Le Land allemand de Basse-Saxe a soutenu l'achat de trains à hydrogène sur son territoire, avec un investissement de plus de 81 millions d’euros. (©René Frampe)
Dans le nord-ouest de l’Allemagne, deux « trains à hydrogène » conçus par le groupe français Alstom ont commencé à transporter des voyageurs le 17 septembre. Présentation.
« Coradia iLint », une propulsion électrique à partir d’hydrogène
Baptisés « Coradia iLint », les premiers trains propulsés à partir d’hydrogène circulent désormais sur une ligne de 100 kilomètres entre les villes de Cuxhaven et Buxtehude, en Basse-Saxe. Des piles à combustible disposées sur le toit de ces trains génèrent de l’électricité (ainsi que de la vapeur d’eau) à partir d’hydrogène, combiné à l’oxygène présent dans l’air ambiant.
Lesdites piles à combustible alimentent un moteur électrique, les surplus d’électricité (lorsque celle-ci n’est pas nécessaire à la traction du train) étant stockés au sein de batteries lithium-ion situées sous le train(1). La recharge en hydrogène des piles à combustible sera effectuée par une station mobile de distribution « depuis un conteneur en acier d'environ 12 mètres de haut, près des voies en gare de Bremervörde ». L'autonomie annoncée des trains « Coradia iLint » devrait atteindre 1 000 km après recharge, « ce qui leur permettra de circuler sur le réseau durant toute une journée » selon Alstom.
Bien moins bruyants que les modèles propulsés au diesel auxquels ils se substituent, les trains à hydrogène d'Alstom pourront accueillir 300 passagers à leur bord (avec 150 places assises) et circuleront à une vitesse maximale de 140 km/h.
Construits dans l’usine allemande d’Alstom à Salzgitter(2), les premiers trains « Coradia iLint » sont des prototypes qui feront l'objet d'un attention particulière, 14 rames supplémentaires devant être livrées en 2021 en Basse-Saxe. Alstom a par ailleurs signé des lettres d’intention avec quatre autres Länder allemands et le groupe fait état de l’intérêt d’autres pays dont le Royaume-Uni, le Canada (la France a annoncé vouloir homologuer un train à hydrogène d’ici à 2022).
Selon Alstom, un système de gestion « intelligente » permet d’optimiser les échanges d’énergie entre les différents équipements de ses trains à hydrogène (pile à combustible, batteries lithium-ion, moteur de traction, convertisseur auxiliaire, etc.). (©René Frampe)
Une propulsion vraiment décarbonée ?
Pour Alstom, ce train à hydrogène « annonce une nouvelle ère dans le transport ferroviaire à zéro émission » selon les termes du PDG du groupe Henri Poupart-Lafarge. Il est toutefois nécessaire de prêter attention au mode de production de l’hydrogène injecté dans les piles à combustible. À l’heure actuelle, l’immense majorité de l’hydrogène produit dans le monde est générée à partir de combustibles fossiles (en particulier par vaporeformage de méthane), opération entraînant des émissions de gaz à effet de serre (hydrogène qualifié de « gris » par certains observateurs).
Près de 96% de la production mondiale d’hydrogène est encore issue d’énergies fossiles. (©Connaissance des Énergies, d’après Institution of Mechanical Engineers)
Selon Alstom, le recours à de l'hydrogène « gris », permettrait d’ores et déjà de « réduire de 45% les émissions de CO2 par rapport à un train diesel », l'objectif étant in fine de produire de l'hydrogène par électrolyse de l’eau, opération n’émettant pas de gaz à effet de serre (sous réserve que la production électrique soit elle-même décarbonée, Alstom mentionnant le recours à des éoliennes) mais bien plus coûteuse que le vaporeformage de combustibles fossiles.
Alstom apporte pour l'heure peu de précisions sur le prix de son train à l'hydrogène : il est « un peu plus cher à l'achat qu'un train diesel, mais l'exploitation est moins coûteuse » selon Stefan Schrank, chef de projet chez Alstom interrogé par l’AFP, l'opération étant jugée « financièrement rentable au bout d'environ dix ans ».
Rappelons que le train à hydrogène d'Alstom a vocation à être déployé, en substitution des trains diesel, sur les parties non électrifiées du réseau ferroviaire (ce qui correspond à 40% du réseau allemand et près de la moitié du réseau français).
En 2021, 14 trains à hydrogène supplémentaires devraient se substituer à des rames diesel en circulation en Basse-Saxe. (©René Frampe)