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La Somaïr, filiale d'Orano au Niger dont les exportations sont à l'arrêt, est en "grande difficulté financière" et contrainte de vendre des stocks d'uranium initialement destinés à financer la fermeture ultérieure du site, a-t-on appris mardi auprès du groupe français.
"On en arrive à un point où Somaïr est en très grande difficulté financière, notamment du fait des difficultés pour pouvoir commercialiser l'uranium", a indiqué à l'AFP Orano, qui rappelle que sa filiale est dans l'impossibilité d'exporter depuis un an du fait de la situation politique locale.
"On est obligé de consacrer tous nos efforts au maintien de l'outil industriel et au paiement des salaires, et ça, on le fait en vendant de manière conservatoire des stocks (...) qu'on a économisés, et qui sont destinés initialement au financement du plan de réaménagement du site à l'issue de sa période d'exploitation", a précisé Orano.
La Somaïr, située dans la région d'Arlit (nord), est la seule mine d'uranium exploitée par Orano au Niger, après la fermeture de la Cominak en 2021. Elle a repris ses activités en février 2024, après une interruption de plusieurs mois à la suite du coup d'Etat de juillet 2023.
Orano a fait "une nouvelle proposition alternative aux autorités du Niger, pour trouver une solution d'exportation soit vers la France, soit vers la Namibie", mais les autorités nigériennes n'ont pas donné suite à ce stade. Orano reste cependant "à l'écoute" des autorités du pays.
Reprise de la production
Après le coup d'Etat intervenu le 26 juillet 2023 au Niger, l'usine de traitement de minerai d'uranium avait réduit sa production puis avait été placée en maintenance anticipée début septembre.
Le site faisait alors face à l'épuisement des stocks de réactifs chimiques essentiels au maintien de sa production, du fait de la fermeture des frontières de pays voisins du Niger, avait indiqué à l'époque un porte-parole du site.
Ces sanctions commerciales avaient été imposées par la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) pour faire plier les militaires putschistes au pouvoir.
Le groupe a finalement "réussi à récupérer un certain nombre de réactifs, en volume réduit pour le moment" pour permettre le redémarrage de la production de manière très sporadique en février 2024.
Les enjeux pour le groupe sont de continuer à "alimenter l'usine avec les réactifs dont elle a besoin" puis de "trouver des voies pour exporter l'uranium", ce qui représente un défi logistique en raison de frontières encore fermées, a admis Orano. Ces routes devront être "à la fois sûres" et respecter "les différentes sanctions", a souligné le directeur général.
L'usine permet de produire le concentré d'uranium naturel - le Yellow cake - à partir de l'uranium extrait de la mine. A sa sortie de la mine, l'uranium est concassé puis mis en solution à l'aide de réactifs chimiques. L'uranium est ensuite commercialisé auprès de clients électriciens, afin d'être converti et enrichi, en vue de la fabrication du combustible destiné aux centrales nucléaires.
Orano a toujours écarté tout risque de pénurie d'uranium, le groupe assurant "la sécurité d'approvisionnement de ses clients grâce à la diversification géographique de ses zones d'implantation", au Canada et au Kazakhstan.
L'année dernière, du fait des perturbations, l'usine a produit 1.100 tonnes de concentré d'uranium au lieu des 1.800 tonnes attendues, dans un marché mondial de l'uranium estimé à 70.000 tonnes par an.
Afin de maintenir l'activité du site, qui emploie directement environ 700 personnes, et à peu près autant de salariés chez ses sous-traitants, la Somaïr a donc commencé à ponctionner ces stocks provisionnés et stockés sur le sol français.
Cette mesure palliative n'offre cependant qu'un sursis de quelques mois, prévient Orano : "si la situation ne se débloquait pas rapidement pour la Somaïr, elle serait prochainement contrainte de prendre des mesures sociales", a indiqué mardi le groupe.
Faute de déblocage, la Somaïr serait contrainte de prendre "des mesures de réduction d'activité progressive qui pourraient aller dans les prochains mois à l'arrêt des activités", indique-t-on de même source.
Activités au Niger
Orano possède environ 64% de la Somaïr, détenue pour le reste par la Sopamin, société d'Etat du Niger.
Depuis la reprise des activités en février, le site a produit un peu plus de 700 tonnes de concentré minier d'uranium, stockées sur place.
Du fait de la situation politique au Niger, Somaïr a produit en 2023 quelque 1.130 tonnes d'uranium (contre environ 2.000 tonnes en année normale), sur un peu plus de 7.000 tonnes produites par Orano dans le monde.
Cette situation n'a pas de conséquences notables pour l'approvisionnement des clients d'Orano, affirme toutefois le groupe, qui souligne son "empreinte minière internationale, sur presque tous les continents", et précise avoir notamment renforcé ses activités au Canada.
Le Niger fournit 4,7% de la production mondiale d'uranium naturel, loin derrière le Kazakhstan (45,2%), selon des chiffres de 2021 de l'agence d'approvisionnement d'Euratom (ESA).
La Somaïr dans la région d'Arlit (Nord) est l'unique mine d'uranium encore exploitée par Orano dans le pays, après la fermeture de la Cominak, en 2021.