- AFP
- parue le
Les pénuries d'essence au Royaume-Uni se sont aggravées pendant le week-end sous l'effet des "achats de panique" des automobilistes inquiets, au point que le gouvernement envisage selon la presse de mobiliser l'armée pour combler le manque de chauffeurs routiers.
Malgré des appels du gouvernement à ne pas paniquer, les stations-service ont été prises d'assaut depuis que certaines enseignes ont indiqué subir à leur tour les difficultés de livraisons touchant aussi les rayons alimentaires des supermarchés sous l'effet de la pandémie et du Brexit.
Dans une station de Leyton, un quartier de l'est de Londres, une queue de 50 voitures s'étendait dès 6h30 lundi, avec des consommateurs ayant passé une partie de la nuit à attendre de pouvoir faire le plein, a constaté un photographe de l'AFP.
Partout à travers le pays, les panneaux "plus d'essence" ou des pompes couvertes d'un bandeau "hors service" se multiplient, avec notamment environ 30% des stations du géant BP touchées par des pénuries de carburant.
Selon la PRA, l'une des associations de distributeurs de carburants, jusqu'aux deux-tiers de ses membres (5.500 sites indépendants sur un total de 8.000 stations dans le pays), étaient à court de carburant dimanche, "les autres presque à sec".
Les associations de travailleurs médicaux s'alarment, comme EveryDoctor qui dit recevoir des retours de beaucoup de ses membres "qui ont passé le week-end à tenter de trouver de l'essence sans succès".
La situation rappelle les années 70 quand la crise énergétique avait amené à un rationnement du carburant et une semaine de travail de trois jours. Il y a une vingtaine d'années, des manifestations contre le prix élevé du carburant avaient également entraîné un blocage de raffineries et paralysé l'activité du pays pendant des semaines.
- Visas provisoires -
Face aux pénuries de carburant ou aux étalages qui se dégarnissent dans les magasins, attribués à un manque de chauffeurs routiers, les autorités cherchent des solutions et envisagent selon la presse de mobiliser l'armée.
Le ministre de l'Environnement George Eustice a assuré que le gouvernement ne prévoyait pas "en l'état" d'envoyer des soldats conduire les camions de livraison, comme l'affirment plusieurs médias, mais que des militaires aideraient à accélérer la formation de nouveaux conducteurs.
Sous pression, le pouvoir s'est en revanche résolu samedi à amender sa politique d'immigration post-Brexit et à accorder jusqu'à 10.500 visas de travail provisoires, d'octobre à décembre pour pallier un manque criant de chauffeurs routiers mais aussi de personnel dans des secteurs clés de l'économie britannique, comme les élevages de volailles.
Le gouvernement a également temporairement exempté le secteur des distributeurs de carburant des règles de la concurrence afin qu'ils puissent livrer en priorité les zones qui en ont le plus besoin.
Brian Madderson, un responsable de la PRA, a nuancé l'effet qu'aurait la mobilisation de militaires, car transporter du carburant, très inflammable, exige des chauffeurs "très spécialisés" avec des procédures spécifiques.
Quant à la perspective d'un retour des chauffeurs européens rentrés dans leur pays avec la pandémie et le Brexit, il a fait valoir qu'il y avait aussi des pénuries de chauffeurs en Europe continentale.
Il a relevé le problème des permis de conduire de poids lourds qui n'ont pu être passés pendant les confinements: "il y a 40.000 demandes en instance de permis de poids lourds la part de Britanniques".
Si BP salue la décision du gouvernement d'accorder plus de visas temporaires aux chauffeurs routiers, le groupe avertit que "cela prendra du temps au secteur de renforcer les livraisons et de reconstituer les stocks dans les lieux de vente".
Le gouvernement martèle qu'il n'y a pas de pénurie de carburants en soi dans le pays, les manques étant provoqués par les achats massifs de consommateurs inquiets, et met en cause des déclarations alarmistes d'une fédération de transporteurs routiers ayant semé la panique.
En pleine conférence annuelle du parti d'opposition travailliste, Rachel Reeves, responsable des questions financières du Labour, a elle fustigé le gouvernement conservateur de Boris Johnson pour être "endormi au volant" face à la crise d'approvisionnement du pays.