L'aluminium, un élément clé et un défi pour atteindre la neutralité carbone en Europe

  • Source : Ifri

« L’Europe aura besoin d’approvisionnements grandissants en aluminium dans les années à venir » mais doit dans le même temps réduire l'impact carbone de cette industrie dans l'optique d'atteindre la neutralité carbone. Le chercheur Thibault Michel(1) dresse, dans la publication ci-après mise en ligne fin juillet par le Centre Énergie & Climat de l'Ifri, un état des lieux du marché de ce métal stratégique.

205 kg d'aluminium par...

L'aluminium est un métal stratégique pour de nombreux secteurs : défense, aérospatial, construction ou encore « de plus en plus pour la transition énergétique » (véhicules électriques, réseaux électriques, éoliennes, panneaux solaires photovoltaïques, etc.). 

Le faible poids de l'aluminium constitue sa « principale force », un atout majeur notamment pour alléger un véhicule et in fine la consommation d'énergie de ce dernier (en 2022, une voiture dans l'UE et au Royaume-Uni contenait en moyenne 205 kg d'aluminium).

70% de la consommation électrique en Islande

La production de l'aluminium (de la bauxite à l’aluminium primaire) s'accompagne d’importantes émissions de gaz à effet de serre liées aux très fortes quantités d'énergie consommées par cette industrie(2) (notamment pour l’électrolyse) : en Islande, les trois compagnies du secteur comptent à elles seules pour 70% de la consommation nationale d'électricité selon cette étude.

L'empreinte carbone de l'aluminium est plus faible en Europe (de l'ordre de 6,8 tonnes de CO2 par tonne d’aluminium primaire produite, contre 16,1 t CO2 par tonne produite en moyenne au niveau mondial(3)) mais les producteurs européens sont très minoritaires sur ce marché : la Norvège, premier producteur européen(4), n'était que le 8e producteur mondial en 2022 (2% de la production mondiale), très loin derrière la Chine (environ 60%).

Anode inerte

Le recyclage doit naturellement jouer un rôle pour réduire l'empreinte carbone de cette industrie (« un aluminium recyclé consomme 96 % d’électricité de moins qu’un aluminium primaire, avec des émissions de GES environ quatre fois moindres pour ce qui est des émissions directes ») mais il ne peut pas être considéré comme « un remède miracle », prévient Thibault Michel.

Pour atteindre la neutralité carbone, l'auteur évoque ainsi seulement deux voies possibles à l'heure actuelle : le captage-stockage du CO2 et « l'anode inerte », technologie qui fait actuellement l'objet de 3 projets (en Allemagne, au Canada et en Russie).

Thibault Michel appelle entre autres à renforcer la production d’aluminium primaire en Europe, à étendre le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) à davantage de produits transformés et à « développer la résilience de l’industrie européenne, en particulier concernant les approvisionnements en alumine ».

Lire l'étude :
Etude de l'Ifri sur l'aluminium

Sources / Notes

  1. Thibault Michel est chercheur associé au Centre Énergie & Climat de l'Ifri depuis janvier 2024.
  2. Aluminium Dunkerque, principal producteur d'aluminium en France, compte à lui seul pour près de 0,9% de la consommation nationale d'électricité (4 TWh en 2023), soit l'équivalent de la ville de Marseille. Cela en fait la 2e société consommant le plus d'électricité en France après la SNCF.
  3. 4,5 tonnes de CO2 par tonne d’aluminium primaire produite en France (20 t CO2/t en Chine).
  4. La France (2 usines de productions d'aluminium primaire) était le 3e producteur européen d'aluminium primaire en 2022, derrière la Norvège et l'Islande.