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"Le solaire et l'éolien, c'est du pouvoir d'achat": les énergies vertes contribuent désormais en milliards d'euros au budget de la France, ont calculé les représentants du secteur, qui appellent l'État à en faire profiter les Français et à accélérer le déploiement des renouvelables.
Sur 2021 et 2022, ces deux sources d'énergie devraient permettre d'économiser ou d'apporter plus de 14 milliards d'euros aux finances nationales, selon des estimations présentées mardi, dans un entre-deux tours présidentiel dont l'issue affectera aussi la transition énergétique.
Les renouvelables "ne coûtent pas, elles rapportent," dit Michel Gioria, délégué général de France Energie éolienne (FEE), qui fustige les positions "à l'emporte-pièce" de certains politiques accusant l'éolien d'être "cher et inutile".
Ces 14 milliards incluent 3,3 milliards que les producteurs de solaire et d'éolien restitueront à l'État pour trop-perçu pour 2021, et les 5,1 milliards prévus pour 2022 que l'État n'aura pas besoin de débourser. S'y ajoutent 6 milliards nets que verseront les exploitants d'énergies renouvelables électriques, dont 3,7 fournis par l'éolien seul.
Pourquoi? En France, les énergies renouvelables (ENR) sont soutenues par un système de complément de rémunération entre le prix de marché et un prix "cible" fixé lors de l'attribution de chaque projet.
Mais à l'inverse, quand les prix du marché sont supérieurs au prix "cible, c'est le producteur qui verse à l'Etat la différence. Or, le prix moyen de l'électricité a explosé en 2021: à 108 euros le mégawatt-heure (MWh), puis 231 euros au cours du premier trimestre 2022, contre 50 euros avant la pandémie de Covid-19. Situation inattendue, ce soutien est donc devenu source de revenus pour l'État.
À ce rythme, l'éolien devrait avoir remboursé d'ici fin 2024 "tout ce qu'il a perçu depuis 2003", soit 11 milliards d'euros, estime la filière, qui, pour ses estimations, a travaillé avec des analystes de marché et sur les prévisions d'évolution du marché de la Commission de régulation de l'énergie (Cre).
Le secteur suggère que l'État réaffecte ces crédits "pour qu'ils contribuent à protéger les plus vulnérables du choc énergétique".
"Il faut remettre l'église au centre du village : c'est grâce aux ENR qu'on peut amortir l'augmentation de la facture électrique des Français", dit Jean-Yves Grandidier, le président de Valorem, pionnier du secteur.
« Remettre de la sérénité »
L'éolien est particulièrement ciblé par l'extrême droite, Marine Le Pen appelant à un moratoire, voire à "démonter" les parcs. Emmanuel Macron, pour sa part, soutient les ENR, solaire et éolien en mer surtout, mais des ambitions à la baisse dans l'éolien terrestre.
Or si la France veut arriver en 2050 à la neutralité carbone, tous les scénarios imposent un déploiement massif de renouvelables, avec ou sans relance du nucléaire. Entre freins juridiques et administratifs, le pays est déjà en retard sur ses objectifs. A près de 19 mégawatts (MW), l'éolien terrestre est loin des 24 MW visés en 2023. Ces énergies ont pourtant gagné en compétitivité.
Aux début des années 2000, les premières éoliennes produisaient pour près de 100 euros le MWh ; elles sont à environ 60. L'offshore est passé de 200 à 45 euros (tarif d'achat du futur parc de Dunkerque), et dans le solaire, la chute est encore plus spectaculaire. Les développeurs citent l'optimisation des process de production (innovations dans la découpe du silicium, l'épaisseur utilisable, etc). Ils citent aussi l'importance de ce régime "gagnant-gagnant" de soutien de l'État, qui leur permet d'obtenir des banques des taux d'emprunt "acceptables": or un point de taux d'intérêt en moins, c'est 3 à 4 euros/MWh en moins, soulignent-ils.
"Alors que nous sommes dans une crise énergétique majeure, que la question du pouvoir d'achat monte en flèche, que notre énergie dépend toujours à 65% des combustibles fossiles, nous disons: cette situation difficile impose une réponse rapide", dit Michel Gioria. "Et pour cela, il n'y a pas une palette de choix infinie", souligne-t-il: "il faut regarder les ENR, remettre un peu de sérénité dans le débat et engager une planification efficace sur 10-15 ans, avec un discours assumé de l'État".
Selon la fédération, l'éolien, avec 10 GW de projets terrestres dans les tuyaux et 700 MW rapidement raccordables, pourrait alléger la tension sur l'offre électrique dès l'hiver prochain.