Les COP se succèdent, le charbon résiste : état des lieux en 2017

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Charbon

JSW, partenaire officiel de la COP24, est le premier producteur de charbon « à coke » de l’Union européenne. Ici, la mine de Pniówek. (©JSW)

Trois jours après la clôture de la COP24, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a publié le 18 décembre son rapport annuel consacré au charbon. Elle y souligne le rôle central de cette énergie au niveau mondial et estime que sa consommation globale devrait rester stable dans les 5 prochaines années. Explications.

La consommation de charbon encore appelée à augmenter en Inde et en Asie du Sud-Est

Après deux années de baisse, la consommation mondiale de charbon a augmenté de près de 1% en 2017 et cette hausse devrait se poursuivre en 2018 selon les dernières estimations de l’AIE. Principalement consommé à des fins de production électrique(1), le charbon a encore compté pour 38% de la production mondiale d’électricité en 2017.

Dans son rapport Coal 2018, l’AIE estime que la consommation mondiale de charbon pourrait rester stable d’ici à 2023 : la baisse de la demande envisagée en Europe et en Amérique du Nord serait plus que compensée par une forte croissance de la consommation en Inde et en Asie du Sud-Est selon les prévisions de l’Agence.

En Inde, la consommation de charbon pourrait augmenter de 25,8% entre 2017 et 2023 selon l’AIE, qui envisage toutefois une croissance moins forte que lors des dernières années (ralentissement lié au développement des énergies renouvelables dans ce pays et au recours à des technologies supercritiques dans les centrales à charbon). Des hausses significatives de la consommation de charbon sont également envisagées en Indonésie, en Malaisie, au Pakistan, aux Philippines ou encore au Vietnam (+ 39,2% pour la zone Asie du Sud-Est entre 2017 et 2023 selon l’AIE) en raison de la « disponibilité peu coûteuse » de ce combustible.

La Chine, qui compte actuellement pour près de la moitié de la consommation mondiale de charbon, restera le marché central pour cette énergie dans les années à venir, malgré une baisse de près de 3% de la demande domestique envisagée par l’AIE entre 2017 et 2023. Du fait du poids du géant chinois, chaque évolution du marché électrique dans ce pays(2) est en particulier susceptible de « pousser la demande mondiale de charbon à la hausse ou à la baisse de manière significative », indique l’AIE. L’Agence considère par exemple que la demande mondiale de charbon pourrait baisser de plus de 1% par an si la consommation d’électricité en Chine restait stable sur la période considérée (2017-2023). En revanche, cette consommation mondiale de charbon pourrait significativement augmenter en cas de forte hausse de la demande d'électricité en Chine.

En définitive, la part du charbon dans la consommation mondiale d’énergie pourrait passer de 27% en 2017 (ce qui en fait la 2e énergie la plus consommée après le pétrole) à 25% en 2023 selon l’AIE, la part du charbon déclinant principalement en raison de la hausse des consommations des énergies renouvelables et de gaz naturel.

Consommation de charbon dans le monde
La consommation de charbon de l'Union européenne pourrait baisser de près de 13% entre 2017 et 2023. Elle resterait toutefois supérieure à la consommation de charbon de l'Asie du Sud-Est à cet horizon. (©Connaissance des Énergies, d’après AIE)

Deux mondes, deux Europes

L’importance du charbon dans le mix énergétique mondial reflète « l’histoire de deux mondes dont les politiques de lutte contre le changement climatique et les forces économiques ont conduit à la fermeture de centrales au charbon dans certains pays, tandis que le charbon continue de jouer un rôle dans la sécurisation de l’accès à une énergie abordable dans d’autres », résume Keisuke Sadamori, directeur de la division marchés et sécurité énergétiques à l’AIE.

Au sein même de l’Union européenne, l’AIE souligne les différences entre les pays d’Europe de l’Ouest qui développent des politiques de « sortie » du charbon (en discussion dans le cas de l'Allemagne) et ceux d’Europe de l’Est où ce combustible joue encore un rôle majeur, notamment dans la production électrique (Pologne et République tchèque en tête).

Dans ce contexte et malgré les nombreuses campagnes de « désinvestissement » du charbon médiatisées lors des COP, l’AIE se résigne pour lutter contre le réchauffement climatique à encourager – plutôt que la « sortie » du charbon à tout prix(3) – toutes les « options disponibles », citant entre autres les technologies de capture et de stockage du CO2, le développement des énergies renouvelables, l’amélioration de l’efficacité énergétique, le recours au nucléaire ou encore au vecteur hydrogène.

Pour rappel, les émissions mondiales de CO2 liées à la combustion d’énergie fossile et à l’industrie pourraient encore augmenter de 2,7% en 2018 selon les dernières estimations du Global Carbon Project. Cette organisation imputait encore 40% desdites émissions en 2017 à la consommation de charbon dans le monde.

Charbon dans l'UE
La Pologne, qui a accueilli la COP24, a produit près de 80% de son électricité en 2017 à partir du charbon. (©Connaissance des Énergies, d’après AIE)

Sources / Notes

  1. Le charbon a compté pour 40% de la production supplémentaire d’électricité dans le monde en 2017 selon l’AIE (+ 250 TWh dans le monde en 2017 par rapport à 2016). La sidérurgie est un autre secteur fortement consommateur de charbon.
  2. La production électrique en Chine repose pour près des deux tiers sur le charbon.
  3. L'AIE rappelle que l'âge moyen des centrales au charbon en Asie (de 1 400 GW de puissance cumulée) est de seulement 11 ans.

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