L'Union européenne prépare l'enterrement des voitures à essence et diesel

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La voiture essence ou diesel a vécu, l'avenir est électrique. Bruxelles doit proposer mercredi de réduire à zéro les émissions de CO2 des véhicules neufs durant la prochaine décennie pour lutter contre le changement climatique. Une page d'histoire se tourne. Pendant plus d'un siècle, le Vieux continent, berceau de marques prestigieuses, a dominé l'innovation automobile. Au cœur de son savoir-faire, des moteurs thermiques considérés comme les plus performants au monde.

Mais la voiture, premier mode de déplacement des Européens, est brocardée pour ses émissions de gaz à effet de serre. Face à cette urgence, l'UE a durci en 2020 ses objectifs de réduction de CO2 et vise la neutralité carbone en 2050. La Commission européenne doit proposer mercredi de nouvelles réglementations pour y parvenir. Selon plusieurs sources, elle envisagerait la suppression complète des émissions automobiles à partir de 2035.

Les véhicules électriques à batteries étant les seuls à satisfaire cette exigence, ils deviendront de facto les seuls autorisés sur le marché du neuf. L'Europe a imposé dès 2020 un plafond moyen de 95 grammes de CO2 par kilomètre aux constructeurs automobiles, qui devait être encore abaissé de 37,5% en 2030. Finalement, la réduction pourrait atteindre 60% en 2030, puis 100% en 2035. Ces chiffres, toujours en discussion, représenteraient une immense contrainte pour une industrie qui devra compter aussi d'ici 2027 sur le durcissement des normes de pollution imposées aux moteurs thermiques.

Essor de l'électrique

Dans un marché globalement en recul à cause de la pandémie de coronavirus, les voitures électriques progressent fortement. Elles ont représenté près de 8% des immatriculations en Europe de l'Ouest sur les cinq premiers mois de l'année, soit 356 000 véhicules, "plus que sur l'ensemble de l'année 2019", selon l'analyste allemand Matthias Schmidt.

Les nouvelles réglementations favoriseront encore plus ces véhicules et pousseront à l'abandon des hybrides et hybrides rechargeables, qui associent moteur essence et batterie. De quoi inquiéter la filière qui emploie 14,6 millions de salariés dans l'UE et qui mise encore beaucoup sur cette "technologie de transition".

Si Bruxelles instaure des mesures d'accompagnement notamment pour développer les bornes de recharge, "nous sommes ouverts à des réductions de CO2 supplémentaires en 2030", a affirmé récemment Oliver Zipse, président de l'association européenne des constructeurs (ACEA).

Le lobby, qui s'est longtemps battu pour ralentir la transition, est profondément divisé. La majorité de ses membres souligne qu'une électrification trop rapide augmenterait le prix des véhicules, détruirait des emplois et favoriserait la concurrence chinoise, en avance sur les batteries.

Volkswagen déjà prêt

Mais le leader européen Volkswagen, qui représente une vente sur quatre en Europe, a rejoint l'américain Tesla dans la promotion du 100% électrique, après avoir fait scandale en 2015 en avouant le trucage de ses moteurs diesel.

"Il y a un énorme conflit au sein de l'ACEA. À cause du Dieselgate, Volkswagen a été poussé vers l'électrique pour améliorer son image. Le groupe a consenti d'énormes investissements et maintenant il a les produits pour respecter la future législation", explique Matthias Schmidt. "Volkswagen est en parfaite position pour gagner des parts de marché et envoyer certains concurrents dans le mur". En juin, la marque a annoncé qu'elle cesserait de vendre des moteurs à combustion en Europe entre 2033 et 2035.

"Une voiture reste en général quinze ans sur la route. Si on veut avoir un transport complètement décarboné en 2050, il faut que la dernière voiture thermique soit vendue en 2035 au plus tard", estime Diane Strauss, responsable de l'ONG Transport and Environment pour la France.

Dans un classement publié en juin, l'ONG a épinglé Daimler (Mercedes), BMW, Stellantis (PSA, Fiat) et Toyota, dont elle juge les projets "peu ambitieux" car faisant la part belle aux hybrides rechargeables jugés polluants. Renault et Hyundai sont bien classés, bien que derrière Volkswagen et Volvo.

La fin des moteurs thermiques en "2035, c'est le bon compromis entre 2030, qui est trop tôt sur le plan industriel et social, et 2040, qui est trop tard sur le plan climatique", estime Pascal Canfin, président de la commission Environnement au Parlement européen. Il plaide cependant pour la création d'un fonds de "quelques milliards d'euros" afin d'accompagner les centaines de PME des filières menacées par la mutation technologique.

Commentaires

Serge Rochain
Ma PHEV a déjà 7 ans..... donc je peux la garder encore 15 ans ? Cool !
daphné
pardon de mon ignorance je ne connais rien aux voitures parce que je n'en ai pas: c'est quoi une PHEV ?
Serge Rochain
Désolé de ce raccourcie ... PlugIng Hybride Electric Vehicle et en français Véhicule hybride rechargeable. Il s'agit en l'occurrence d'un Outlander de chez Mitsubishi doté d'une batterie de 12KWh et permet de faire 50 Km en pure électrique avec son CX de Panzer avant de basculer sur le moteur thermique. Comme je fais chaque jour moins de 50 Km je roule toute l'année en électrique en rechargeant sur une prise ordinaire dans mon garage pendant que je dors et je me moque bien que cela mette 5 heures quand la batterie est vide, et pour les quelques longs voyages de l'année (4 ou 5) je ne passe pas mon temps à attendre que les bornes de recharge veuillent bien remplir la batterie de leurs précieux électrons si le voyage dépasse 600 Km (qui est mon autonomie totale essence + électrique) je fais le plein à la pompe à essence en 5 minutes, comme avant avec ma Tucson à mazout, et je repars avec 550 Km d'autonomie en essence. Je pense que c'est aujourd'hui le meilleur compromis et les constructeurs de voitures aussi car il y a 7 ans c'était le seul modèle dans cette catégorie et maintenant tous les constructeurs en font..... mais je garde le mien, c'est la meilleure voiture que j'ai jamais eu, et j'en ai éclusé des carrosses en 60 ans de conduite.
jean-jacques Attia
ce serait une grave erreur pour la planète, Monsieur Rochain. Lisez le nouveau rapport de l’ONG Transport & Environment qui confirme que les véhicules hybrides rechargeables sont à la fois de mauvais véhicules thermiques et de mauvais véhicules électriques, bref que ce sont des gros pollueurs. Il vaudrait mieux passer au tout électrique, mais je suppose que votre discours sur la nocivité du nucléaire serait alors moins virulent... Et s'il ne faut rouler que quand il y a du vent, autant se mettre à la navigation à voile !
Pierre-Ernest
Je veux bien prendre le pari qu'en 2040, non seulement il y aura beaucoup de véhicules thermiques en circulation en Europe, mais encore qu'il y aura aussi toujours beaucoup de véhicules fabriqués en Europe. Il ne faut pas prendre ses désirs pour des réalités...
Nourdine Khoufache
Je crois qu'ils vont les enterrer chez nous en Afrique ?!
daphné
Il faut une transition et en attendant l'hydrogène meilleur marché et la pile à combustible le mieux c'est encore le GN . Mais comme on manque de bornes de recharge contrairement à d'autres pays d'Europe ( Pays-Bas, Pologne, Italie...) le mieux serait l'installation de kits de bicarburation , essence ou diesel/ GN soutenue par l'état et avec des microcrédits à intérêts minimes et des termes longs pour les non imposables qui ont absolument besoin de leurs vieux véhicules (I/3 des véhicules circulant en France ont plus de 10 ans) et n'ont pas d'argent pour en changer. Les lobbies du tout électrique avec les batteries au ion-lithium sont encore pires que ceux du pétrole ou peut-être sont-ils les mêmes qui ont changé d'objectif. Mêmes pressions mêmes techniques médiatiques avec l'argent des états à leur botte. Les batteries au lithium c'est TRES polluant à produire et les firmes n'exploitent pas seulement les sites mais aussi les mineurs. Ces véhucules coûtent un argent fou à l'état en soutien et subventions pour une classe moyenne qui peut se les payer. Le Climat a bon dos! Et l'état pourrait faire aussi un effort pour les bornes de GN / biogaz compatibles, ne serait-ce que pour l'alimentation les véhicules touristiques provenant de pays qui ont adopté le GN...sinon ils éviteront la France...
EtDF
Et en route pour le grand dérèglement climat social!
Blin Jean
J'ai lu : "Bruxelles doit proposer ... ". Qui est ce Bruxelles ? J'ai cherché le nom de ce député élu dans l'annuaire de la chambre des députés, je n'ai pas trouvé.
MEHDI JAILLET
Je suis quelque peu dubitatif devant cet enthousiame disproportionné qui ne répond que très partiellement à l'enjeu. Nous savons aujourd'hui tous que nos pollutions environnementales doivent être abordées de manière globale; d'une part les vents ne s'arrêtent pas aux frontières, d'autre part parce qu'il faut tenir compte du cycle de vie complet, de l'extraction des matériaux au démantèlement et à l'éventuel recyclage si tant est qu'il soit possible en pratique. Tel que vous le présentez, la proposition de la Commission Européenne se limite aux émissions de CO2 par km parcouru mais ne dit rien sur les émissions avant le 1er km, c'est-à-dire les émissions liées à l'extraction des matières premières - dont les terres rares - et à la fabrication et aux transports des véhicules jusqu'à leur utilisateur final. Etant donné l'importance et l'urgence relative à la réduction sinon l'élimination totale des émissions de CO2, la réponse est d'abord l'éducation des masses à la décroissance des déplacements en fréquence et en distance, même si cela compromet la filière automobile, de quelque nationalité qu'elle soit, y compris française. C'est aussi l'arrêt des constructions de nouvelles voies routières favorisant le déplacement individuel.
Edouard Bonnefous
"Si on veut avoir un transport complètement décarboné... il faut que la dernière voiture thermique soit vendue ..." Quels raccourcis de raisonnement ! 1 - Le complètement décarboné n'existe pas, il faut tout compter dans l'ACV, fabrication comprise. 2 - Les moteurs thermiques : peuvent fonctionner avec des carburants moins fossiles (type E85) et être optimisés 3 - Les VE hybridés thermiques pourrait être "smart" avec le minimum pour l'autoroute = 40 ch (30 kW) en thermique, ce qui permet une petite batterie et donc un véhicule moins cher et moins lourd ! 4 - Ne pas négliger le "rétrofit" De plus, les inconvénients du tout électrique généralisé demeurent : coût, autonomie, temps de recharge, queue à la recharge, fourniture des pics de puissance électrique, saisonnalité

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