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Y aura-t-il des coupures de courant cet hiver ? L'hypothèse est envisagée par le gestionnaire du réseau électrique RTE mais apparaît peu probable : le reconfinement doit faire baisser la consommation tandis que bon nombre de réacteurs nucléaires ont été remis en marche.
"La continuité de l'approvisionnement en électricité pour les mois de décembre 2020, janvier et février 2021 n'est pas sécurisée et dépendra uniquement des conditions climatiques", a alerté cette semaine le Comité social et économique (CSE) central d'EDF. "Face à une politique qui réduit les moyens de production d'électricité pilotables, il sera impossible en cas de période de froid (simplement comparable aux hivers 2018 et 2012) d'assurer l'équilibre du réseau électrique", juge-t-il.
La politique visée est notamment la réduction de la part du nucléaire dans la production d'électricité, qui a conduit à la fermeture des deux réacteurs de la centrale nucléaire de Fessenheim cette année, que n'ont pas digérée les syndicats.
La France s'est aussi engagée à arrêter ses centrales à charbon très polluantes d'ici 2022, un cap qui a été confirmé par le gouvernement. Pourtant, le pays y a eu recours cette année dès septembre, du fait d'une moindre disponibilité du parc nucléaire mais aussi d'un anticyclone réduisant la production éolienne.
« Marges »
Pour cet hiver, le gestionnaire du réseau RTE a prévenu depuis longtemps que la "vigilance" serait de mise. En cause : la pandémie de Covid-19 qui a bousculé le planning de maintenance des réacteurs nucléaires au printemps. RTE a averti que la saison hivernale serait notamment marquée par "une probabilité de tension élevée fin novembre - début décembre en cas de froid précoce".
Mais le reconfinement a probablement changé le tableau. On relève a priori "moins de consommation sur le réseau" même si "l'effet exact est encore peu connu", remarque Nicolas Goldberg, du cabinet Colombus Consulting. "Si demain la consommation française baisse, cela crée des marges", relevait en octobre Xavier Piechaczyk, le président de RTE, qui va remettre à jour ses modèles au cours du mois de novembre.
Pendant le confinement du printemps, la consommation d'électricité avait chuté jusqu'à 15-20%, reflétant le fort ralentissement de l'activité économique.
Côté production, EDF s'était dit en octobre "relativement confiant" dans sa capacité à produire suffisamment d'électricité cet hiver. Le groupe espère approcher 42 ou 43 réacteurs nucléaires en fonctionnement au mois de novembre, sur les 56 du parc. Un objectif toujours de mise malgré le report de la remise en service des deux réacteurs de la centrale de Flamanville (Manche), dont l'un doit redémarrer seulement fin janvier. "Nous sommes actuellement à 41 réacteurs connectés au réseau d'électricité", indiquait-on vendredi chez EDF.
Pas d'alarmisme
Des mesures sont toutefois toujours envisagées en cas de déséquilibre entre l'offre et la demande électriques. Certaines sont indolores, comme une légère diminution de la tension sur le réseau, qui ferait par exemple briller les ampoules un peu moins vivement. RTE dispose aussi de mécanismes qui lui permettent de baisser la consommation jusqu'à 3 gigawatts (GW), l'équivalent de trois réacteurs nucléaires.
Il existe d'une part un mécanisme dit "d'effacement", qui a été doublé, sous forme de contrats passés par appel d'offres avec des entreprises ou des particuliers qui acceptent temporairement de réduire ou différer certaines de leurs consommations. Un autre dispositif dit "d'interruptibilité" permet aussi d'arrêter immédiatement la fourniture de courant sur 18 sites de gros consommateurs d'électricité sous contrat avec RTE.
En dernier recours, il est enfin prévu le recours au "délestage" c'est-à-dire à des coupures organisées et tournantes de l'alimentation électrique d'environ 200 000 foyers à la fois pendant 2 heures. Une mesure extrême mais destinée à éviter le blackout - une panne généralisée et non contrôlée.
"Il n'y aura pas de délestage cet hiver", parie pour sa part Nicolas Goldberg. "On est en période de sous-consommation, le nucléaire a remonté la pente, les effacements ont répondu présent à la suite d'un appel d'offres exceptionnel lancé cet été", résume-t-il.
"On est vigilants mais pas non plus alarmistes", indique-t-on aussi dans l'entourage de la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili. "On a pris toutes les dispositions possibles", selon cette source.