- AFP
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Profondément divisé sur le pétrole, le G20 a échoué à appeler à une sortie des énergies fossiles samedi, mais soutient pour la première fois un triplement des renouvelables d'ici 2030: une "lueur d'espoir" pour les uns, un "strict minimum" pour les autres à trois mois de la COP28.
L'avenir des énergies fossiles, cause essentielle de la crise climatique de plus en plus sévère, est cette année au coeur des négociations internationales devant culminer en décembre à la 28e Conférence climat des Nations unies à Dubaï.
Une sortie des énergies fossiles sans captage de CO2 ("unabated") est d'ailleurs jugée "indispensable" par le premier bilan d'étape officiel de l'accord de Paris, publié vendredi par l'ONU Climat. Et le G7 en a approuvé le principe au printemps, certes sans calendrier.
Mais au terme du sommet du G20, qui représente 80% des émissions mondiales de gaz à effet de serre (Etats-Unis, France, Japon, Indonésie, Brésil...), la déclaration finale se contente d'appeler à "accélérer les efforts vers la réduction de la production d'électricité à partir de charbon", ce qui exclut le gaz et le pétrole, et de réaffirmer l'engagement à "réduire et rationaliser, à moyen terme, les subventions pour des usages inefficaces des énergies fossiles", comme à d'autres sommets auparavant.
Le G20, dont les désaccords géopolitiques sont nombreux, que ce soit sur l'Ukraine ou en raison de la rivalité entre Etats-Unis et Chine, s'oppose aussi sur l'avenir du pétrole, avec de grands producteurs comme l'Arabie saoudite très réticents sur le sujet.
- "Avancée surprenante" -
"Les dirigeants se sont mis d'accord sur le strict minimum, une répétition de l'engagement du G20 de Bali en 2022 sur la réduction progressive du charbon", a déploré Lisa Fischer, experte du cercle de réflexion E3G.
Les dirigeants du G20 réunis à New Delhi reconnaissent toutefois que la limitation du réchauffement à 1,5 °C, objectif le plus ambitieux de l'accord de Paris, "nécessite une réduction rapide, forte et soutenue des émissions de 43% d'ici 2030 par rapport à 2019", conformément aux recommandations du Giec (Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat de l'ONU). Et ils "notent" qu'un pic des émissions doit être atteint d'ici 2025.
Alors que l'année 2023 est en voie de devenir la plus chaude jamais mesurée, "ce G20 était censé montrer la voie vers un avenir sans énergies fossiles", a réagi Friederike Roder, vice-présidente de l'ONG Global Citizen, dénonçant "un très mauvais signal pour le monde".
Une réduction des énergies fossiles figure toutefois dans les ambitions du président de la COP28: Sultan Al Jaber, en même temps patron de la compagnie pétrolière nationale émiratie ADNOC, a lui-même jugé leur nette réduction "inévitable et essentielle", une fois bâti cependant le système énergétique propre du futur répète-t-il toujours.
Sur ce sujet, il est notable que le G20 affirme pour la première fois qu'il "poursuivra et encouragera les efforts visant à tripler les capacités en matière d'énergies renouvelables" d'ici 2030, un objectif qui semble désormais à portée de main pour un consensus à la COP28.
"Il s'agit d'une avancée significative et surprenante de la part du G20", s'est félicitée Aditya Lolla, du groupe de réflexion sur l'énergie Ember, saluant "un grand revirement de la part de l'Arabie saoudite et de la Russie".
- Plus d'argent ? -
C'est "une lueur d'espoir dans notre lutte contre le chaos climatique", a abondé Andreas Sieber de l'ONG 350.org.
Mais encore faut-il que les pays riches "fournissent les financements nécessaires" aux plus pauvres.
L'Inde, pays hôte, a d'ailleurs profité de sa présidence pour se positionner comme la voix du "Sud global" et presser les pays riches à respecter leurs engagements existants -- celui, non atteint depuis 2020, de porter l'aide climatique annuelle à 100 milliards de dollars -- et d'aller plus loin pour aider les nations vulnérables à s'adapter et à se protéger des futurs désastres climatiques.
La déclaration prévient que les investissements dans le domaine du climat doivent "augmenter considérablement", notamment par le biais d'un financement plus ambitieux de la part des banques et institutions multilatérales, revendication cruciale et constante des pays en développement.