Extraction du lignite en Allemagne. (©Pixabay-nedu503)
Les émissions de méthane des mines de charbon allemandes seraient considérablement sous-estimées, selon un rapport du think tank Ember publié le 10 avril.
44% de la production de lignite de l'UE
En 2022, l'Allemagne a extrait 131 millions de tonnes de lignite de ses mines de surface (aussi dites à ciel ouvert), soit l'équivalent de 44% de l'ensemble de la production de lignite dans l'Union européenne cette année-là.
Pourtant, l'Allemagne fait état d'émissions annuelles de « seulement » 1 390 tonnes de méthane issues de cette exploitation, c'est-à-dire environ 1% des émissions de méthane provenant des mines de lignite de surface dans l'UE en 2021.
256 000 tonnes de méthane par an
Avec sa méthodologie de calcul(1) et au regard notamment des mesures réalisées sur le lignite extrait en Pologne, Ember estime que les émissions de méthane des mines allemandes s'élèveraient approximativement à 256 000 tonnes par an, soit 184 fois plus que les estimations actuelles.
Trois autres études (de l'AIE, de Global Energy Monitor et d'un article académique paru dans Nature Communications(2)) partagent le constat d'une très forte sous-évaluation des émissions de méthane des mines de charbon allemandes (elles seraient entre 28 et 220 fois plus importantes que les émissions annoncées selon ces 3 sources).
Ember souligne que des images satellites permettent également de montrer clairement les émissions de méthane issues des mines de charbon de surface (avec notamment une concentration particulièrement forte dans les mines d'Hambach et Welzow-Süd).
Une méthode à actualiser
À l'heure actuelle, l'Allemagne utilise un facteur d'émissions unique (fixé en 1989) pour évaluer les rejets de méthane de ses différentes mines de charbon de surface à travers le pays.
Une méthode jugée insatisfaisante par Ember, alors que les émissions de méthane évoluent en fonction de nombreux paramètres (situation géographique, profondeur du charbon extrait, etc.). L'UE prépare d'ailleurs une réglementation relative aux émissions de méthane qui exige « un facteur d’émission de méthane propre » à chaque gisement établi « sur une base trimestrielle » et prenant en compte « les émissions de méthane des strates environnantes ».
Le think tank appelle ainsi l'Allemagne à imposer aux exploitants de mines de charbon à ciel ouvert de mesurer leurs émissions de méthane actuelles et à estimer les émissions futures (y compris après la fermeture de leurs mines).
Une révision à la hausse de 14% des émissions allemandes
Sur la base de ces nouvelles mesures, Ember recommande à l'Allemagne de limiter les émissions de méthane sur les mines en activité ou fermées et à arrêter en priorité les mines les plus émettrices, tout en évitant les extensions de mines.
Concrètement, une réévaluation suivant la méthode d'Ember reviendrait à doubler le niveau annoncé des émissions de méthane du secteur énergétique allemand (donnée pour 2021) et à réévaluer de 14% à la hausse l'ensemble des émissions allemandes de méthane.
Pour rappel, le « Global Methane Pledge » (lancé en novembre 2021 par plus de 110 pays dans le cadre de la COP26 et qui compte désormais près de 150 pays engagés) vise à réduire les émissions de méthane d’origine anthropique de 30% d’ici à 2030.