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Le chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi, est attendu mercredi en Iran, pour des discussions cruciales sur le programme nucléaire de la République islamique, alors que la marge de manœuvre pour les négociations se réduit selon lui.
« Arriver à des solutions diplomatiques »
Sa visite intervient deux jours après les déclarations du nouveau ministre de la Défense d'Israël - ennemi juré de l'Iran - qui a prévenu que Téhéran était "plus exposé que jamais à des frappes sur ses installations nucléaires".
Israël accuse depuis des années l'Iran de chercher à se doter de l'arme nucléaire, ce que Téhéran dément vigoureusement.
Les deux ennemis ont échangé ces derniers mois des tirs de missiles dans un contexte de fortes tensions au Moyen-Orient en raison de la guerre menée par Israël à Gaza contre le Hamas palestinien et au Liban contre le Hezbollah, deux mouvements islamistes alliés de l'Iran.
"Les marges de manœuvre commencent à rétrécir" pour l'Iran, a prévenu mardi M. Grossi dans un entretien à l'AFP, ajoutant qu'il était "impératif de trouver des moyens pour arriver à des solutions diplomatiques".
L'AIEA est autorisée à effectuer des inspections en Iran, a-t-il déclaré, "mais nous devons en voir plus. Compte tenu de l'ampleur, de la profondeur et de l'ambition du programme iranien, nous devons trouver des moyens de donner plus de visibilité à l'agence", a ajouté le chef de l'AIEA.
Les Iraniens "disposent d'un nombre important de matières nucléaires qui pourraient être utilisées pour fabriquer une arme nucléaire", a déclaré M. Grossi dans une interview mardi à la chaîne américaine CNN, ajoutant: "Ils n'ont pas d'arme nucléaire à ce stade".
Mise en garde de Trump
La visite de M. Grossi intervient une semaine après la victoire à la présidentielle américaine de Donald Trump, artisan d'une politique dite de "pression maximale" à l'encontre de l'Iran durant son premier mandat (2017-2021). M. Trump a assuré la semaine dernière qu'il ne cherchait pas à nuire à l'Iran et souhaitait au contraire "un pays très prospère" pour les Iraniens. Il a toutefois insisté sur le fait que Téhéran ne pouvait "pas avoir d'arme nucléaire".
En 2015, l'Iran et les grandes puissances incluant les États-Unis ont conclu à Vienne un accord, après 21 mois de négociations. Le texte prévoyait un allègement des sanctions internationales visant Téhéran en échange de garanties qu'il ne cherche pas à acquérir l'arme atomique. Mais M. Trump a retiré unilatéralement son pays de l'accord en 2018 et rétabli les sanctions à l'encontre de l'Iran.
Depuis, le pays a considérablement augmenté ses réserves de matières enrichies à 60%, proches des 90% nécessaires pour élaborer une arme atomique, selon l'AIEA. L'accord sur le nucléaire plafonnait ce taux à 3,65%. C'est dans ce contexte que M. Grossi revient en Iran après une première visite cette année au mois de mai.
Dans un communiqué, l'AIEA a indiqué qu'il tiendrait "des réunions de haut niveau avec le gouvernement iranien" et mènerait "des discussions techniques sur tous les aspects".
Caméras débranchées
Le président iranien, Massoud Pezeshkian, qui souhaite un allègement des sanctions contre son pays pour relancer l'économie, est favorable à de nouvelles négociations pour ranimer l'accord.
Toutes les tentatives ont échoué ces dernières années avec les pays signataires (France, Royaume-Uni, Allemagne, Etats-Unis, Russie et Chine).
L'Iran a fortement réduit depuis 2021 les inspections de ses sites nucléaires. Des caméras de surveillance ont été débranchées et l'accréditation d'un groupe d'experts a été retirée.
Les bases du programme nucléaire iranien remontent à la fin des années 1950, lorsque les Etats-Unis ont signé un accord de coopération civile avec le dirigeant iranien d'alors, Mohammad Reza Pahlavi.
En 1970, l'Iran a ratifié le Traité de non-prolifération (TNP), qui fait obligation aux Etats signataires de déclarer et placer leurs matières nucléaires sous le contrôle de l'AIEA.
Plusieurs responsables iraniens se sont publiquement interrogés ces dernières années sur la question de posséder la bombe atomique comme outil de dissuasion, dans un contexte de tensions exacerbées avec Israël.
L'ayatollah Ali Khamenei, au pouvoir depuis 1989 et ultime décideur dans les dossiers sensibles du pays en particulier le nucléaire, a interdit dans un décret religieux (fatwa) tout recours à l'arme atomique.