En France, les coûts d’investissement des éoliennes « nouvelle génération » atteignent en moyenne 1 400 à 1 700 €/kW en 2017 selon l’Ademe. (©EDF-Rodolphe Jobard)
A l’occasion des Assises de la transition énergétique qui se sont tenues cette semaine à Bordeaux, l’Ademe a présenté une étude consacrée aux coûts des énergies renouvelables (hors hydroélectricité) en France. Ceux-ci ont connu une baisse significative au cours des dernières années pour certaines filières. Un œil sur les données de l'Ademe concernant les filières productrices d'électricité.
Éolien terrestre : une filière mature en croissance
Premier constat rappelé par l’Ademe, il est impossible de faire état d’un seul coût de production du MWh pour chaque filière renouvelable. De nombreux paramètres peuvent en effet significativement diverger selon les sites considérés : coûts d’investissements, technologie, importance de la ressource disponible, perception du risque par les investisseurs et taux d’actualisation retenu(1), etc.
L’Ademe présente ainsi dans son étude une « plage de variation théorique des coûts », dont la fourchette basse retient par exemple des modalités de financement particulièrement favorables et une bonne qualité du « gisement » (par exemple des ressources en vent). Cette précaution rappelée, l’Ademe affirme que les filières renouvelables les plus matures sont désormais compétitives avec les filières « conventionnelles ».
Au premier rang de ces filières renouvelables matures (hors hydroélectricité) figure l’éolien terrestre, avec un parc installé en France de 11 GW à fin 2016 (mais une part dans la production électrique française encore limitée à 3,9% en 2015). Le coût total de production d'électricité par cette filière est estimé par l’Ademe entre 54 €/MWh (avec un taux d’actualisation de 3%) et 108 €/MWh (taux d’actualisation de 8%) pour les éoliennes « standard(2) », soit une fourchette de prix comparable à celle de centrales à gaz à cycle combiné selon cette étude.
Selon l’Ademe, il existe encore un fort potentiel d’innovations pour la filière (notamment dans la conception des rotors) et les coûts de production des machines « standard » pourraient baisser de 10% à 15% d’ici à 2025. Dans le cas des éoliennes de nouvelle génération, dites « toilées », le coût de production est d’ailleurs déjà réduit, entre 50 €/MWh et 94 €/MWh d’après les estimations de l’Ademe. Ces éoliennes disposent d’un plus grand diamètre de rotor et d’un meilleur facteur de charge pour une même puissance (2 400 h à 2 700 h en pleine puissance contre 1 800 à 2 400 h pour les modèles « standard »)(3).
Solaire photovoltaïque : des coûts très différents entre centrales au sol et installations sur toitures
Pour le photovoltaïque, certaines centrales au sol en France entrent, selon l’Ademe, déjà en concurrence avec les moyens conventionnels de production électrique, avec une fourchette de coûts de production allant de 74 €/MWh à 135 €/MWh. L’Ademe rappelle que les coûts d’investissement de ces centrales ont été divisés par 6 entre 2007 et 2014 (avec la chute de prix des modules photovoltaïques) et estime qu’ils devraient encore chuter d’environ 35% d’ici à 2025. Des grosses variations existent entre les différents sites, notamment en raison des différences de « productible » entre le nord et le sud de la France et là encore en fonction du taux d’actualisation retenu.
Le coût de production de sites photovoltaïques intégrés aux bâtiments (petites et grandes toitures) est plus élevé (entre 181 €/MWh et 326 €/MWh) mais s’approche, dans certains cas, du prix d’achat de l’électricité dont s’acquittent les consommateurs, ce qui pourrait favoriser un développement économique de l’autoconsommation selon l’Ademe.
Malgré les baisses de coûts de production de l’éolien et du photovoltaïque, l’Ademe estime que ces filières ont encore besoin d’un soutien public (appels d’offre, complément de rémunération, tarifs d’achat) pour atteindre les objectifs de développement de la loi de transition énergétique et de la PPE (Programmation pluriannuelle de l’énergie). Précisons que ces coûts de production des filières éolienne et photovoltaïque n’incluent pas les coûts liés à leur intermittence et les subventions dont elles bénéficient.
Filières non matures : des fortes baisses de coûts en perspectives
L’Ademe estime également dans son étude les coûts de production de filières renouvelables considérés comme « non matures » car encore peu ou pas développées en France :
- l’éolien en mer dont les premiers parcs doivent être mis en service à partir de 2020 et dont les coûts estimés sont, malgré de meilleures ressources de vent, substantiellement plus élevés que ceux de l’éolien terrestre : entre 123 €/MWh et 227 €/MWh pour l’éolien posé et entre 165 €/MWh et 364 €/MWh pour l’éolien flottant ;
- le solaire thermodynamique (89 €/MWh à 315 €/MWh selon les technologies à l’international) qui, faute, d’un ensoleillement direct suffisamment important en France durant toute l’année, ne s’est pas vu attribuer d’objectifs de développement dans la PPE ;
- les énergies marines dont l’hydrolien qui fait l’objet de plusieurs démonstrateurs en France (Paimpol-Bréhat et au large de l’île d’Ouessant) avec des coûts de production estimés entre 123 €/MWh et 571 €/MWh selon le taux d’actualisation considéré (ces données sont incertaines puisque la filière se trouve encore « entre la phase de R&D et la phase pré-commerciale »).
Le potentiel de réduction des coûts de ces différentes filières est très important selon l’Ademe, compte tenu des innovations attendues et des retours d’expériences plus limités que pour l’éolien terrestre et le photovoltaïque.
Reste le cas de la géothermie qui présente des coûts très différents selon la ressource exploitée. Dans le cas de la géothermie « volcanique », ces coûts peuvent être peu élevés mais seule la centrale de Bouillante (Guadeloupe) dispose actuellement de conditions aussi favorables en France (avec un coût de production « aux alentours de 100 €/MWh »). Il est prévu de développer dans l’hexagone des systèmes « stimulés » fonctionnant avec une température moins élevée que la géothermie volcanique mais présentant des coûts de production bien plus élevés (173 €/MWh à 336 €/MWh).
Les coûts complets de production estimés par l’Ademe incluent les différents coûts d’investissement et d’exploitation sur l’ensemble de la durée de vie des installations mais pas ceux de démantèlement, faute de données disponibles. (©Connaissance des Énergies, d’après Ademe)
Si l’Ademe ne traite pas dans son étude les coûts de production de l’hydroélectricité (pourtant la plus mature parmi les filières renouvelables électriques, avec un part de 10,8% dans le mix électrique français en 2015), elle compare également les coûts des filières renouvelables produisant de la chaleur par rapport à des filières « conventionnelles ».
Pour rappel, la loi de transition énergétique pour la croissance verte fixe pour objectif de porter la part des énergies renouvelables à 32% de la consommation finale d’énergie en 2030, contre près de 14,9% en 2015. Les EnR ont une part très variable selon les usages, importante pour la production de chaleur (49%), plus limitée pour la production d’électricité (34%) et encore faible pour celle de gaz ou de carburants renouvelables (17%).