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Le fier président de la COP28 n'avait plus de temps à perdre: après deux nuits d'ultimes négociations éreintantes, il n'a fallu que cinq minutes à Sultan Al Jaber pour adopter d'un coup de maillet nerveux un accord historique sur l'abandon progressif des énergies fossiles, malgré la déception des Etats insulaires.
"Je n'entends aucune objection? C'est décidé", a-t-il déclaré à 11H15 (07h15 GMT) mercredi, déclenchant les applaudissements et l'ovation debout de toute la salle où les délégués, réunis depuis le 30 novembre aux Emirats Arabes unis riches en pétrole, venaient à peine de s'asseoir.
"Ceci est le consensus des Emirats arabes unis", a-t-il claironné à la tribune, visiblement soulagé après avoir promis pendant des mois un accord "historique" et subi le flot des critiques pour sa double casquette de président d'une COP et de la compagnie nationale pétrolière Adnoc.
"Nous avons une formulation sur les énergies fossiles dans l'accord final, pour la première fois" dans l'histoire des conférences climatiques des Nations unies, a-t-il ajouté, déclenchant une salve d'applaudissements plus nourrie encore.
Dans les instants qui précédaient, les négociateurs bavardaient joyeusement dans l'immense salle plénière du non moins gigantesque parc des expositions de Dubaï, où les tractations avaient débordé d'une journée sur le terme annoncé.
L'atmosphère détendue entre délégués fourbus, quatre heures seulement après la publication d'un nouveau projet d'accord, laissait présager d'une issue favorable, loin du tollé provoqué lundi par le premier compromis proposé par Sultan Al Jaber.
"Les Saoudiens sont à bord, c'est surprenant, mais les Chinois aussi, les Américains,... c'est inespéré", affirme un négociateur européen juste avant l'ouverture.
Sous ses yeux, les chefs de délégation de l'Arabie Saoudite et de la Chine échangent quelques mots, tout sourire. Leur opposition affichée à un accord de "phase-out" (la sortie) des énergies fossiles menaçait de les isoler, avant qu'ils n'acceptent finalement "une transition" vers leur abandon.
L'Inde, dépendante du charbon et très effacée lors des deux semaines du sommet, allait-elle s'opposer? "J'ai des échos mitigés", rapportait le négociateur, impatient de lever cette ultime inquiétude.
Absence des Etats insulaires
Quelques minutes plus tard, le texte est adopté. Mais l'enthousiasme est toutefois entamé par la déception des petits Etats insulaires, les premiers menacés de disparition à cause du réchauffement climatique.
"Nous ne voulions pas interrompre l'ovation lorsque nous sommes entrés dans la salle, mais nous sommes un peu confus: vous venez de donner le coup de maillet et l'Alliance des petits Etats insulaires (Aosis) n'était pas dans la salle", a déclaré Anne Rasmussen, représentante des Samoa.
"Nous sommes arrivés à la conclusion que la correction de trajectoire nécessaire n'a pas été assurée", a-t-elle ajouté, jugeant le texte inadéquat pour espérer sauver les îles de la submersion par la montée des eaux.
De longs applaudissements et des cris d'encouragements ont conclu son discours, venus de la société civile, unanimement debout au fond de la salle.
Les délégués européens et de nombreuses autres nations, qui avaient ovationné un peu plus tôt l'accord, ont alors participé à cette longue manifestation de soutien. Reconnaissant ainsi les difficiles concessions de l'accord de Dubaï, pour eux qui auraient aimé acter une sortie plus rapide du pétrole, du gaz et du charbon.