- Source : Chaire Économie du Climat
Aux États-Unis, la politique énergétique de l’administration Trump est marquée par une rupture avec les engagements d'Obama pour lutter contre le changement climatique, comme en témoignent entre autres l’annonce en juin 2017 du retrait de l’accord de Paris et l’abandon du Clean Power Plan.
Dans ce « policy brief » publié par la Chaire Économie du Climat de l’université Paris-Dauphine, Vincent Bertrand(1) constate que l’intérêt pour la co-combustion de biomasse dans les centrales au charbon, très populaire aux États-Unis depuis 2014, perdure toutefois aujourd’hui (pratiquée dans près de 40 des 435 centrales au charbon du pays). Il en explique les raisons, l’impact positif à court terme et le risque à long terme.
Dès janvier 2017, un livre blanc sur le sujet avait été transmis par le bureau d’études FutureMetrics à l’administration Trump(2), qualifiant la co-combustion de bois dans les centrales au charbon de « win-win-win ». Il profite à la filière forestière américaine, en offrant un nouveau débouché à sa production de pellets de bois(3) alors qu’elle est affectée par un recul de la demande de papier, mais aussi au secteur charbonnier cher à Donald Trump qui subit la rude concurrence du gaz de schiste.
Dans ces conditions, la co-combustion permet de protéger l’emploi, priorité de l’administration Trump, mais aussi de réduire à court terme les émissions de CO2 grâce à une baisse du contenu carbone de l’électricité produite par les centrales à charbon américaines. Cette baisse des émissions constitue un « co-produit » bienvenu qui laisse espérer une politique climatique plus ambitieuse des États-Unis. Vincent Bertrand met toutefois en garde sur le risque à long terme de pénaliser des technologies bas carbone en favorisant cette co-combustion qui pourrait constituer « un moyen détourné de prolonger » l’usage de l’énergie fossile émettant le plus de gaz à effet de serre.
Le livre blanc de FutureMetrics recommande la mise en place d’un « mécanisme de compensation du surcoût associé à la co-combustion par rapport à une utilisation classique des centrales au charbon ». A un taux de combustion de 10% de pellets dans les centrales à charbon, le surcoût à compenser est estimé à près de 7 $ par MWh. Cette stratégie pourrait par ailleurs peser sur la ressource forestière américaine(4). Elle constitue ainsi avant tout « une solution transitoire » ou nécessiterait de s’accompagner en parallèle d’une tarification du carbone ambitieuse pour ne pas freiner le développement des énergies renouvelables, indique Vincent Bertrand.
Sources / Notes
- Vincent Bertrand est maître de conférences en sciences économiques à l'Université de Franche-Comté (UFR STGI, laboratoire CRESE) et chercheur associé à la Chaire Économie du Climat (Paris-Dauphine).
- « Trump wants to save the coal industry. We offer a plan that can help », FutureMetrics, 2 janvier 2017.
- Le recours au pellet de bois est bien adapté à cette co-combustion en raison des faibles contraintes induites (en matière de pertes de rendement, de corrosion, d’encrassement, etc.).
- La quantité maximale de pellets que la forêt américaine peut fournir « de façon soutenable (c’est-à-dire en assurant la reproduction de la ressource et le cycle court du carbone) » est évaluée à 20 millions de tonnes par an. Ce qui correspond à la quantité de pellets nécessaires en cas de développement de la co-combustion dans 25% des centrales américaines au charbon à l’horizon 2030.