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Kwasi Kwarteng a pris début septembre à 47 ans la tête du Trésor britannique avec la lourde tâche de de sortir le Royaume-Uni d'une grave crise du coût de la vie sans faire plonger les finances publiques. Las: alors qu'il est en poste depuis trois semaines, ses mesures ont déclenché une tempête sur les marchés et de vertes critiques du FMI.
"Il y a beaucoup de pression sur Kwasi Kwarteng", car la longévité politique de la nouvelle Première ministre Liz Truss sera intimement liée à sa performance, estimait début septembre Tony Travers, professeur à la London School of Economics (LSE), interrogé par l'AFP.
Mais son plan budgétaire annoncé la semaine dernière à base de baisses d'impôts très coûteuses en plus d'un soutien massif aux factures d'énergie a jeté le trouble sur les marchés qui craignent une sortie de route des finances publiques.
La livre sterling a plongé à son plus bas historique et les taux d'emprunt de l'Etat britannique sur les marchés ont flambé.
La Banque d'Angleterre a même annoncé mercredi intervenir en urgence face à des "risques réels pour la stabilité financière britannique", en rachetant les titres de dettes dont se délestent les investisseurs.
Quant au Fonds monétaire international, il s'est lancé dans une critique acerbe et très inhabituelle de la politique de M. Kwarteng, l'invitant à rectifier le tir: un véritable camouflet.
Kwasi Kwarteng, partisan enthousiaste du Brexit et soutien de la première heure de Liz Truss - ils sont amis de longue date - est le premier Chancelier de l'Echiquier noir du pays.
Fils d'immigrés du Ghana arrivés au Royaume-Uni dans les années 60, celui qui était depuis janvier 2021 ministre des entreprises, de l'industrie et de l'énergie est aussi un libéral pur jus, apôtre d'impôts faibles et de l'économie de marché.
Vu son parcours, M. Kwarteng "ressemble à bien des égards à une sorte de Thatchérien militant", selon Tony Travers, en référence à l'ancienne Première ministre ultralibérale Margaret Thatcher.
Le ministre des Finances avait co-signé en 2012, avec d'autres conservateurs dont Liz Truss, le livre "Britannia Unchained", qui prônait notamment un Etat au périmètre réduit et qualifiait les travailleurs britanniques de "pires fainéants du monde" (la Première ministre a fait des vagues pendant sa campagne en évoquant de nouveau un manque d'ardeur supposé au travail des Britanniques).
- Orthodoxie budgétaire contrariée -
Pressée d'agir en pleine crise du coût de la vie, Liz Truss avait annoncé dès les premiers jours de son mandat des aides immédiates dont un gel des tarifs de l'énergie, qui ont doublé en un an.
Mais les annonces budgétaires de M. Kwarteng ont été critiquées car les aides aux factures d'énergie se sont accompagnées des plus fortes baisses d'impôts en 50 ans, favorisant les plus riches et sans être compensées par des réductions de dépenses.
M. Kwarteng affirme qu'il est focalisé sur la croissance et promet qu'il détaillera des mesures pour réduire la part de la dette comparé au PIB lors de sa prochaine déclaration budgétaire le 23 novembre.
Comme ministre de l'énergie, il s'était attiré les critiques de l'opposition et des ONG en dévoilant une nouvelle stratégie mettant l'accent sur le nucléaire, les renouvelables, mais aussi les énergies fossiles en mer du Nord, la sécurité énergétique reprenant le dessus sur l'urgence climatique depuis la guerre en Ukraine.
M. Kwarteng, décrit comme brillant, très sûr de lui, affable, est né à Waltham Forest (nord-est de Londres) et il a vécu dans la capitale britannique la plus grande partie de sa vie. Il est marié à une avocate, Harriet Edwards, avec qui il a eu une fille l'an dernier.
Polyglotte - il se piquerait d'écrire de la poésie en latin - passionné d'histoire et de musique, le Chancelier est aussi fan de cricket. "Si vous pouvez lui expliquer les choses par une analogie avec (ce sport), vous attirerez toujours son attention", assure au quotidien The Times le député Mark Fletcher, qui a travaillé avec lui.
Fils d'un économiste et d'une avocate, ila eu un parcours typique de l'élite britannique: études secondaires à Eton grâce à une bourse, doctorat en histoire économique à l'université de Cambridge, après un passage à Harvard.
Il a travaillé comme analyste financier, chroniqueur dans la presse, avant d'être élu député de Spelthorne, au sud-ouest de Londres, en 2010.