Consommation de charbon : un nouveau pic mondial en 2023, et après ?

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Consommation mondiale de charbon

Le charbon est toujours la deuxième énergie la plus consommée dans le monde, derrière le pétrole. (©Peabody)

La consommation mondiale de charbon a augmenté de plus de 60% depuis 2000. Elle pourrait baisser dans les prochaines années après avoir atteint un nouveau pic en 2023, selon les dernières prévisions de l'Agence internationale de l'énergie (AIE).

Dans le monde

L'évolution de la consommation de charbon dans le monde montre une tendance générale à la hausse depuis des décennies.

Dans les années 1970, la consommation a connu une croissance modérée, atteignant environ 17 696 TWh en 1974. Les années 1980 ont marqué une période de forte croissance, culminant à 23 996 TWh en 1985. Cette tendance s'est poursuivie dans les décennies suivantes, avec une augmentation notable au début des années 2000. En 2004, la consommation a franchi la barre des 30 000 TWh, atteignant 33 689 TWh. Les années suivantes ont vu une augmentation continue, avec des pics notables en 2007 (40 233 TWh) et en 2011 (43 940 TWh).

La consommation a légèrement diminué entre 2014 et 2016. Cependant, une reprise a été observée à partir de 2021. En 2022, la consommation mondiale de charbon avait augmenté de 4% par rapport à 2021 (année durant laquelle cette demande avait déjà explosé de 6% dans le contexte de forte reprise économique après les confinements liés au Covid-19). Elle a atteint 45 564 TWh en 2023, soit une progression de 2,6% ; autour de 8 540 millions de tonnes (Mt).

Évolution de la consommation de charbon dans le monde
AnnéeConsommation de charbon (TWh)
196516 177,69
196616 359,43
196716 095,52
196816 333,14
196916 847,00
197017 087,00
197116 986,39
197217 168,23
197317 683,57
197417 696,43
197518 045,44
197618 699,79
197719 267,41
197819 467,49
197920 370,58
198020 877,78
198121 158,00
198221 395,43
198322 050,97
198423 008,44
198523 996,74
198624 263,82
198725 228,49
198825 983,08
198926 231,05
199025 916,21
199125 667,41
199225 567,28
199325 689,95
199425 791,27
199525 975,75
199626 592,40
199726 547,28
199826 380,13
199926 492,46
200027 441,49
200127 864,72
200228 967,59
200331 511,33
200433 689,84
200536 190,77
200638 073,16
200740 233,90
200840 786,05
200940 189,99
201041 988,31
201143 940,80
201244 061,00
201344 709,24
201444 893,17
201543 680,50
201642 736,86
201743 193,28
201843 852,79
201943 597,16
202042 296,68
202144 600,08
202244 869,12
202345 564,93

La progression de la consommation mondiale de charbon des dernières années est liée à un ensemble de facteurs. Les fortes tensions sur les approvisionnements gaziers, suite à l'invasion de l'Ukraine par la Russie, et l'envolée des prix du gaz ont eu pour conséquence une compensation par la consommation de charbon.

L'AIE évoque également « les vagues de chaleur et les sécheresses dans certaines régions du monde qui ont fait grimper la demande d'électricité tout en réduisant la production hydroélectrique » (chute de l'offre compensée par le recours à des centrales à charbon). Mais aussi la forte chute de la production nucléaire, notamment en Europe (et en particulier en France).

Par pays

La Chine a compté pour 51,7% de la consommation mondiale de charbon en 2019 selon le BP Statistical Review of World Energy.

Les autres principaux pays consommateurs de charbon sont :

Principaux pays consommateurs de charbon dans le monde

Rapporté à la population, ce classement évolue : la consommation chinoise par habitant de charbon est approximativement 20% moins élevée que celle de l'Australie 40% moins élevée que celle du Kazakhstan (mais 2 fois plus importante que celle de l'Allemagne et 14 fois plus que celle de la France).

La répartition relativement équilibrée des réserves de charbon dans le monde (évaluées à 132 ans de production au rythme actuel) et les prix bas de ce combustible encouragent, malgré son impact environnemental, le recours à cette énergie dans certaines régions du monde, notamment en Asie du Sud-Est.

Disparités de tendances

Les fortes baisses de consommation dans les « économies avancées » en 2023 (une chute record d'environ 20% aux États-Unis et 25% au sein de l'Union européenne) seront plus que compensées par les hausses de la demande provenant des pays asiatiques (+ 5% en Chine, + 8% en Inde, etc.), précise l'Agence.

Évolution de la consommation mondiale de charbon en 2023 et prévisions

Cette baisse de la demande chinoise reste toutefois « soumise à des incertitudes », concède l'AIE. La Chine joue un rôle absolument considérable sur le marché du charbon, comptant pour 54% de la consommation mondiale en 2022 et pour environ la moitié de la production planétaire.

La situation de la Chine aura encore un impact majeur sur les évolutions concernant le charbon : ce pays compte pour plus de la moitié de la consommation mondiale (et la production électrique chinoise capte à elle seule près d'un tiers du charbon consommé dans le monde).

Importance du charbon en Chine

Bien que de grandes disparités entre les pays consommateurs caractérisent son évolution, l’ère du charbon n’est pas révolue. En France, l’histoire du charbon est parfois associée à l’exploitation coûteuse de mines difficiles tandis qu'il est largement produit à ciel ouvert à l’échelle internationale.

Une baisse attendue

Au niveau mondial, les experts de l'AIE estiment que la consommation globale de charbon en 2026 pourrait être inférieure de 2,3% au niveau de 2023, « même en l’absence de nouvelles annonces gouvernementales ou de politiques plus strictes en matière d’énergie propre et de climat », grâce au déploiement très important de capacités renouvelables dans les prochaines années.

"Le monde est proche d'un pic dans son usage de l'énergie fossile, avec en premier le déclin attendu du charbon, mais nous n'y sommes pas encore", résume Keisuke Sadamori, directeur des Marchés et de la sécurité énergétiques à l'AIE.

Aucun mouvement d'investissements en faveur de projets destinés à l'export, ce qui reflète la prudence des investisseurs et des compagnies minières quant aux perspectives du charbon sur les moyen et long termes.

Les usages de charbon

Le charbon est utilisé principalement pour la production d'électricité et la chaleur industrielle. Environ 36 % de l'électricité mondiale provient des centrales électriques au charbon, où le charbon est brûlé pour produire de la vapeur qui entraîne des turbines génératrices d'électricité. Le charbon est de loin la principale filière productrice d'électricité dans le monde.

En plus de la production d'énergie, le charbon est essentiel dans l'industrie sidérurgique, où il est utilisé dans la fabrication de l'acier par le processus de fusion du minerai de fer dans des hauts-fourneaux.

Le charbon est également utilisé dans la production de ciment, où il sert de source de chaleur pour chauffer les fours rotatifs. En outre, le charbon trouve des applications dans les industries chimiques pour produire des produits tels que les colorants, les plastiques et les produits pharmaceutiques.

Enfin, il est utilisé pour le chauffage résidentiel et commercial dans certaines régions du monde.

Mix électrique mondial au 1er semestre 2023

Rappelons qu’il existe différents types de charbon dont le pouvoir calorifique et l’usage varient : le lignite est par exemple principalement utilisé dans les centrales électriques tandis que l’anthracite de meilleure qualité est majoritairement destiné au chauffage domestique.

Émissions de CO2

En 2023, les émissions mondiales de CO2 liées à l'utilisation de combustibles fossiles et à la production de ciment devraient « augmenter de 1,1% en 2023, pour atteindre 36,8 milliards de tonnes (Gt CO2) », soit un nouveau niveau record, a annoncé le Global Carbon Project lors de la COP28. Et 41% de ces émissions mondiales seraient dues au seul charbon.

Dans un contexte mondial de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, le charbon présente l’inconvénient d’être le combustible fossile le plus émetteur de CO2. L’avenir du charbon est donc lié à l’évolution de techniques permettant d’améliorer l’efficacité énergétique des centrales et d’en capter le CO2. Mais les avantages économiques pousseront les pays disposant de réserves importantes à les exploiter pour assurer leur développement (Chine, Inde, Indonésie, etc.).

Les exigences accrues en matière d’émissions de gaz à effet de serre (couplées à la mise en place de bourses ou de taxes carbone) et l’accélération des annonces de désinvestissements assombrissent par ailleurs les perspectives des centrales à charbon. L’émergence de systèmes de capture et le stockage du CO2 n’est certes plus une solution théorique selon l’AIE (plusieurs projets commerciaux existent déjà en Amérique du Nord, en Australie et en Chine) mais leur déploiement à grande échelle nécessiterait des politiques fortes alors que les priorités de nombreux pays semblent porter sur d’autres énergies.

Pékin a amorcé une modernisation de ses centrales au charbon pour les rendre moins polluantes, via des mesures censées économiser une centaine de millions de tonnes de charbon brut et éviter le rejet de millions de tonnes de dioxyde de carbone (CO2) chaque année.

Pour rappel, le respect de l’objectif de la COP21 (réchauffement climatique limité à 2°C d’ici à 2100 par rapport aux températures préindustrielles) implique de limiter les émissions mondiales de gaz à effet de serre à environ 1 000 milliards de tonnes d’équivalent CO2, soit l’équivalent d’environ 20 ans d’émissions mondiales au rythme actuel.

Lors de la COP 26 de Glasgow sur le climat, le charbon a été désigné explicitement comme l'un des principaux responsables du changement climatique. Mais l'Inde et la Chine sont parvenues au dernier moment à atténuer la formulation finale de l'objectif en "réduction" au lieu de "sortie" du charbon.

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