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Robinet coupé : les livraisons de gaz russe à l'Europe via l'Ukraine ont définitivement cessé mercredi, après l'expiration d'un contrat signé entre les deux parties fin 2019 et maintenu malgré l'invasion du pays par la Russie.
Un tiers des livraisons de gaz russe à l'Europe
Cet arrêt, qui concerne près du tiers des livraisons totales de gaz russe à l'Europe, inquiète plusieurs pays de l'Est européen, notamment la Moldavie, particulièrement vulnérable, et la Slovaquie qui a averti de graves conséquences.
"Nous avons arrêté le transit du gaz russe, c'est un événement historique. La Russie perd des marchés, elle va subir des pertes financières", s'est félicité le ministre ukrainien de l'Énergie, Guerman Galouchtchenko.
Aucune livraison n'était prévue mercredi, selon des données publiées la veille par l'opérateur ukrainien GTSOU, actant l'expiration d'un contrat quinquennal établi en 2019 entre la compagnie ukrainienne Naftogaz et le géant russe Gazprom.
« Sécurité énergétique »
Cette fin du transit est "l'une des plus grandes défaites de Moscou", s'est félicité mercredi le président ukrainien Volodymyr Zelensky. "Lorsque (Vladimir) Poutine a pris le pouvoir en Russie il y a plus de 25 ans, le volume annuel de gaz envoyé via l'Ukraine vers l'Europe s'élevait à plus de 130 milliards de m3. Aujourd'hui, le transit de gaz russe est à zéro, ce qui constitue l'une des plus grandes défaites de Moscou", a-t-il écrit sur les réseaux sociaux.
En 2019, Volodymyr Zelensky s'était pourtant réjoui d'un accord synonyme de "sécurité énergétique" et de "prospérité pour les Ukrainiens", qui devait rapporter au pays "plus de sept milliards de dollars" sur cinq ans. Mais les temps ont radicalement changé. La Russie a envahi l'Ukraine en février 2022 et son armée attaque régulièrement les infrastructures énergétiques ukrainiennes.
Gazprom a confirmé dans un communiqué que "depuis 08h00 (05h00 GMT), le gaz russe n'a pas été fourni pour le transit à travers l'Ukraine". Ses exportations vers l'Europe via le territoire ukrainien s'élèvent à un peu plus de 14 milliards de mètres cubes par an, selon des chiffres officiels.
Hausse du prix du gaz
Dans ce contexte tendu, le cours du gaz européen a atteint mardi la barre symbolique des 50 euros le mégawattheure, une première depuis plus d'un an.
Ces dernières semaines, la Hongrie et la Slovaquie se sont plaintes de voir le robinet coupé.
Le Premier ministre slovaque Robert Fico, bien disposé envers Vladimir Poutine et dont le pays est très dépendant de l'approvisionnement en gaz russe, a averti mercredi d'un "impact drastique sur nous tous dans l'UE".Ce dirigeant nationaliste s'est rendu à Moscou le 22 décembre pour tenter de trouver une solution dans l'urgence, provoquant la colère de Volodymyr Zelensky, qui l'a accusé de vouloir "aider Poutine".
La Hongrie reçoit l'essentiel de ses importations de gaz russe via TurkStream, qui passe sous la mer Noire, et l'arrêt du transit via l'Ukraine ne l'affectera que marginalement, même si le Premier ministre Viktor Orban a dit "ne pas vouloir abandonner" cette route.
Parmi les plus proches alliés de Kiev, la Pologne, par la voix de son chef de la diplomatie Radoslaw Sikorski, a de son côté salué "une nouvelle victoire" sur Moscou.
Avec la fin de ce transit et plus de deux ans après le sabotage des tubes Nord Stream en mer Baltique, l'Europe ne sera désormais plus approvisionnée en gaz russe que par TurkStream, et son prolongement Balkan Stream. Elle importe par ailleurs d'importantes quantités de gaz naturel liquéfié (GNL) russe par méthaniers.
État d'urgence en Moldavie
Si l'UE affirme s'être préparée à un tel scénario, le cas de la Moldavie - qui a décrété l'état d'urgence - est plus critique. Gazprom avait annoncé l'arrêt des livraisons avant même l'officialisation par Kiev de la fin du contrat de transit, dans le contexte d'un différend financier avec cette ex-république soviétique aux aspirations européennes.
Dans ce pays, la région séparatiste prorusse de Transdniestrie "traverse une situation difficile" après que le fournisseur local Tiraspoltransgaz "a interrompu l'approvisionnement en gaz naturel et en chauffage", a averti le porte-parole du gouvernement moldave Daniel Voda, appelant la Russie à "cesser son chantage".
Les habitants sont invités à "s'habiller chaudement", à "se regrouper dans une seule pièce" et à ne pas utiliser des moyens de chauffage artisanaux pour prévenir les risques d'incendie, selon le communiqué d'une société d'énergie. Selon les autorités, 131 écoles et 147 jardins d'enfants ont dû être coupés du réseau en raison de l'arrêt de l'approvisionnement.
Le chef des séparatistes prorusses, Vadim Krasnosselskiï, a rapidement reconnu "un problème" et convoqué une réunion d'urgence.
Le reste de la Moldavie est épargné pour l'instant, notamment grâce à l'aide de la Roumanie voisine. Il ne reçoit déjà plus de gaz russe depuis le début de la guerre en Ukraine mais dépend pour une grande partie de ses besoins en électricité de la centrale thermique de Transdniestrie.