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Le cobalt, le tungstène et l'étain figurent en tête des métaux dont l'approvisionnement pourrait devenir problématique, avec des incertitudes sur le futur des véhicules électriques et du stockage de l'énergie, selon des experts réunis jeudi au Forum Mondial des Matériaux (WMF) à Nancy.
"L'électrification est une tendance très importante", a souligné Patrick Koller, PDG de l'équipementier automobile Faurecia. Il a estimé que près de la moitié du marché automobile sera "électrifié" d'ici 2030 dont 13% de véhicules purement électriques, tandis que la part du moteur thermique tombera, selon lui, de 95% en 2017 à 52% en 2030.
La conséquence la plus notable sera la forte hausse de la demande de certains métaux utilisés dans les batteries, avec en premier lieu le cobalt et le nickel. Mais "jusqu'en 2030, les matières premières ne seront pas un problème pour l'électrification" des véhicules, assure M. Koller.
Le cobalt figure toutefois au premier rang des métaux "critiques", dans l'étude menée conjointement par le WMF, le BRGM (Bureau des recherches géologiques et minières) et les cabinets Mc Kinsey et CRU Consulting, présentée jeudi.
Basée sur six critères allant de l'estimation des réserves connues à la possibilité de substitution ou de recyclage du métal, et examinant aussi le "risque politique", cette analyse classe les éléments selon leur niveau de risque, du vert au rouge.
Le cobalt, classé "rouge", est "un ingrédient essentiel des batteries" et la croissance des véhicules électriques fait que le besoin global en cobalt pourrait ne pas être couvert "entre 2025 et 2030", a expliqué à l'AFP Pierre Toulhoat, directeur des opérations du BRGM. En outre, la moitié de l'approvisionnement vient de RD Congo, un élément de risque politique, selon l'étude.
D'autres sources sont envisageables, comme l'exploitation d'anciens déchets de mines de cuivre qui recèlent du cobalt. Des expérimentations ont été menées avec succès par le BRGM en Ouganda, il y a une vingtaine d'années.
Incertitudes
L'automobile est "un secteur où il y a encore de grosses incertitudes sur la domination de telle ou telle technologie", ce qui impose de "garder une attention très soutenue sur un certain nombre de métaux qui vont percer plus ou moins, en fonction des technologies", a ajouté le responsable du BRGM.
"Bien sûr, certains matériaux sont critiques, mais surtout, ce qui est critique c'est l'incertitude qui règne sur les choix futurs de motorisation et de génération d'énergie", a souligné à l'AFP, Victoire de Margerie, vice-présidente du WMF. "On doit continuer à investir, parce que si on n'investit pas, il n'y aura pas les capacités pour répondre aux besoins des clients", mais "si on se trompe sur l'investissement, parce que finalement ce n'est pas le bon choix de motorisation ou le bon choix de génération d'énergie, ça va coûter très cher", ajoute-t-elle.
Le développement des véhicules électriques va demander entre 6 et 8 milliards de dollars d'investissements en infrastructures pour chaque million de nouveaux véhicules mis sur le marché, selon le WMF. "L'industrie n'a aucun problème pour accepter une mutation, à condition que cette mutation soit organisée et qu'on lui donne le temps", note Patrick Koller.
Le vanadium en question
Dans ce contexte d'incertitude, l'un des métaux à suivre est le vanadium, dont les réserves sont pourtant estimées à 250 ans et avec des capacités minières suffisantes.
Mais, indique M. Toulhoat, "il peut y avoir une percée du vanadium pour les batteries redox à flux", une nouvelle technologie sur laquelle mise la société minière canadienne Ivanhoe. Son patron Robert Friedland affirme que "les risques de pénurie de cobalt et de nickel sont bien réels".
Deux autres métaux sont en première ligne de l'étude du WMF, le tungstène et l'étain. Pour ce dernier, c'est le sous-investissement dans le développement de mines qui pose problème. Le zinc a déjà connu cette difficulté.
S'agissant du tungstène, outre la dépendance vis-à-vis de la Chine, ce métal connaît de nouveaux usages "qui sont en train de se développer à grande vitesse (...) en métallurgie pour des alliages extrêmement performants pour l'aéronautique et pour la fabrication additive", selon le BRGM.
Enfin, trois terres rares sont classées en "rouge": le dysprosium, le néodyme, le praséodyme.