L’accord de l’OPEP a été trouvé hier en Algérie, en marge du 15e Forum international de l’énergie. (©Anadarko)
L’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) a annoncé hier à Alger avoir conclu un accord pour limiter la production globale de pétrole de ses 14 pays membres. Un certain nombre de questions reste toutefois en suspens.
Un accord « surprise »
Lors de la 170e réunion (extraordinaire) de la Conférence de l’OPEP à Alger, le Gabon siégeait à nouveau au sein du cartel (le pays a réintégré l’organisation en juillet dernier après l’avoir quittée en 1995). C’est toutefois une information plus capitale que l’on retiendra de cette réunion : les 14 pays membres de l’OPEP se sont finalement accordés sur une limitation de leur production de pétrole brut à un niveau compris « entre 32,5 et 33 millions de barils par jour » (Mb/j), contre 33,24 Mb/j en août 2016(1).
De nombreux observateurs qualifient cet accord de « surprise », principalement car les positions de l’Arabie Saoudite et l’Iran ont longtemps semblé inconciliables(2). Le désaccord de ces deux géants (1er et 3e producteur de l’OPEP) avait fait échouer la précédente tentative d’accord à Doha en avril 2016 et était encore manifeste la veille même de l’accord d’Alger.
A eux trois, l'Arabie saoudite, l'Irak et l'Iran comptent pour plus de la moitié de la production de pétrole brut de l'OPEP. (©Connaissance des Énergies)
Quelles sont les raisons de cet accord ?
L’OPEP a annoncé avoir conclu cet accord pour stabiliser le marché pétrolier, le président du cartel rappelant à Alger que le réajustement entre offre et demande « prenait davantage de temps qu’attendu ». L’OPEP a également rappelé que la chute des cours(3) avait entraîné une forte baisse des investissements dans le secteur pétrolier qui va entraîner de fait une baisse de la production pétrolière à moyen terme alors que la demande reste « robuste » au niveau mondial selon l’organisation(4).
Si une remontée des cours était depuis longtemps vitale à plusieurs pays membres de l’OPEP, l’Arabie saoudite a maintenu une guerre des prix pendant près de deux ans, principalement pour ne pas perdre de parts de marché face aux États-Unis dont la production de pétrole de schiste avait fait du pays le premier producteur mondial.
Cette stratégie de Riyad s'est heurtée à la résilience de l’industrie pétrolière américaine et a eu dans le même temps un impact majeur sur les finances des différents pays membres de l’OPEP. Selon l’EIA américaine, ces derniers auraient vu leurs revenus liés aux exportations de pétrole chuter de 46% en 2015. L’Arabie saoudite, premier exportateur mondial, a elle-même subi une sévère chute de ses revenus qui sont passés de 247 milliards de dollars en 2014 à 130 milliards de dollars en 2015. Le déficit budgétaire du pays aurait atteint 98 milliards de dollars en 2015.
Et maintenant ?
Si le ministre algérien de l’énergie Noureddine Boutarfa a fait état hier d’une décision « unanime et sans réserve », des doutes subsistent sur la pérennité de l’accord alors que s’amorce la phase la plus ardue, à savoir la répartition de « l’effort » par pays membre. L’OPEP se réunit à nouveau le 30 novembre prochain à Vienne pour préciser les plafonds de production par pays.
Un comité composé de représentants des pays membres a pour mission de préparer cette réunion et de mettre en place un cadre pour de futures négociations avec des pays non-membres de l’OPEP. La Russie, 2e exportateur mondial de pétrole, a toutefois annoncé aujourd’hui qu’elle n’envisageait pas de baisse de sa production malgré l'accord de l'OPEP.
Quel impact possible ?
L’accord conclu par l’OPEP a fait remonter hier les cours du pétrole brut de presque 6% pour le Brent (à un niveau de 48,69 $/baril) et de 5,3% pour le WTI aux États-Unis (47,05 $/baril). Cette hausse s’est poursuivie aujourd’hui malgré l’annonce de la Russie.
L'accord conclu à Alger ne modifie toutefois pas fondamentalement l’état du marché, marqué par une offre excédentaire. Pour rappel, l’OPEP n'a compté que pour environ 41,4% de la production mondiale en 2015(5) et les analystes peinent à se prononcer aujourd'hui sur l'impact futur de l'accord, compte tenu des tensions qui pourraient resurgir entre les différents pays membres et les incertitudes quant au respect du plafond de production annoncé.