
Vue générale du LN0 : Laboratoire de R&D sur la fabrication du combustible MOX (©Y.Audic/CEA)
À RETENIR
- Le combustible MOX (acronyme de « Mélange d'OXydes ») est un mélange d’oxyde d’uranium (de l'ordre de 93%) et d’oxyde de plutonium (de l'ordre de 7%).
- Ce combustible permet de recycler le plutonium provenant du combustible « traditionnel » usé : un réacteur « moxé » qui fonctionne avec 30% de combustible MOX consomme autant de plutonium qu’il en produit.
- Depuis 1972, 44 réacteurs commerciaux dans le monde ont produit de l'électricité grâce à du combustible MOX.
- En France, 10% de l’électricité d'origine nucléaire est aujourd’hui produite grâce au MOX.
Définition et procédé physique
Le combustible MOX est un mélange d’oxyde d’uranium (de l'ordre de 93%) et d’oxyde de plutonium (de l'ordre de 7%) utilisé dans certaines centrales électronucléaires pour limiter la consommation d’uranium naturel en recyclant le plutonium extrait des combustibles usés.
MOX est l'acronyme de « Mélange d'OXydes ». Le même terme est employé en anglais (pour « Mixed Oxides »). Les variantes « MOx » et « Mox » sont également utilisées(1).
Le combustible MOX s'intègre dans une approche nucléaire du « cycle fermé » adoptée par la France : le combustible usé est traité et recyclé (sous forme de MOX) pour optimiser la gestion des déchets
Uranium et plutonium
L’uranium est l’élément chimique de numéro atomique 92 et de symbole U. Le minerai d'uranium naturel est constitué de trois isotopes : l'uranium 238 (à 99,3%), l'uranium 235 (à 0,7%) et l'uranium 234 (à un taux <0,01%). Pour être utilisé comme combustible dans les centrales nucléaires actuelles, l’uranium doit être enrichi en isotope 235 (seul isotope fissile de l'uranium naturel), jusqu’à une teneur comprise entre 3% et 5%.
Le plutonium est l’élément chimique de numéro atomique 94 et de symbole Pu. Il n’existe quasiment plus dans la nature (hormis en quantités infimes) mais est créé par l’irradiation du combustible à l’uranium dans les réacteurs nucléaires. Le plutonium a de nombreux isotopes, tous radioactifs (de masse 232 à 246), ceux que l’on retrouve en plus grandes quantités dans le domaine de l’industrie nucléaire étant les isotopes de masse 239, 240 et 241. Comme l’uranium, le plutonium est une matière à haute valeur énergétique : la fission d’un gramme de plutonium produit plus d’énergie que la combustion d’une tonne de pétrole.
Le plutonium 239, isotope fissile, est produit dans les réacteurs nucléaires à partir d’uranium 238. L’uranium 238 capture un neutron et se transforme en uranium 239. A son tour, l’uranium 239 transmute en neptunium 239 par transformation d’un neutron en proton et éjection d’un électron. Le neptunium 239 se transforme enfin en plutonium 239 par un processus similaire.
Le traitement du combustible nucléaire usé
Le traitement du combustible usé permet de séparer les matières valorisables (plutonium, uranium) des déchets ultimes (produits de fission). Il présente un triple intérêt :
- le recyclage des matières énergétiques (uranium, plutonium) encore contenues dans le combustible usé, dont 96 % sont valorisables sous forme de combustible MOX ;
- la simplification de l’entreposage (provisoire) ou du stockage (définitif) des déchets non valorisables qui sont isolés et conditionnés afin de réduire leur volume ;
- la réduction par 10 de la toxicité à long terme des déchets ultimes et par 5 de leur volume. Ces derniers sont conditionnés comme des produits industriels suivant des spécifications techniques précises et approuvées internationalement.
Concrètement, les combustibles sont retirés du cœur du réacteur nucléaire au bout de trois ou quatre ans. Ils sont alors stockés dans les piscines des réacteurs des centrales nucléaires pour commencer leur « désactivation ». Puis ils poursuivent cette désactivation pendant cinq à huit ans dans les piscines de l’usine de retraitement de La Hague (France).
À l'issue de cette période de désactivation, les assemblages sont sortis de l’eau et cisaillés en tronçons de quelques centimètres. Le matériau nucléaire est alors extrait par dissolution dans de l'acide. Grâce à des solvants, les produits de fission (plutonium et uranium) sont séparés. L’uranium est concentré sous forme de nitrate liquide puis reconverti en un gaz, l'hexafluorure d'uranium (UF6), ou bien transformé en oxyde pour un recyclage ultérieur. Le plutonium est conditionné sous forme d’oxyde en boîtes étanches. Il peut ainsi être recyclé et intégré dans la fabrication de combustible MOX.
Quant aux déchets, ils font l’objet de conditionnements spécifiques en colis standards approuvés internationalement par les autorités de sûreté en fonction de leur nature et de leur radioactivité.
Avantages du recyclage du plutonium
Le recyclage du plutonium présente trois avantages principaux :
- la limitation des quantités de plutonium produites par les centrales. En effet, un réacteur qui fonctionne avec 30% de combustible MOX consomme autant de plutonium qu’il en produit. Il contribue ainsi à l’effort de stabilisation des stocks de matières nucléaires ;
- la réduction de la toxicité à long terme des déchets ;
- des économies importantes d’uranium enrichi et donc d’uranium naturel.
Le combustible MOX est également utilisé pour transformer du plutonium militaire en source d'énergie civile. La technologie MOX française a été retenue dans le cadre du programme de non-prolifération mis en place par les États-Unis et la Russie. Ce programme vise à éliminer une partie des stocks de plutonium d'usage militaire excédentaires en les utilisant dans du combustible pour produire de l’électricité.
La fabrication du combustible MOX
Les techniques de fabrication du combustible MOX sont similaires à celles mises en œuvre lors de la production du combustible nucléaire conventionnel à base d’uranium enrichi (combustible « neuf » dit aussi « UOX » pour « Uranium Oxide »).
Cette fabrication se déroule en 5 étapes clés ci-après.
1) Le mélange des poudres
Un « mélange primaire » est tout d’abord constitué à partir de poudres d'oxyde de plutonium, d'oxyde d'uranium appauvri et de chamotte obtenue à partir de pastilles broyées (voir étape 3). De l’uranium appauvri est ensuite ajouté afin d'obtenir la teneur requise. Ce mélange final est appelé « mélange secondaire ».
2) Le frittage
Le mélange secondaire obtenu est ensuite compacté sous forme de pastilles. Ces dernières sont cuites dans un four à haute température (jusqu'à 1 700°C) pour être converties en céramique.
3) La rectification
Afin d’obtenir le diamètre requis (au micron près), les pastilles sont rectifiées entre deux meules. Les pastilles non conformes sont renvoyées en amont pour y être recyclées sous forme de « chamotte » (étape 1).
4) Le grainage
Les pastilles obtenues sont insérées dans des tubes en alliage de zirconium appelés « crayons ». Chaque crayon mesure environ 4 mètres de long et est composé d'environ 320 pastilles. Les crayons sont ensuite nettoyés, puis contrôlés.
5) L’assemblage
La dernière étape consiste à insérer les crayons dans une structure métallique pour former un « assemblage ». Cet assemblage constitue le produit fini. Les assemblages sont également soumis à des contrôles de fabrication pour garantir leur futur comportement en réacteur.
Les assemblages MOX occupent 30% du cœur d'un réacteur « moxé » en France, les 70% restants étant des assemblages contenant de l’uranium enrichi.
Lieu de fabrication du MOX en France
En France, la fabrication du combustible MOX intervient dans l'usine de recyclage Orano Melox à Marcoule (Gard)(2).
Le graphique ci-après, issu du projet de PPE 3, représente les installations françaises du cycle du combustible nucléaire.

Précisons que le combustible MOX usagé est stocké en piscine de désactivation et traité comme déchet.
Usage du MOX dans le monde
Comparable au combustible « neuf » à l’uranium enrichi pour le comportement en réacteur, le combustible MOX est utilisé depuis près d'un demi-siècle dans dans des réacteurs à eau légère : depuis 1972 en Allemagne (les derniers réacteurs du parc nucléaire allemand ont été arrêtés en avril 2023), 1984 en Suisse, 1987 en France, 1995 en Belgique.
En France, EDF utilise du combustible MOX dans 22 réacteurs techniquement adaptés pour recevoir ce type de combustible au sein du parc nucléaire français.
En France, 10% de l’électricité nucléaire est aujourd’hui produite grâce au combustible MOX. « Avec le recyclage de l’uranium et du plutonium, c’est une économie de 25% des ressources naturelles qui peut être réalisée », précise Orano.
7 pays utilisant du combustible MOX
Depuis 1972, 44 réacteurs commerciaux dans le monde - réacteurs à eau sous pression (REP) ou à eau bouillante (REB) - ont produit de l'électricité grâce à du combustible MOX (ils sont dits « moxés »), selon Orano(3).
Sur le total, 38 réacteurs moxés sont situés en Europe : 22 en France donc, 10 en Allemagne, 3 en Suisse, 2 en Belgique et 1 aux Pays-Bas depuis 2014).
S'ajoutent à cette liste 2 autres pays utilisant du combustible MOX : le Japon (5 réacteurs chargés en combustible MOX depuis le début des années 1970) et les États-Unis (1 réacteur).
Précisons qu'au Japon, l’utilisation du combustible MOX avait débuté en 2009, date à laquelle il était prévu de charger 16 à 18 réacteurs avec ce type de combustible, dont le réacteur 3 de la centrale de Fukushima Daiichi qui avait été rénové en 2010 pour être « MOXé ».