La Russie toujours confrontée à une incursion ukrainienne majeure

  • AFP
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Les forces russes font toujours face jeudi à une incursion majeure des troupes ukrainiennes dans la région frontalière de Koursk, un revers inattendu pour la Russie dont l'armée était à son avantage jusque-là sur le front.

Pour la présidence ukrainienne, cette offensive surprise, déclenchée mardi, est une conséquence de "l'agression" russe en Ukraine depuis près de deux ans et demi, au prix de dizaines de milliers de morts et de destructions massives.

"La guerre est la guerre, avec ses propres règles, l'agresseur y paye inévitablement les conséquences correspondantes", a affirmé jeudi sur X Mykhaïlo Podoliak, un conseiller de l'administration présidentielle ukrainienne.

Il n'a toutefois pas attribué clairement cette opération à Kiev, les autorités ukrainiennes observant depuis mardi un silence quasi total à ce sujet.

La veille, à la télévision ukrainienne, M. Podoliak avait jugé que, pour obtenir quelque chose de Moscou à "la table des négociations", il ne fallait pas que le conflit suive "le scénario" établi par les Russes.

Les troupes ukrainiennes ont attaqué le territoire russe avec jusqu'à 1.000 soldats, des chars et des blindés, selon l'état-major des forces russes, qui dit tout faire pour les repousser hors de Russie.

"L'opération de destruction des formations de l'armée ukrainienne se poursuit", a déclaré jeudi le ministère russe de la Défense, assurant les empêcher de "pénétrer profondément" dans la région.

- Station de gaz -

Si la communication officielle russe se veut rassurante - les autorités régionales évoquant encore jeudi une situation "stable et sous contrôle" -, le tableau dressé par des experts militaires est plus alarmiste.

L'Institut pour l'étude de la guerre (ISW), qui siège aux Etats-Unis, a estimé dans son dernier rapport que les Ukrainiens avaient avancé jusqu'à 10 kilomètres de profondeur et traversé "au moins deux lignes de défense russes".

Selon plusieurs analystes, les soldats ukrainiens ont atteint Soudja, une ville russe d'environ 5.500 habitants située à une dizaine de kilomètres de la frontière et qui abrite une station de gaz fournissant toujours l'Europe via l'Ukraine.

Jeudi, la chaîne Telegram Rybar, proche de l'armée russe, a affirmé que Soudja était "pratiquement sous le contrôle" des forces ukrainiennes et que l'armée russe n'était plus présente qu'à un rond-point à l'est de cette cité.

Selon cette source, les Ukrainiens ont aussi progressé en direction de la ville de Korenevo, à plus de 25 kilomètres de la frontière, et des combats sont toujours en cours dans des localités de ce secteur.

Rybar souligne que, contrairement aux précédentes incursions en Russie, revendiquées par des groupes paramilitaires alliés à Kiev, celle-ci est entièrement menée par l'armée régulière ukrainienne.

Des chaînes Telegram d'observateurs militaires ukrainiens ont diffusé des images de drone, non vérifiées, montrant ce qui est présenté comme étant des soldats russes se rendant.

L'armée russe, qui n'a confirmé directement aucune avancée ukrainienne, avait initialement déclaré mardi avoir obligé les troupes de Kiev à "se replier".

Puis, le lendemain, Vladimir Poutine était apparu visiblement en colère à la télévision russe, dénonçant une "provocation à grande échelle" de l'Ukraine.

- 3.000 personnes évacuées -

Bien que l'ampleur de la progression des militaires ukrainiens ne soit donc pas claire, le géant Gazprom a assuré jeudi continuer à livrer quotidiennement, comme à son habitude, son gaz via sa station à Soudja.

Celui-ci transite ensuite par l'Ukraine à destination notamment de la Slovaquie et de la Hongrie, dont le Premier ministre Viktor Orban est bien disposé à l'égard de Vladimir Poutine.

Par ailleurs, les autorités de la région de Koursk ont affirmé jeudi avoir été visées par une attaque informatique ayant rendu "temporairement indisponibles" de "nombreux services".

Mercredi, elles avaient instauré l'état d'urgence et affirmé qu'au moins cinq civils avaient trouvé la mort et 28 avaient été blessés, dont des enfants. Environ 3.000 personnes ont déjà été évacuées, dont 1.500 dans des centres d'hébergement provisoires, toujours selon les autorités régionales.

Dans la région russe voisine de Belgorod, un homme a été tué et une autre personne blessée jeudi dans une frappe ukrainienne, d'après le gouverneur.

Côté ukrainien, selon les autorités, au moins cinq civils ont péri jeudi dans des bombardements russes, dont deux dans la région de Soumy (nord) qui fait face à celle russe de Koursk.

L'incursion ukrainienne en Russie intervient alors que l'armée russe est à l'offensive depuis plusieurs mois en différents points du front face aux troupes ukrainiennes, moins nombreuses et moins bien équipées, malgré une aide occidentale importante depuis février 2022.

Les Russes poursuivent en particulier leur lente avancée dans la région orientale de Donetsk, où ils pourraient, selon les observateurs, s'emparer de villes importantes si cette tendance se maintenait. L'Ukraine affirme de son côté infliger de lourdes pertes aux assaillants.

Mi-mai, les militaires russes ont également lancé une offensive dans la région ukrainienne de Kharkiv (nord-est), stoppée dans la cité de Vovtchansk par Kiev, qui a néanmoins dû y dépêcher de précieuses ressources.

bur/bds

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