour se chauffer, comme le fioul ou le bois.
De plus, les locataires de logements mal isolés pâtiraient d'un tel système sans pouvoir réellement agir sur les causes du problème.
Enfin, ce système de tarification ne traite pas directement le problème des pics de consommation, qui nécessitent souvent des moyens de production très polluants.
Tarification actuelle de l'électricité en France
En France, la tarification actuelle de l’électricité est généralement constituée de deux composantes : une part fixe proportionnelle à la puissance souscrite (abonnement) et une part variable proportionnelle à la quantité de kWh consommés.
Cette tarification est parfois dite « dégressive » car plus un particulier consomme, plus le coût du kWh rapporté au prix total de la facture diminue(1). En d’autres termes, la part abonnement de sa facture est « amortie » par une consommation élevée.
Et pour l'eau ?
En 2023, Emmanuel Macron annonçait souhaiter la généralisation d'une "tarification progressive et responsable" de l'eau. Les premiers mètres cubes seront "facturés à un prix modeste, proche du prix coûtant", mais "au-delà d'un certain niveau, le prix du mètre cube sera plus élevé".
Elle vise notamment les propriétaires de piscines qui remplissent leurs bassins chaque année, les amateurs de bains et les passionnées de jardinerie qui ne récupèrent pas assez d'eau de pluie.
Les inconvénients pour l'électricité et le gaz ne touchent pas l'eau car il n'y a pas d'alternative pour l'utilisation de l'eau, qui ne dépend pas non plus de l'efficacité énergétique d'un logement. Pour beaucoup, il s'agit d'une mesure de bon sens, surtout avec l'augmentation de la fréquence et de la durée des périodes de stress hydrique.
Certaines villes l'ont déjà mis en place, à l'instar de Toulouse.
Retour sur la tentative d'application d'une tarification progressive de l'électricité en France
En septembre 2012, le député socialiste François Brottes avait déposé à l’Assemblée nationale une proposition de loi visant à instaurer une tarification progressive de l’énergie. Six mois et plusieurs lectures du texte plus tard au sein des deux assemblées, ladite proposition a été adoptée hier soir en lecture définitive au Palais Bourbon. Le 11 avril 2013, le Conseil constitutionnel déclare contraire à la Constitution les articles de la proposition de loi Brottes relatifs à la tarification progressive.
Le système de bonus-malus pour les consommations résidentielles des énergies de réseaux (eau, électricité, chaleur) devait être mis en place au 1er janvier 2015 pour une phase de test (le dispositif devant être effectif en 2016). Les bonus-malus auraient été calculés à partir de volumes de base dépendant de la composition du foyer, de la localisation géographique et du type d’énergie consommé. Les résidences secondaires auraient été soumises à des malus (pas de bonus) avec des volumes de base plus réduits.
La proposition de loi visant à réduire la consommation d’énergie par le biais d’incitations tarifaires avait suscité de nombreux débats à l’Assemblée nationale et au Sénat. Elle aura permis de rappeler aux observateurs toutes les étapes possibles de l’élaboration d’une loi et le principe de la « navette parlementaire » : les deux assemblées doivent voter à la majorité le texte dans les mêmes termes afin que celui-ci soit adopté.
Les 6 grandes étapes de l'élaboration de la loi (©DR)
La proposition de loi faisait l’objet d’une procédure accélérée, ce qui signifie qu’une seule lecture était prévue dans chaque assemblée. Lors de la première lecture du texte à l’Assemblée nationale début octobre, des amendements avaient été déposés par la majorité gouvernementale tardivement. La proposition de loi avait été adoptée en l’absence des députés de l’UMP, de l’UDI (centristes) et du Front de Gauche qui avaient quitté l’hémicycle. Les parlementaires communistes reprochent notamment le fait que le système de bonus-malus remette en cause le principe de péréquation tarifaire. Un peu plus de trois semaines plus tard, elle avait été rejetée en Sénat. Après une période de flottement durant laquelle le texte semblait menacé, une commission mixte paritaire de parlementaires avait été convoquée sans parvenir à un texte satisfaisant pour les différentes parties. Une nouvelle lecture avait eu lieu dans chaque assemblée aux mois de janvier et février derniers. Chaque étape s’était accompagnée d’amendements et de modifications du texte. Le texte de loi a été adopté dans la nuit d’hier à aujourd’hui par l’Assemblée nationale qui statuait à titre définitif.