En Ukraine, une mine espère des investissements tirés d'un accord avec Trump

  • AFP
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Dans un paysage lunaire d'excavations jaunâtres et grises, d'énormes machines se déplacent. Bienvenue dans une mine ukrainienne, qui espère l'arrivée d'investisseurs étrangers à la faveur d'un accord sur les ressources du pays voulu par le président américain Donald Trump.

"L'Ukraine est très riche en ressources minières. Et si on ne les exploite pas, l'Ukraine va simplement perdre des revenus qu'elle pourrait obtenir", se lamente Dmytro Golik, directeur de cette entreprise située dans la région de Jytomyr, dans le centre-ouest de l'Ukraine.

Sa mine produit de l'ilménite, un minerai utilisé comme pigment blanc dans les peintures, plastiques, aliments ou cosmétiques, mais qui est aussi l'un des principaux minerais de titane, un métal recherché pour ses propriétés par l'industrie aérospatiale ou l'électronique.

Il est l'une des ressources ukrainiennes dans le viseur de Donald Trump qui veut conclure un accord avec Kiev sur un accès aux minerais ukrainiens, vu comme une compensation de l'aide militaire et financière versée pour combattre l'invasion russe depuis trois ans.

L'Ukraine, qui concentrerait 5% des ressources minières mondiales, est considérée comme le 11e producteur mondial de titane, selon World Mining Data.

Les gisements ukrainiens pourraient contenir "environ 185 millions de tonnes de titane" dont "64 à 65 millions de tonnes" dans la région de Jytomyr, assure Dmytro Golik.

Des semaines d'âpres négociations entre Kiev et Washington n'ont pas encore abouti à un accord.

Le document devait être signé vendredi dernier à la Maison Blanche en présence des présidents Volodymyr Zelensky et Donald Trump, mais la cérémonie a été annulée à la dernière minute après une spectaculaire joute verbale entre les deux hommes.

- Difficiles négociations -

Même avant l'altercation à Washington, les pourparlers sur ce document étaient très difficiles.

Volodymyr Zelensky en a rejeté plusieurs versions, pointant le risque d'endetter "dix générations d'Ukrainiens" et insistant sur le besoin de garanties de sécurité américaines. Trump cherchait, lui, à garantir à son pays des revenus plus importants tirés de ces minerais.

Kiev et Washington ont fini par se mettre d'accord sur un document-cadre devant mener à la création d'un fonds conjoint, censé gérer une partie des revenus issus de l'exploitation des minerais ukrainiens.

Ces derniers jours, des responsables ukrainiens et américains ont réitéré leur volonté de le signer prochainement. Mais aucune date n'a encore été fixée et ses conditions pourraient encore changer, ont rapporté des médias mercredi.

Dmytro Golik refuse catégoriquement de spéculer sur l'accord potentiel et ne sait pas si son entreprise - qui s'étend sur 400 hectares et emploie 350 personnes - pourrait être concernée.

Mais ce dont il est certain, c'est que son industrie a "vraiment besoin d'investissements" car, dit-il, les entreprises ukrainiennes n'injectent pas d'argent dans ce secteur.

"Qui seront ces investisseurs ? Je pense que nos employés, notre peuple, sont moins intéressés par cela que par le fait qu'ils auront des emplois stables", estime le responsable.

D'autant que les recettes issues des impôts sur le secteur permettraient de financer la défense nationale, avance-t-il.

- "Protection supplémentaire" -

Pour Dmytro Golik, l'arrivée d'un "investisseur étranger fort" constituerait "une sorte de protection supplémentaire pour le pays".

"Ce n'est pas seulement la responsabilité de l'Ukraine, cela devient la responsabilité de l'Europe ou du monde entier", poursuit-il.

Si sa mine n'a pas été directement touchée par les attaques russes, son fonctionnement est gravement perturbé par des coupures d'électricité régulières à la suite de frappes russes sur le réseau énergétique ukrainien, raconte le directeur.

Avec l'arrivée des investisseurs espérés, la production pourrait ensuite être "facilement vendue à l'Europe et ailleurs dans le monde", assure Dmytro Golik.

Tous ne sont pas aussi enthousiastes, surtout sur fond de tensions avec Washington. Donald Trump a opéré un rapprochement soudain avec la Russie de Vladimir Poutine, et son pays a annoncé lundi une pause de son aide militaire à Kiev.

Les exigences financières américaines ont été jugées prédatrices par certains en Ukraine, pays ravagé par la guerre.

Serguiï, l'opérateur d'une énorme pelle à benne traînante et qui travaille depuis 35 ans sur le site, avoue avoir suivi les informations sur ces pourparlers avec "inquiétude".

"Les ressources naturelles, c'est le bien du peuple", dit-il, convaincu qu'elles "doivent appartenir à l'Ukraine".

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