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La majorité sénatoriale entend muscler le volet logement du projet de loi climat et résilience, pour "donner de la visibilité" à l'objectif national BBC 2050 et garantir un "équilibre" entre les nouvelles obligations et les mesures d'accompagnement.
Le volet "se loger" du texte examiné au Sénat depuis le 14 juin, lequel outre la rénovation des bâtiments traite aussi de l'artificialisation des sols, sera abordé à partir de ce jeudi. "On rehausse d'une façon importante l'ambition de rénovation énergétique", assure la rapporteure pour avis Dominique Estrosi Sassone (LR).
La France s'est fixé l'objectif d'un parc immobilier au niveau bâtiment basse consommation (BBC) d'ici à 2050. "Le défi est considérable", souligne Mme Estrosi Sassone auprès de l'AFP. "Sur 29 millions de résidences principales, seulement 1,9 million sont classées A ou B selon le diagnostic de performance énergétique (DPE)". Avec le projet de loi climat, le gouvernement organise d'abord la chasse aux "passoires thermiques", des logements énergivores classés F et G. La France en compte environ 4,8 millions, selon le ministère de la Transition écologique, dont un tiers environ sont occupés par des propriétaires à faible revenu.
Le projet de loi prévoit en premier lieu d'interdire, lors du renouvellement d'un bail ou de la remise en location, d'augmenter leur loyer. Les sénateurs proposent d'avancer d'un an l'entrée en vigueur de cette interdiction, soit dès la promulgation de la loi. En 2025 pour la classe G puis en 2028 pour la classe F, ces logements seront ensuite interdits à la location. En ce qui concerne les logements classés E, que les députés ont prévu d'interdire à la location en 2034 par voie d'amendement, la rapporteure propose de repousser le couperet à 2040, échéance jugée "plus réaliste". Lors de la discussion générale, la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili a regretté ce report, sur lequel les députés pourront revenir dans la suite de la navette parlementaire.
Il répond en tout cas à l'inquiétude exprimée par les professionnels de l'immobilier. "Interdire la location de logements E, représentant à eux seuls un quart du parc de logements actuellement loués, dans un horizon irréaliste, revient à mettre en péril les conditions de logement à moyen terme de près de 5 millions de Français", ont mis en garde la FNAIM, l'UNIS et l'UNPI. En revanche, Mme Estrosi Sasonne a intégré les logements de classe D au calendrier d'interdiction de louer des logements indécents, à compter de 2048.
Quelques « carottes »
"On trace une trajectoire, on donne de la visibilité y compris à la filière du bâtiment", pour faire face à "cette massification énergétique", souligne-t-elle. Mais pour Mme Estrosi Sassone, "on ne peut pas uniquement parler de la rénovation énergétique des bâtiments, la plus ambitieuse soit-elle, si on ne propose pas parallèlement un certain nombre de mesures pour les plus modestes et les propriétaires bailleurs".
Pour les ménages les plus modestes, la rapporteure propose ainsi de garantir "un reste à charge minimal" et de demander "la gratuité des accompagnateurs de la mission Sichel". Un certain nombre d'incitations financières sont enfin mises sur la table pour les bailleurs privés et les bailleurs sociaux.
Pour aider les bailleurs sociaux, la TVA sur les travaux de rénovation des logements (économies d'énergie, accessibilité et sécurité)serait abaissée à 5,5%. Une disposition qui a toutes les chances de rencontrer l'opposition du gouvernement.
Plusieurs mesures visent les propriétaires de logements mis en location. "On ne peut pas être que sur le bâton, il faut aussi qu'il y ait une carotte", justifie Dominique Estrosi Sassone. Sont ainsi proposés : le doublement du plafond du déficit foncier à partir d'un montant significatif de travaux, l'élargissement pour les logements F et G du dispositif "Denormandie" d'aide fiscale ou une exception à l'encadrement des loyers dès lors que les passoires thermiques font l'objet d'une rénovation performante.
La rapporteure propose enfin d'introduire pour les bailleurs "un congé pour travaux de rénovation énergétique", lorsqu'ils sont importants et ne peuvent se faire dans un logement occupé, une mesure qui inquiète la gauche.