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L'Irak a signé lundi avec TotalEnergies les accords d'un mégaprojet de dix milliards de dollars visant notamment à exploiter le gaz torché sur des champs pétroliers du sud et à produire de l'énergie solaire, pour pallier aux manquements d'un réseau électrique défaillant.
Après les tensions et de longues négociations ayant accompagné ce mégaprojet dévoilé en 2021, le PDG de TotalEnergies Patrick Pouyanné et le ministre irakien du Pétrole Hayan Abdel-Ghani ont paraphé l'accord lors d'une cérémonie organisée au ministère du Pétrole à Bagdad.
"Aujourd'hui nous nous engageons avec Total et tous les partenaires vers une coopération sérieuse et fructueuse, pour entamer la mise en oeuvre de ces contrats sur le terrain", s'est félicité le ministre irakien, lors d'une allocution précédant la signature des quatre projets.
L'annonce intervient au moment où l'Irak, extrêmement riche en hydrocarbures, tente d'attirer les investisseurs étrangers pour moderniser ses infrastructures, ravagées par des décennies de conflits, de mauvaise gestion publique et une corruption endémique.
Certains des investissements prévus par le mégaprojet de TotalEnergies contribueront à moderniser un secteur électrique déliquescent: au quotidien les 42 millions d'Irakiens vivent avec des délestages qui peuvent durer jusqu'à 10 heures par jour, particulièrement intolérables en été quand les températures tutoient les 50 degrés.
"Les choses sont en ordre, le partenariat est consolidé: TotalEnergies garde 45% du projet, la Basrah Oil Company 30% et QatarEnergy nous rejoint à 25%", a indiqué lundi M. Pouyanné à l'AFP.
Lors d'une allocution, il a salué un "jour historique": "TotalEnergies est né en Irak en 1924, il y a près d'un siècle, c'est donc très symbolique pour moi (...) d'être ici aujourd'hui pour maintenir et poursuivre cette histoire".
« Autosuffisance » en gaz
Interrogé par l'AFP, l'adjoint au ministre du Pétrole en charge de l'extraction, Bassem Khdeir, a assuré que "les étapes concrètes sur le terrain: la construction des infrastructures, les études", débuteront "dans un mois". Mais il faudra attendre trois ans pour que les projets "portent leurs fruits", a-t-il dit.
Un premier projet vise à récupérer le gaz torché sur trois champs pétroliers afin d'alimenter en gaz des centrales électriques du pays.
Aussi vieille que l'industrie pétrolière, cette pratique extrêmement polluante consiste à brûler le gaz s'échappant lors de l'extraction de brut. Et l'Irak est le deuxième pays du monde à recourir autant à ce procédé, juste derrière la Russie, selon la Banque mondiale.
Un deuxième projet vise à développer une centrale solaire géante de 1 GW pour alimenter le réseau électrique de la région de Bassora (sud). Un troisième concerne l'augmentation de la production du champ pétrolier d'Artawi (sud) à 210 000 barils/jour.
Un dernier volet concerne la construction d'une usine de traitement d'eau de mer pour fournir l'eau nécessaire aux champs pétroliers et contribuer à la fourniture d'eau potable de Bassora.
Ce projet permettra à terme d'avoir cinq millions de barils d'eau par jour, selon des chiffres dévoilés lundi lors de la cérémonie à Bagdad.
"Les accords d'aujourd'hui lancent le travail (...), sur le terrain on va mobiliser les équipes cet été", a assuré M. Pouyanné à l'AFP.
Il s'attend à livrer "la première tranche" de l'usine solaire "dans les deux ans". Mais les travaux du Mégaprojet devraient être achevés en 2027-2028, a-t-il poursuivi. "On aura délivré à la fois l'eau, la réduction du torchage de gaz, le champ pétrolier en production et l'intégralité de l'usine solaire", a précisé M. Pouyanné.
En Irak, les centrales électriques sont ultra-dépendantes du gaz fourni par l'influent voisin iranien, qui régulièrement coupe son approvisionnement, aggravant un peu plus les délestages quotidiens.
Les autorités cherchent donc à diversifier leurs sources d'énergie. Elles ambitionnent notamment d'éliminer progressivement d'ici 2030 le torchage de gaz dans l'objectif "d'atteindre l'autosuffisance" en exploitant ce gaz qui alimentera alors ses centrales, assure M. Khdeir.