Normes standard et émissions d'obligations vertes dans l'Union européenne

  • AFP
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La Commission européenne a proposé mardi des mesures pour rendre le secteur financier plus respectueux de l'environnement, notamment la création de normes pour l'émission d'obligations "vertes" que les entreprises et les États seraient encouragés à respecter.

Les investisseurs européens témoignent d'un vaste appétit pour la "dette verte", destinée à financer des infrastructures d'énergies renouvelables, des transports faiblement carbonés, ou des logements bien isolés... Mais l'UE ne dispose pas encore de normes communes pour mesurer le caractère écologique des projets. Un "standard européen pour les obligations vertes" constituerait "un étalon-or sur le marché, en répondant au besoin pour les investisseurs d'avoir un outil fiable et rigoureux", a souligné la commissaire aux Services financiers, Mairead McGuinness.

Ainsi, les émetteurs - y compris en-dehors de l'UE - pourraient se référer à ce standard européen, qui permettrait aussi aux acheteurs des obligations de "vérifier facilement que leurs investissements respectent des exigences strictes" en matière de développement durable et de les "protéger contre le greenwashing", fait valoir l'exécutif européen. Avec pour objectif d'obliger les autres standards existants sur les marchés à se comparer au standard européen, voire à s'aligner avec lui, souligne la Commission, dont la proposition sera désormais débattue par les eurodéputés et les États membres.

Bruxelles propose plusieurs critères : conformité à la "taxonomie" (classification, en cours d'élaboration, des activités économiques respectueuses du climat et de l'environnement), transparence sur l'usage des capitaux levés, contrôle d'auditeurs extérieurs enregistrés auprès de l'Autorité européenne des marchés financiers...

Le plan de relance européen post-Covid de 750 milliards d'euros sera d'ailleurs financé à 30% par des obligations vertes. Alors que l'UE entend réduire ses émissions carbone de 55% d'ici 2030, par rapport à 1990, "les fonds publics ne suffiront pas pour y parvenir, nous avons besoin du secteur privé" et donc de mettre en place les conditions adéquates pour favoriser ces investissements verts, a commenté devant la presse le vice-président de la Commission, Valdis Dombrovskis.

L'exécutif européen a par ailleurs dévoilé mardi une "stratégie pour la finance durable" au-delà des obligations, visant à élargir la panoplie des instruments d'investissement disponibles et les mesures incitatives pour les firmes financières comme pour les entreprises d'autres secteurs, tout en réfléchissant à une meilleure prise en compte des risques environnementaux par les agences de notation.

En se basant sur la "taxonomie", les entreprises devront par ailleurs "divulguer la part de leurs revenus, investissements et dépenses opérationnelles en lien avec les activités vertes" à partir de 2022, rappelle la Commission, qui a adopté mardi ses propositions pour une méthodologie d'évaluation.

L'Union européenne prête à lancer ses obligations vertes en octobre 2021

La Commission européenne a annoncé avoir défini les modalités de ses obligations vertes, pour permettre une première émission en octobre 2019 pour financer le plan de relance post-covid de 750 milliards d'euros.

Un tiers de ce plan devait être financé par cet outil de finance durable. "Le projet de l'UE d'émettre jusqu'à 250 milliards d'euros d'obligations vertes d'ici à 2026 fera de nous le plus gros émetteur d'obligations vertes au monde", a affirmé Johannes Hahn, commissaire au Budget, lors d'une conférence de presse.

Le cadre européen adopté est aligné sur les principes définis par l'Association internationale des marchés de capitaux (ICMA) pour les obligations vertes, un standard reconnu, a souligné la Commission qui espère convaincre du sérieux de sa démarche.

Le plan de relance européen prévoit que les États membres détaillent leurs dépenses en faveur de la transition écologique. Celles-ci doivent représenter au moins 37% de leur enveloppe globale. Bruxelles utilisera ces informations pour montrer aux investisseurs la bonne utilisation des obligations vertes.

Neuf catégories d'investissements sont prévues dont les énergies propres, l'efficacité énergétique (notamment l'isolation des bâtiments) et les transports durables.

La première émission d'obligation verte "est déjà prévue pour octobre", a annoncé la Commission.

Interrogé par des journalistes, M. Hahn a précisé que l'argent levé sur les marchés par ce mécanisme "ne pourra en aucune manière financer des investissements dans le nucléaire" car cette filière n'est pas reconnue comme contribuant à la transition verte dans le cadre du plan de relance européen. En revanche, il pourra financer des centrales à gaz "sous certaines conditions pour fournir une solution de transition dans la production d'énergie".

Le cadre réglementaire pour les obligations vertes de l'UE adopté mardi devance le projet de norme européenne pour le secteur présenté en juillet par la Commission. La proposition de "standard européen pour les obligations vertes", que Bruxelles espère à terme imposer sur les marchés pour guider Etats et entreprises, doit encore être négociée par le Parlement européen et les Etats membres, ce qui pourrait prendre au moins un ou deux ans.

La Commission ne pouvait pas attendre. "Nous avons besoin d'avoir quelque chose en place maintenant pour lancer les premières émissions. Mais nous avons fait en sorte d'anticiper et d'aligner au maximum (le cadre) avec notre proposition de juillet", a expliqué M. Hahn.

Accord sur une norme européenne en 2023

Le Parlement européen et les Etats membres de l'UE ont trouvé un accord pour créer une norme européenne d'obligations "vertes" qui entend s'imposer comme une référence mondiale pour financer la transition écologique.

La "norme européenne pour les obligations vertes", qui avait été proposée en juillet 2021 par la Commission, "permettra aux investisseurs d'orienter leurs placements avec plus de confiance vers des technologies et des entreprises plus durables", a souligné le Parlement dans un communiqué.

Cette norme s'aligne sur la taxonomie de l'UE, une législation qui définit les activités économiques pouvant être considérées comme durables.

Véritable "boussole environnementale" européenne, la taxonomie guide les investissements privés qui doivent aider l'UE à atteindre son objectif de neutralité climatique d'ici à 2050. Ses critères sont définis par des experts indépendants.

Les produits des obligations vertes européennes devront être investis dans des activités alignées sur la taxonomie, "à condition que les secteurs concernés soient déjà couverts par celle-ci", a précisé le Conseil, qui représente les 27 Etats membres.

Une flexibilité a été prévue pour les autres secteurs qui pourront représenter jusqu'à 15% des montants émis, à condition qu'ils soient conformes aux exigences de la taxonomie, en attendant que des critères écologiques soient été établis.

La nécessité de cette mesure de souplesse sera réévaluée ultérieurement.

"Les investisseurs pourront plus facilement avoir confiance dans le caractère durable de leurs investissements ce qui réduira les risques de +greenwashing+", a estimé Elisabeth Svantesson, ministre suédoise des Finances, dont le pays assure la présidence semestrielle du Conseil de l'UE.

L'Union européenne "a fait un grand pas pour verdir ce marché massif", s'est réjoui l'eurodéputé social-démocrate néerlandais Paul Tang, rapporteur du texte au Parlement, évaluant les volumes de transactions sur les obligations en Europe à 100.000 milliards d'euros par an.

L'accord conclu tard mardi par les négociateurs des institutions doit encore être confirmé formellement par le Conseil et le Parlement européen dans les semaines qui viennent. Il commencera à s'appliquer 12 mois après son entrée en vigueur.

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