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Les majors pétrolières européennes ont vu leurs bénéfices fondre au troisième trimestre en raison de la baisse des prix du pétrole et des marges de raffinage sur fond de faible croissance mondiale, mais affichent une belle rentabilité et continuent à rétribuer généreusement leurs actionnaires.
Pour TotalEnergies, il s'agit même de la plus forte baisse de bénéfices depuis la pandémie. Son résultat net a reculé de 65% au troisième trimestre 2024, à 2,3 milliards de dollars, presque autant que les -65,7% du quatrième trimestre 2020, en plein Covid-19.
Même chose pour BP. Le géant pétrolier britannique, qui a en plus été affecté par des dépréciations d'actifs, a publié mardi un bénéfice de 206 millions de dollars contre 4,9 milliards un an plus tôt. Il s'agit "des trois mois les plus difficiles que la société ait connus depuis la pandémie", a relevé Danni Hewson, analyste chez AJ Bell.
Shell, l'autre géant pétrolier et gazier britannique, a dévoilé jeudi un bénéfice net en fort repli au troisième trimestre, à 4,3 milliards de dollars, contre 7 milliards à la même période l'an passé. Lui aussi a pâti de la baisse des marges de raffinage et des prix du pétrole.
On est loin des bénéfices stratosphériques de 2022, lorsque les majors pétrolières avaient surfé sur la flambée des prix du gaz et du pétrole dans la foulée de la reprise économique post-pandémie et l'invasion russe de l'Ukraine.
Shell et TotalEnergies avaient alors engrangé le bénéfice annuel le plus élevé de leur histoire, à respectivement 42,3 et 20,5 milliards de dollars.
Les prix du pétrole sont aujourd'hui structurellement contenus par une faible demande de la Chine, premier importateur de brut, et par des prévisions de production abondante en 2025. Ils ont été tirés vers le haut à la fin du troisième trimestre face au regain de tension au Moyen-Orient, qui entretient la volatilité.
BP s'est montrée peu optimiste pour le quatrième trimestre 2024. L'entreprise s'attend à ce que les marges de raffinage "restent faibles" et que la production "soit inférieure" à celle des trois derniers mois.
"Dans un contexte de croissance économique mondiale modeste et de tensions géopolitiques au Moyen-Orient, les prix du pétrole sont volatils", a estimé pour sa part TotalEnergies.
L'élection américaine, facteur de volatilité
"Dans l'ensemble, le contexte économique incertain, y compris les inquiétudes concernant la croissance de la Chine, continue de faire peser des incertitudes sur la demande" de pétrole, souligne Keith Bowman, analyste de Interactive Investor.
Mais "les tensions géopolitiques au Moyen-Orient et l'éventualité d'une perturbation de l'approvisionnement soutiennent quelque peu les prix".
Outre le Moyen-Orient, des facteurs plus techniques permettent aux prix du pétrole de se maintenir alors que les investisseurs voyaient le cours du Brent plonger sous les 70 dollars en raison des estimations de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), qui prévoient un marché pétrolier très abondant en 2025.
Jeudi vers 10H10 GMT, le prix du baril de Brent de la mer du Nord, pour livraison en décembre, s'échangeait à 72,62 dollars.
A cela s'ajoutent des éléments politiques. "L'élection américaine est aussi un facteur de volatilité important", prévient John Plassard, analyste chez Mirabaud. Il explique qu'une victoire de Donald Trump, "qui est favorable aux énergies fossiles", pourrait faire grimper les cours à court terme.
Ces aléas n'empêchent pas les majors pétrolières de récompenser allègrement leurs actionnaires.
TotalEnergies prévoit des rachats d'actions de 2 milliards de dollars au quatrième trimestre 2024, "afin d'atteindre 8 milliards de dollars sur l'année", selon Patrick Pouyanné.
Shell a de son côté annoncé un nouveau programme de rachat d'actions de 3,5 milliards de dollars pour les trois prochains mois, "le 12e trimestre consécutif au cours duquel nous avons annoncé des rachats de 3 milliards de dollars ou plus", indique le géant britannique.
BP enfin prévoit "au moins 14 milliards de dollars de rachats d'actions d'ici 2025". Le groupe a bouclé 1,75 milliard de dollars de rachats d'action au deuxième trimestre et s'apprête à en faire autant au quatrième trimestre.