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La Haute commission nationale électorale (HNEC) a décidé samedi le report de l'annonce de la liste des candidats retenus pour la présidentielle, rendant de plus en plus improbable la tenue dans deux semaines de ce scrutin, crucial pour sortir le pays du chaos.
La HNEC n'a pas fixé de nouvelle date pour l'officialisation des candidatures, censée donner le coup d'envoi de la première élection d'un président au suffrage universel en Libye. Selon le règlement relatif à ce scrutin, programmé le 24 décembre, la HNEC devait procéder à cette publication deux semaines après les derniers recours et décisions judiciaires sur les candidatures, soit ces jours-ci.
Mais, dans un communiqué, la HNEC a estimé qu'elle devait encore "adopter une série de mesures" judiciaires et légales "avant de procéder à la publication de la liste définitive". Compte tenu de la "sensibilité de cette étape", la HNEC veut "s'assurer d'avoir épuisé toutes les voies de recours pour que ses décisions soient conformes à celles des tribunaux".
« Préserver les acquis »
"Explicitement, ce que la Commission dit, c'est qu'elle ne peut pas publier la liste définitive (...) car elle anticipe une remise en question juridique capable de faire vaciller le processus en ce qui concerne l'éligibilité ou non des divers candidats", a expliqué à l'AFP Jalel Harchaoui, du centre de réflexion Global Initiative.
Selon cet expert, la conséquence "inéluctable" de ce report est que le premier tour de la présidentielle "ne peut pas avoir lieu le 24 décembre, puisque les candidats ont droit à deux semaines de campagne officielle après la publication de la liste définitive".
Le coordonnateur de la Mission d'appui des Nations unies en Libye (Manul), Raisedon Zenenga, a rencontré ce samedi le président de la HNEC Emad Al-Sayeh auprès duquel il a souligné "l'importance d'affronter les défis techniques et politiques émergents qui pourraient perturber le processus électoral".
M. Zenenga a aussi insisté, selon un communiqué de la Manul, sur "la nécessité de préserver les acquis engrangés jusqu'à présent, dont l'enregistrement de près de 3 millions d'électeurs", "la distribution réussie des cartes d'électeurs" et "la présence d'un grand nombre de candidats à la présidentielle et aux législatives, signes du soutien dont jouissent ces scrutins dans la population".
La Libye tente de s'extraire d'une crise politique majeure qui perdure depuis la chute de régime de Mouammar Kadhafi en 2011, dans le sillage du Printemps arabe. Après des années de conflits armés et de divisions entre l'Est et l'Ouest, le processus politique piloté par l'ONU est censé conduire le pays vers un double scrutin présidentiel et parlementaire.
Les législatives sont prévues un mois après le premier tour de la présidentielle. Le dépôt des candidatures aux législatives s'est clôturé mardi avec 5 385 inscrits qui attendent la validation de leur dossier. Les principales figures qui se présentent à la présidentielle sont le fils cadet de Kadhafi, Seif Al-Islam, le maréchal Khalifa Haftar, homme fort de l'Est, et le Premier ministre actuel, l'homme d'affaires Abdelhamid Dbeibah.
« Tensions », « méfiance »
Plusieurs candidats, dont l'ex-ministre de l'Intérieur Fathi Bachaga, n'ont pas attendu le feu vert de la HNEC pour lancer leur campagne via les réseaux sociaux. De nombreux incidents ont entaché ces dernières semaines le processus électoral, jetant le doute sur la tenue dans les délais prévus de ces scrutins cruciaux pour la stabilité de la Libye. "Les interrogations se multiplient sur la possibilité de tenir ces élections comme prévu", a commenté samedi la chaîne privée Libya al-Ahrar, évoquant un risque très élevé de "report".
Le Haut Conseil d'Etat (HCE), instance faisant office de Sénat, a proposé en milieu de semaine de reporter la présidentielle à février 2022, en raison des "tensions, de la méfiance entre les parties, et des ingérences étrangères". "Les résultats ne seraient pas acceptés" si le scrutin se tenait le 24 décembre, selon le HCE. Cette date "est devenue clairement impossible" mais "la HNEC n'a pas autorité à fixer les nouvelles dates. Seul le Parlement peut le faire", a expliqué M. Harchaoui.