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Les acteurs du système électrique (représentés par Think Smartgrids, RTE, Enedis, GIMELEC et IGNES) ont présenté ce 16 octobre leur plan d’actions et de suivi du développement des flexibilités de consommation dans les secteurs du tertiaire et du résidentiel. Ils ont également publié à cette occasion un premier Baromètre des flexibilité de consommation d'électricité (accessible ci-après).
Pourquoi cette flexibilité de la demande est nécessaire
En 2023, la consommation d’électricité corrigée des aléas climatiques et des effets calendaires (« à température normale ») en France métropolitaine s'est élevée à 445,4 TWh selon les données de RTE : elle a conservé sa « dynamique nettement baissière amorcée dès l’automne 2022 » (- 3,2% par rapport à 2022 et - 6,9% par rapport aux valeurs moyennes entre 2014-2019).
La chute de consommation électrique touche tous les secteurs et s'explique en partie par les efforts pour réaliser des économies d'énergie (un second plan gouvernemental a été lancé en octobre 2023) et également par une conjoncture macroéconomique dégradée.
Si ainsi « l'électrification massive peine à démarrer », a reconnu ce 16 octobre le président de RTE Xavier Piechaczyk, « la destination est connue : il faudra s'électrifier en toute hypothèse ». Ce mouvement d'électrification s'accompagne d'une croissance des productions renouvelables, en particulier du parc solaire photovoltaïque (4,3% du mix français en 2023) dont la production intervient principalement à un moment de la journée de faible demande.
Pour maintenir en temps réel l'équilibre offre-demande sur le réseau, le système électrique souligne l'importance de bénéficier de leviers variés : des moyens de production stables (essentiellement hydraulique et nucléaire), des interconnexions, des capacités de stockage par batteries ou grâce aux STEP, et de plus en plus des outils de flexibilité de la demande.
Les prix de marché, reflet du besoin de flexibilité
Le prix spot de l’électricité reflète d'ores et déjà le besoin d'une flexibilité de la demande : il connaît un « creux » en milieu de journée lors des pics de production solaire photovoltaïque (non corrélés avec une forte demande). La forme de la courbe des prix est qualifiée de « duck curve » (car elle rappelle le profil d'un canard).
En moyenne en 2023, le prix spot à la pointe du soir (18h-20h) « a ainsi été plus élevé de 34 % par rapport à la plage méridienne les jours ouvrés et de 85 % les jours de week-end », indique RTE. Cet écart moyen n'était encore que de 14% entre le milieu de journée et le soir en 2019 et il va augmenter dans les années à venir avec la poursuite du développement de la production solaire photovoltaïque.
À fin juin 2024, la France avait connu dans l'année 235 heures de production électrique à prix négatif (lors de périodes de surproduction), surpassant déjà le record de 2023 (147 heures), selon RTE.
La réforme de la tarification heures/heures pleines - actuellement en cours de réflexion - sera très stratégique à ce titre, en incitant notamment les consommateurs à profiter d’heures creuses « solaires » en journée en été (entre 11h et 17h) et en introduisant une différenciation des heures creuses entre l’été et l’hiver (« saisonnalisation »).
Des signaux tarifaires adaptés pour les ménages français
Dans le secteur résidentiel (qui comptait pour près d'un tiers de la consommation française d'électricité en 2019), le pilotage des ballons d'eau chaude permet déjà d'éviter l'équivalent de 3,3 GW d'appel de puissance à 19h.
Mais les acteurs du système électrique appellent à aller bien plus loin grâce aux « HEMS » (Gestionnaires intelligent de l'énergie du logement), produits simples qui s'installent par exemple sur le compteur électrique et qui permettent de prendre en compte les besoins de l'utilisateur et les signaux tarifaires, contribuant in fine à l'équilibre du réseau électrique.
En 2023, seuls 3% des foyers français étaient équipés de ces systèmes, l'objectif fixé est d'atteindre 17% en 2030 (contre 7% à cet horizon selon un scénario tendanciel).
Objectif dans le tertiaire : 100 000 « BACS » en 2030
En ce qui concerne les bâtiments du secteur tertiaire (28% de la consommation électrique française en 2019), une marque collective baptisée « FlexReady » (et animée par Think Smart Grids) a été présentée ce 16 octobre : elle standardise des équipements connectables avec les « BACS » (acronyme en anglais pour désigner les systèmes de Gestion Technique du Bâtiment).
Ces équipements pourront communiquer avec les fournisseurs d'électricité, les agrégateurs et les gestionnaires de réseaux, et permettre ainsi de moduler la demande du secteur (notamment selon les prix de l'électricité), avec une hiérarchisation des usages.
La filière ambitionne que 100 000 bâtiments tertiaires soient équipés de BACS à l'horizon 2030 en France, contre 25 500 en 2023.
Cela offrirait alors « une capacité de 2,5 GW de modulation de consommation au quotidien pendant 2 à 3h », selon Laurent Bataille, Président du GIMELEC (Groupement des entreprises de la filière électronumérique française), et jusqu'à 6 GW de baisse de « consommation » potentielle en cas d'alerte EcoWatt rouge).