Royaume-Uni : la politique climatique au cœur de la campagne des législatives à Aberdeen, capitale européenne des hydrocarbures

  • AFP
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À Aberdeen, capitale européenne des hydrocarbures, les électeurs s'intéressent bien plus qu'ailleurs au Royaume-Uni aux ambitions climatiques du parti travailliste, qui devrait arriver au pouvoir après les législatives du 4 juillet.

Inquiétude des travailleurs en mer du Nord

Le Labour a promis de faire du Royaume-Uni une "superpuissance" des énergies vertes, même s'il a revu à la baisse son grand plan d'investissements, accusé par les conservateurs de ne pas pouvoir le financer. Le réchauffement climatique est le grand absent de la campagne électorale, mais c'est un sujet crucial pour les habitants d'Aberdeen, sur la cote nord-est de l'Ecosse, où des dizaines de milliers de personnes travaillent dans l'énergie.

"Une transition soigneusement gérée assurera que les travailleurs pourront être déployés dans les secteurs bas carbone alors que la course pour atteindre la neutralité carbone s'accélère", explique à l'AFP Michael Love, d'Opito, un organisme de formation spécialisé dans l'énergie.

S'ils arrivent au pouvoir, les travaillistes prévoient de ne plus accorder de nouveaux permis d'exploitation de pétrole et de gaz, et d'augmenter une taxe sur les bénéfices exceptionnels des producteurs d'énergies fossiles. Ils veulent aussi supprimer une exemption fiscale dont bénéficie ce secteur.

Des industriels et d'autres partis ont estimé que ces mesures menaceraient 100 000 emplois au Royaume-Uni, accusation que le chef du parti travailliste écossais, Anas Sarwar juge "alarmiste". "S'attendre à ce que les travailleurs en mer du Nord votent pour le Labour aujourd'hui, c'est comme leur demander de scier la branche sur laquelle ils sont assis", lance Francesco Mazzafatti, président de Viaro Energy, spécialisée dans les hydrocarbures.

Le Premier ministre conservateur Rishi Sunak, qui a rétropédalé sur de précédents engagements climatiques du Royaume-Uni, s'est lui engagé à accorder de nouveaux permis d'exploration. Les électeurs sont "profondément inquiets" de l'impact du programme du Labour sur leur avenir, affirme à l'AFP Stephen Flynn, du parti indépendantiste SNP, au pouvoir en Ecosse mais menacé par l'ascension du Labour.

Créer des emplois

A Aberdeen, beaucoup reconnaissent que l'avenir de la planète passe pas les énergies renouvelables, souhaitant que la ville devienne la "capitale de la neutralité carbone" en Europe après avoir été celle des hydrocarbures.

Chris Murray, chômeur qui compte voter pour le SNP, souhaiterait davantage de formations dans l'éolien et les énergies vertes marines. "Avant, c'était facile d'obtenir un contrat d'apprentissage sur une plate-forme pétrolière. Mais c'est en train de disparaître", constate-t-il.

Les travaillistes affirment que leur grand plan pour une "prospérité verte" créera 650 000 emplois d'ici 2030 dans le pays, et permettra d'atteindre la neutralité carbone d'ici 2050, alors que les experts mettent en garde sur la "lenteur inquiétante" des progrès britanniques en matière de réduction des gaz à effet de serre.

Au coeur du projet travailliste figure la création d'un fonds d'investissement public, doté de 8,3 milliards de livres (9,8 milliards d'euros) d'argent public, baptisé "Great British Energy" et dont le siège serait basé en Ecosse.

L'objectif est d'accroître l'indépendance énergétique du pays et de réduire les prix de l'électricité et du gaz, qui ont flambé après l'invasion russe de l'Ukraine début 2022, fait valoir le parti. "Une électricité propre est la meilleure opportunité que nous ayons eue depuis une génération pour créer la prochaine génération d'emplois", a défendu le mois dernier le chef de l'opposition travailliste, Keir Starmer, en faisant campagne en Ecosse.

« Sujet secondaire »

Le Labour a été critiqué ces derniers mois pour avoir revu à la baisse son projet initial d'investir 28 milliards de livres (33,16 milliards d'euros) par an dans les infrastructures vertes.

Invoquant les difficultés financières héritées des conservateurs, il prévoit désormais d'investir 23,7 milliards de livres en cinq ans.

Il veut aussi décarboner la production d'électricité du pays d'ici 2030 et réintroduira l'interdiction des ventes de voitures roulant au gazole ou à l'essence d'ici 2030, un objectif repoussé à 2035 par les conservateurs.

Début juin, l'ONG "Les Amis de la Terre" a demandé aux partis politiques "d'arrêter de traiter le climat et l'environnement comme un sujet secondaire".

"La prudence économique est peut-être le principe cardinal des travailliste, mais ce n'est absolument pas prudent de ne pas investir dans les actions qui protégeront notre avenir", a critiqué Mike Childs, responsable de la recherche et des politiques de l'ONG.

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