Ancien coprésident de Connaissance des Énergies
Le Carbone est aujourd’hui au centre d’une interrogation existentielle sur l’évolution de notre environnement. Plutôt que répéter « décarbonez, décarbonez », ne faut-il pas « décarboxyder », c’est-à-dire dans un néologisme (que le lecteur voudra bien m’excuser), réduire drastiquement les émissions dans l'atmosphère de CO2 à effet de serre, en renonçant à produire l'essentiel de notre énergie par combustion dans l'oxygène de l'air du carbone fossilisé que nous extrayons de l'écorce terrestre ?
Car le Carbone n’est-il pas bien autre chose que l'atome au centre des deux molécules responsable de l'effet de serre terrestre ? N’est-il pas un des atomes-clés des origines de la Vie, de l’Organique et du Biologique ? C’est pourquoi il m'a paru utile de revisiter le carbone sous ses aspects les plus fondamentaux.
I Qu’est-ce que le carbone ?
Par Carbone on désigne couramment l’atome C le plus abondant (99%), de numéro atomique Z = 6 et de poids atomique 12, constitué d’un noyau de 6 protons (p+) et de 6 neutrons (n), entouré d’un cortège de 6 électrons(e-).
La Physique Quantique fixe aux électrons de chaque atome de se répartir entre les orbites possibles autour de leur noyau en couches successives d’énergies croissantes, Chaque couche est caractérisée par un nombre entier n, pouvant accueillir un maximum de 2n2 électrons. La première couche (n = 1, dite fondamentale) peut ainsi en recevoir soit un, l’hydrogène, soit deux, l’hélium. Au-delà, les électrons des 8 atomes suivants (Li, Be, B, C ,N, O,F, Ne) viennent occuper successivement la couche n = 2, dite de valence.
La Chimie Quantique donne à la configuration électronique extérieure de chaque atome un rôle déterminant dans ses propriétés chimiques, en lui imposant de rechercher des configurations moléculaires la complétant à 8 électrons. C’est la règle de l’octet. C’est ainsi que le Carbone tétravalent va se lier préférentiellement à quatre atomes d’Hydrogène monovalents pour donner du méthane CH4, ou à deux atomes d’oxygène bivalents pour former du CO2, ou, sous forme d’une parmi les millions de molécules de la chimie organique ou biochimique, toute formées en optimisant à 8 les couches extérieures des atomes qui les constituent autour du carbone.
Ces deux lois quantiques structurent la classification périodique des éléments découverte par Mendeleïev en 1869. En rangeant un à un tous les atomes connus (118 en 2016) , par numéros atomiques croissants, dans les lignes d’un tableau respectant les maximas quantiques, on constate une périodicité : les atomes d’une même colonne possèdent le même nombre d’électrons sur leur couche externe . Cette découverte essentielle a permis de structurer, à la verticale de chacun des atomes-clés du haut du tableau, huit familles atomiques « a » (alcalins, alcalino-terreux, halogènes, gaz rares…) et dix familles métalliques « b » dotées de propriétés chimiques semblables.
Au centre de la première ligne du tableau de Mendeleïev, le carbone occupe une position exceptionnelle. Sa tétravalence lui permet de se lier aussi aisément, à sa droite avec les atomes donneurs d’électrons (oxydants) de numéros atomiques plus élevés, l’Oxygène en particulier, qu’à sa gauche, avec les atomes avides d’électrons (réducteurs), l’Hydrogène évidemment. Sa compacité lui donne de plus une forte électronégativité, donc une attractivité élevée sur les électrons des autres atomes. Les atomes de Carbone possèdent aussi la capacité exceptionnelle de se lier entre eux, jusqu’à quatre à quatre, pour former des réseaux monoatomiques de grandes dimensions, à la fois souples et résistants. Ceci explique pourquoi l’atome de carbone sert non seulement de base aux millions de molécules de la chimie organique mais aussi de charpente aux molécules hypercomplexes et gigantesques (ADN) qui constituent les briques de la Vie.
II Origines du carbone
L’atome de carbone est produit dans le cœur des étoiles lorsque, sa réserve initiale d’hydrogène s’amenuisant, ayant déjà été significativement fusionnée en hélium, son cœur alourdi se contracte sous l’effet de la gravitation et s’échauffe jusqu’à plus de 100 millions de degrés. S’amorce alors la fusion « triple alpha » de trois atomes d’hélium 3x (2 protons, 2 neutrons) en un atome stable de carbone (6 protons, 6 neutrons). Fortement exothermique, la température atteint un milliard de degrés.
À partir du carbone, une nouvelle fusion exothermique avec un atome d’hélium produit l’oxygène (8 protons, 8 neutrons). Si la masse de l’étoile est suffisante, les contractions-fusions exothermiques peuvent s’enchaîner et produire successivement tous les atomes de poids atomiques croissants, jusqu’au fer où s’arrête la séquence, car sa fusion à partir du cobalt et du nickel est, la première, à être endothermique.
Parvenue alors en fin de vie, sa dilatation fusionnelle ne pouvant plus équilibrer sa contraction gravitationnelle, l’étoile, devenue supernova, s’effondre sur elle-même en quelques millisecondes en émettant un gigantesque éclair lumineux. Aux températures et pressions extrêmes atteintes dans l’implosion, les atomes plus lourds que le fer sont synthétisés par fusion, jusqu’à l’uranium (Z = 92). L’onde de choc de l’explosion qui suit expulse dans l’univers les éléments de l’ex-étoile, dont son carbone et son oxygène.
D’après les plus récentes observations (télescope James Webb 2022), les premières galaxies seraient apparues entre 250 et 350 millions d’années après le Big Bang originel (- 13,8 milliards d’années). Les étoiles qui les composaient étaient très massives, donc de durée de vie très courte, avant d’exploser en supernova et commencer à peupler l’univers d’atomes plus lourds que l’hydrogène et l’hélium primordiaux, donc d’abord de carbone, d’oxygène et de fer. La nucléosynthèse stellaire en est toujours à ses débuts. Ses réserves initiales en hydrogène (73,9%), hélium (24%) sont à peine entamées, le carbone ne pèse que 0,5%, l’oxygène 1 %, le fer 0,1%, la centaine d’autres éléments plus lourds issues des supernovae 0,5%.
III La Terre, le Carbone et l’apparition de la Vie
Depuis le début de sa formation (- 4,6 Ga), la Terre a connu de multiples événements dont trois essentiels pour la vie future :
- une fusion initiale à des températures d’environ 5 000°C, conséquence de collisions externes incessantes et des fortes radioactivités de ses atome lourds. La sphère terrestre se structure alors par gravité en un noyau liquéfié de fer et de nickel entrainant les éléments les plus lourds, entouré d’un manteau plus léger (silicates) et recouvert initialement d’un océan magmatique de 1 000 km d’épaisseur. Les gaz migrent vers la surface pour constituer l’atmosphère primordial (CO2, H2O, N2). Son noyau métallique en rotation fait de la Terre un aimant géant bipolaire NS, dont le champ magnétique la protège des puissantes éruptions solaires qui vont ensuite se succéder ;
- une collision majeure d’emblée (- 4,55 Ga) avec une autre protoplanète de la taille de Mars. Dans la liquéfaction et le rebond qui suivent, les noyaux métalliques fusionnent et renforcent celui de la Terre, l’onde de choc vaporise une partie du manteau qui est éjectée pour former la Lune, à l’origine des marées. L’axe de rotation de la Terre se retrouve incliné sur le plan du disque accrétal d’où les saisons ;
- une très longue période, au total près d’un milliard d’années, de bombardements incessants par des météorites et des comètes contenant du carbone sous forme de CO2, des minéraux (protéines primitives), de l’azote et beaucoup de vapeur d’eau qui, le refroidissement et la solidification venant, se condense en déluge et forme l’océan primordial (- 4Ga).
Apparait alors la vie anaérobie (- 3,5 Ga), en plein volcanisme, dans ces eaux chaudes encore peu profondes, sous la forme de cyanobactéries monocellulaires microscopiques contenant de la chlorophylle (55 C, 22 H, 3 O, 1 Mg), molécule-clé de la photosynthèse, constituée d’un atome de magnésium au centre d’un squelette de 55 atomes de Carbone, préfigurant la structure de la quasi-totalité des tissus du vivant. Par sa capacité à capturer l’énergie solaire pour dissocier le CO2, libérer l’oxygène et catalyser la formation de molécules organiques métabolisable, la chlorophylle apparait comme un relais vital entre le Soleil et la Terre.
Pour survivre et se reproduire, ces cyanobactéries anaérobies, ensuite diversifiées en algues et phytoplanctons, vont dissocier inlassablement, par photosynthèse, l’eau et le CO2 dissous dans l’océan primordial, produisant des hydrates de carbone (sucres) pour se nourrir, construisant des stromatolithes rocheux (carbonates) pour s’abriter , mais aussi libérant l’oxygène, pour eux toxique mais ressource essentielle de la vie future aérobie. Dans un premier temps, l’oxygène excédentaire va être fixé par le fer massivement présent dans les eaux. C’est la « Grande Oxydation » qui s’achève vers - 2 Ga, puis l’oxygène va envahir progressivement l’atmosphère et remplacer, avec l’azote, la vapeur d’eau et le CO2 initial. En - 500 Ma, sous la seule action de microorganismes dotés de l’outil carboné photosynthétique, l’atmosphère a atteint sa concentration actuelle en oxygène (21%). La vie aérobie va pouvoir exploser jusqu’à l’Homme. Le carbone, avec l’eau, va en constituer le matériau de base, en particulier grâce à sa capacité à former de longues chaines tétravalentes, squelettes nécessaires à la structuration des cellules complexes du vivant.
La molécule d’ADN en est l’exemple le plus abouti. Elle occupe le noyau de toutes les cellules vivantes. Elle en assure le stockage et la réplication génétique. On connait sa structure en double hélice de 2 nanomètres de diamètre (10-9 m), constituées d’une torsade de deux brins parallèles reliées par deux bases codantes de quatre types différents, à raison de 10 marches pour 3,4 nm.
Or l’ADN contenu dans le noyau d’une cellule humaine, une fois déplié, forme un filament d’environ 2 m de long, c'est-à-dire un immense squelette hyperfin. La performance mécanique nécessaire pour le replier sans le briser, le compacter sous forme de 46 chromosomes dans un noyau microscopique, puis lui permettre de rouvrir sa double hélice pour la dupliquer, est extraordinaire. Elle doit être, là aussi, attribuée à l’omniprésence de l’atome de carbone dans les structures moléculaires mises en œuvre dans l’ADN, en particulier, les plus exposés aux ruptures pendant les compactions et les duplications. C’est le cas pour les brins de l’hélice, faits d’un sucre pentacarboné et phosphaté résistant et souple, capable de maintenir la liaison avec les quatre bases (A,C,G,T) codantes qu’ils ont pour mission vitale d’encadrer. Là aussi, le Carbone est au cœur de la Vie.
IV L'effet de serre et le carbone
Par effet de serre, ou forçage radiatif, on désigne le piégeage de l’énergie solaire dans l’atmosphère par une molécule gazeuse, transparente au flux lumineux incident (0,4 - 0,8 µm), mais absorbant l’énergie thermique infrarouge (8 - 12µm) réémise par le sol qu’il réchauffe.
Les molécules CO2 (gaz carbonique) et CH4 (méthane) sont, avec la vapeur d’eau, à la base de l’effet de serre dans l’atmosphère terrestre. Ces deux gaz carbonés n’y sont pourtant présents qu’à de très faibles doses (CO2 : 0,04%, soit 417 ppm, CH4 : 2 ppm), loin derrière ses deux principaux composants, l’azote (N2 : 78%) et l’oxygène (O2 : 21%). Mais la capacité d’interaction de ces deux molécules carbonées avec les photons de l’infrarouge thermique est considérable, grâce aux multiples modes de vibration-rotation de leur structures polyatomiques à ces fréquences. De plus, leurs présences dans l’atmosphère sont longues (1 000 ans pour le CO2) avant qu’ils ne soient dissociés par photosynthèse ou dissous dans les océans.
Pour évaluer l’impact de l’effet de serre carbonique sur la température de notre environnement, il faut d’abord réaliser que notre atmosphère est une pellicule gazeuse ultrafine , collée à notre globe par la gravité d’un noyau métallique qui n’en laisse échapper aucun atome sauf l’hydrogène et l’hélium, transparente au rayonnement visible du soleil (5 500°K), et fortement absorbante de l’infrarouge émis par la Terre (280°K). Pour évaluer l’impact quantitatif de l’effet de serre, il est utile de partir d’un bilan radiatif global des échanges d’énergies entre le Soleil et la Terre à travers l’Atmosphère, tel que celui établi par la NASA, et maintes fois repris depuis. Il détaille l’équilibre entre :
- l’énergie solaire incidente (340 W/m2). Réfléchie par les nuages (23%) puis par les sols (7%), 30% (100 W/m2) retournent donc dans l’espace. En revanche, absorbée par l’atmosphère (22%) puis par le sol ou l’eau (48%), 70% en est transformé en chaleur (240 W/m2) ;
- l’énergie infrarouge thermique rayonnée par la surface terrestre chauffée par le soleil. En l’absence de toute absorption, ce rayonnement (240 W/m2) retournerait dans l’espace. La température moyenne de la Terre devrait être alors (loi de Planck) de - 18°C. Or, mesurée sur une longue période (10 ans), elle est de + 15°C, ce qui correspond à une énergie radiative IR émise par le sol de 400 W /m2. L’effet de serre actuel en rediffuse 85% vers le bas. La barrière de molécules à effet de serre qui enveloppe ainsi le globe est, aux faibles altitudes, essentiellement faite de vapeur d’eau et de nuages non anthropiques (70% de l’absorption), en renouvellement permanent par le cycle de l’eau. Plus haut, perpétuellement brassées par la convection, les deux molécules carbonées CO2 (20%) et CH4 (4%), puissants GES, de longues durées de vie (100 ans et 10 ans), à la fois géologiques et anthropiques, jouent le rôle principal dans le piégeage de l’infrarouge et son rediffusion vers la surface terrestre ;
- le forçage radiatif, dont le déséquilibre positif est actuellement constaté (2,3 à 3,1 W/m2) est dû, pour l’essentiel, à l’injection anthropique massive de CO2 et de méthane dans l’atmosphère, qui a porté le taux atmosphérique de CO2 à plus de 400 ppm, alors qu’il était de l’ordre de 280 avant l’ère industrielle . Il est l’objet de préoccupations aigües du monde politique (COP) et scientifique (GIEC), soucieux d’en maitriser l’impact redouté sur l’environnement. Son rééquilibrage va exiger des mutations technologiques et économiques profondes, qui ne sont encore qu’en gestation.
V Le cycle du carbone
Le « Vivant » a pu apparaitre il y a 3,5 Ma sur Terre puis y survivre jusqu’à aujourd’hui grâce à la photosynthèse, dissociant par le rayonnement solaire, au sein de cellules carbonées, le gaz carbonique et la vapeur d’eau en sucre nourricier et en oxygène respirable. Le « Vivant » a pu ainsi grignoter sans relâche le CO2 et l'H2O de son atmosphère primordial, surchauffé par leurs effets de serre intenses, pour l’amener, tout en s’en nourrissant, aux températures modérées qui ont permis son développement jusqu’à l’Homme. Mais pour y parvenir tout en survivant à de nombreux cataclysmes (météorites, volcanisme, glaciations, séismes..) il a fallu que s’organise, stable sur des millions d’années, la circulation et le stockage du Carbone entre les quatre espaces terrestres disponibles. C’est ce qu’on appelle le cycle du carbone.
En résumé :
1) le carbone terrestre superficiel (10 Gt C) se répartit entre quatre réservoirs :
- la Lithosphère (100.106 Gt C), constituée essentiellement de la croute terrestre (océanique et continentale), donc des plaque tectoniques et de la partie supérieure du manteau. Le carbone y est présent partout sous forme d’immenses réserves de calcaires (CaCO3) et d’hydrocarbures fossiles issus des déchets végétaux de la biosphère (charbon, pétrole, kérogène ). Son magma, né des subductions, contient de grandes quantités de CH4 occlus.
- l’Hydrosphère (40.103 Gt C) rassemble les milieux océaniques superficiels et profonds au-delà de 100m. Le carbone y est présent sous forme dissoute, mais aussi sous la forme calcaire des coquillages qui s’y sédimentent, ou des phytoplanctons qui s’y fossilisent.
- la Biosphère (2 000 Gt C), constituée du mince revêtement végétal terrestre, en particulier de ses forêts, de son sol et de sa population animale, toutes fortement carbonées.
- l’Atmosphère (770 Gt C) contient le carbone qui, sous forme de gaz carbonique et de méthane, bien qu’en très faibles quantités, sont essentiels par leur puissant effet de serre à l’équilibre climatique.
2) Les flux quantifiés annuels entre ces quatre réservoirs font apparaitre le rôle central et critique de l’atmosphère dans la circulation du carbone terrestre. De la lithosphère, Il reçoit en moyenne 0,6 Gt C de CO2 et de CH4 des éruptions volcaniques. Avec l’hydrosphère, il échange annuellement en surface des flux équilibrés d’environ 90 Gt C. De la biosphère, en échange de 110 Gt C de photosynthèse, il reçoit l’équivalent, en respiration, de la végétation (50) et du sol (60).
Si on complète la boucle par les flux de sédimentation entre l’hydrosphère et la lithosphère (0,6), le cycle du carbone naturel présente un bilan en équilibre, sur le long terme, grâce en particulier à la capacité de stockage illimitée de sa lithosphère.
Il est donc essentiel de réaliser qu’en injectant brusquement dans l’atmosphère environ 8 Gt par an de carbone (30 Gt de CO2) par la combustion massive d’hydrocarbures fossiles extraits de la lithosphère, mais aussi par son agriculture et ses déforestations, l’Homme déséquilibre profondément un cycle du carbone multimillénaire naturel qui en réservait l’accès au volcanisme, à des flux moyens plus de dix fois inférieurs, sauf cataclysmes.
Or le carbone dans l’atmosphère, par l’effet de serre, agit directement sur la température, paramètre essentiel de l’équilibre climatique. L’homme doit reprendre de toute urgence la maitrise raisonnée de son cycle, face à des risques allant bien au-delà d’un simple réchauffement et menaçant, dés maintenant, le cycle vital de l’eau.
VI Le carbone et l'émergence de l'homme : le feu
Depuis l’apparition (Silurien ; - 430 Ma) sur les surfaces émergées de la Terre de la végétation carbonée donc combustible dans l’oxygène de l’air, les incendies naturels allumés par les orages, mais aussi par le volcanisme et les météorites, n’ont cessé de déforester et repaysager la biosphère, dans le cadre de variations climatiques souvent sévères.
Pendant l’hominisation (- 7 à - 1 Ma), il est donc difficile de reconstituer l’environnement végétal et animal dans lequel ont vécu, en Afrique de l’Est, les premiers hominidés dont les restes fossilisés nous sont parvenus (Tournai, - 7 Ma ; Lucy, - 3,2 Ma). On sait simplement qu’ils étaient nomades et qu’ils trouvaient dans leur environnement la nourriture et les abris nécessaires pour résister au froid, à la chaleur, au vent et à la pluie et pour se reproduire.
On sait aussi depuis peu (2022) qu’ils taillaient déjà les pierres (silex) pour en faire des outils et des armes. Les seules énergies dont ils disposaient étaient donc celle du Soleil et celle que leur métabolisme tiraient de leur nourriture carbonée.
Le feu des incendies était pour eux une menace liée à la foudre, mystérieuse et effrayante Ils n’en avaient pas encore découvert l’emploi. Ils allaient s’y atteler. Alors, progressivement entre - 1 Ma et - 700 000 ans, de multiples traces de feu vont être détectées dans les gisements archéologiques humains. Mais ces feux « naturels » sont prélevés dans les incendies, puis entretenus et même transportés, mais non allumés.
Le progrès décisif va venir alors, vers - 400 000, de l’invention du « briquet », soit par choc d’un silex sur une pyrite métallique, soit par rotation - frottement de pièces en bois. La maîtrise de l’allumage du feu et de son entretien est acquise. Or, parce qu‘il lui donne la maitrise de la combustion du carbone dans l’oxygène de l’atmosphère, le feu est la plus importante avancée technologique de l’histoire de L’humanité.
Il suffit de considérer les progrès gigantesques qui vont en résulter pour la condition humaine :
- par la cuisson : l’alimentation humaine est bouleversée. Une mastication plus aisée libère de l’espace pour le cerveau qui peut progresser en volume. Il faut moins d’énergie pour digérer. Les aliments peuvent être stérilisés par ébullition. De nouveaux aliments peuvent être consommés une fois cuits. Leur conservation progresse (fumure) ;
- par la lumière et la chaleur : le feu éclaire l’obscurité (la nuit, les cavernes) et protège du froid et des prédateurs. Il ouvre aux migrations vers un Nord plus giboyeux, de l’Afrique vers l’Eurasie ;
- par l’attraction des foyers, le feu favorise la socialisation,, la transmission orale, les veillées, le chant, la danse, l’ornementation des cavernes par le dessein (fusain en carbone), puis l’écriture, la religion, la médecine ;
- par les hautes températures du charbon de bois : l’accès au durcissement du bois (outils et armes),à la poterie et enfin à la métallurgie (- 6 000 ans) du cuivre, du bronze et du fer.
À la fin du Moyen Âge (1492), l’essentiel des avancées permises par l’usage du feu de bois a été mis en œuvre à l’échelle individuelle par l’homme cultivateur attaché à sa Terre. Mais d’immenses espaces de progrès attachés au feu vont encore s’ouvrir quand l’homme va découvrir les énormes réserves de carbone fossile enfoui dans l’écorce terrestre et la transformation potentielle de sa combustion en force mécanique.
VII Le carbone fossile et la Révolution industrielle
Jusqu’à la Renaissance, malgré des centaines de millénaires de progrès dans l’utilisation du carbone-biomasse, l’homme dépend toujours quasi exclusivement de sa force musculaire et de celle de ses animaux domestiques pour cultiver, se déplacer, construire son habitat et produire les objets, outils et armes nécessaires à sa vie courante.
Ce n’est qu’au 18e siècle, en Angleterre d’abord, qu’il va être pris conscience, au contact des mines de charbon locales, de la « force du feu », donc de sa puissance mécanique. On vient d’y découvrir de gigantesques réserves de carbone, fossilisées dans l’écorce terrestre par un processus d’enfouissement géothermique anaérobie, à quelques centaines de mètres de profondeur (carbonifère : - 360/- 300 Ma). Mais son extraction se révèle épuisante et dangereuse sans aide mécanique.
La première machine à vapeur sera ainsi une pompe aspirant l’eau ruisselant dans les premières galeries de mines (Newcomen, 1712). Puis James Watt met au point un moteur à vapeur (1788) doté déjà d’un piston, d’un condenseur et d’une bielle-manivelle, qui fait tourner une roue utilisable pour se mouvoir (locomotive), pour le travail du sol (tracteur-charrue), pour l’industrie (machine-outil), pour la navigation (steamer).
La révolution industrielle initiale qui en résulte est fulgurante. Elle donne à l’Angleterre le leadership mondial, technologique, économique et bientôt géopolitique. Entre 1800 et 1900, la consommation mondiale de carbone fossile est multipliée par 50, de 10 à 500 Mtep, puis par 16 de 1900 à 2000.
La seconde vague de la Révolution industrielle se forme autour du moteur à explosion (1860-70, Diesel) consommant du pétrole, plus efficace et plus compact que la machine à vapeur. Autour de 1900, il est au cœur de la création de l’industrie automobile, mais aussi, couplé à l’hélice, de l’aéronautique et de la propulsion navale qui vont jouer un rôle majeur dans les deux guerres mondiales.
Enfin le gaz naturel, méthane extrait en même temps que le pétrole mais resté longtemps inexploité (torchère), a fait l’objet à partir de 1950 d’une exploitation industrielle et domestique généralisée à l’échelle mondiale (chauffage, cuisson , production d’électricité, chimie…).
Globalement la consommation de carbone fossile est ainsi passée, de 1900 ou elle était déjà parvenue au niveau de la consommation de carbone biomasse (510 vs 580 Mtep) à presque 8 000 Mtep en 2000 (contre 1 100 Mtep de carbone biomasse).
Particulièrement significative est l’évolution du ratio de carbone fossile consommé par habitant au niveau mondial : de 0,31 tep en 1900, il atteint 0,52 tep en 1950, 1,25 tep en 2000, 1,56 tep en 2022, soit 5 fois plus en 120 ans !
Notons enfin qu’ en 2023, le carbone fossile (pétrole + charbon + gaz) aura fourni 82% de l’énergie primaire mondiale, loin devant l’hydroélectricité, le nucléaire et les ENR.
Le carbone fossile a donc été l’acteur-clé de la Révolution industrielle mondiale de la fin du deuxième millénaire. Il reste l'acteur majeur de l'énergétique humaine au début du troisième.
VIII Le carbone fossile et la prise de conscience climatique
Pendant tout le 19e siècle, la Révolution industrielle, urbanisant et industrialisant intensément des populations européennes restées jusque là essentiellement paysannes, se fait au prix de souffrances considérables.
L’extraction du charbon profond reste, jour après jour, très meurtrière pour les mineurs, aggravée par des catastrophes de grande ampleur (Courrieres, 1 100 morts). Au-delà, l’emploi généralisé de la combustion du charbon dans l’industrie et la concentration des populations ouvrières autour des usines, dans des banlieues insalubres, surpeuplées et à l’air carbo-pollué, portent des atteintes sévères à leur santé.
En France, à la montée des pathologies sociales dans les classes laborieuses (tuberculose, rachitisme, alcoolisme), la Science n’opposera que tardivement les progrès considérables de l’hygiène et de la vaccination (Institut Pasteur, 1888), mais n’identifiera pas de risque, autre que localisé, à l’extension de la combustion du charbon au chauffage et à la cuisson.
Il faudra attendre 1912 pour qu’une revue scientifique néo-zélandaise évoque qu’un effet de serre global du CO2 sur la température de l’atmosphère « may be considerable in a few centuries ». Les deux guerres Mondiales vont ensuite, pendant un demi-siècle, occulter la préoccupation d‘un réchauffement liée à un excès de CO2. Presque partout, la priorité est donnée à l’industrie de guerre. La pénurie d’énergie expose combattants et populations au froid et à la malnutrition.
Le charbon va fournir l’énergie essentielle au gain de la première guerre mondiale, pour la production massive d’armements mais aussi pour le transport des troupes et des matières premières.
Le pétrole, lui, sera l’énergie décisive de la deuxième guerre mondiale, tant en Europe où le Reich devra rationner jusqu’à la défaite ses panzers et sa Luftwaffe face aux Alliés bien alimentés que dans le Pacifique où, sur d’énormes distances, le Japon, hors coup de grâce nucléaire, ne pouvait rivaliser longtemps avec les États-Unis disposant des réserves du Texas.
La Guerre froide ensuite le restera du fait de la dissuasion thermonucléaire jusqu’à la chute de l’URSS (1991), mais ne fera qu’accentuer le poids du pétrole dans une démographie et une économie mondiale en forte croissance, devenue dépendante politiquement des gisements inépuisables du Moyen-Orient.
En ce demi-siècle, la consommation mondiale d’énergie aura plus que quadruplé (1950-2000, de 2 158 à 9 242 Mtep) dont celle du pétrole sextuplé, pour une population qui aura plus que doublé. On peut donc s’interroger sur les ressorts profonds des mouvements écologistes naissants (Greenpeace, 1971), se bornant à combattre le nucléaire occidental, en particulier civil, sans s’inquiéter de la menace globale du CO2 sur l’environnement.
Pendant ce temps, heureusement, l’effort scientifique de fond pour modéliser le brassage convectif du CO2 dans l'atmosphère et comprendre son réchauffement par effet de serre carbonique même saturé, va déboucher sur des avancées déterminantes :
- 1979 : Jule Charvey (MIT), avec 9 autres scientifiques américains, à la demande de la Maison blanche (Jimmy Carter), publie un rapport qui n’a pas pris une ride. Il montre que l’inertie de l’effet de serre fait que, lorsqu’on en détecte les premiers effets, ce ne sont que les prémices d’effets à venir, beaucoup plus intenses et déjà inévitables. Il ne suscite aucune réaction des politiques américains ;
- 1984-87 ; Claude Lorius et Jean Jouzel, à partir de carottages de glaces antarctiques couvrant des centaines de milliers d’années, confirment la relation CO2/ température, en particulier depuis la révolution industrielle ;
- 1988 : création du GIEC (Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat) par l’ONU, qui publie régulièrement des rapports faisant progressivement autorité ;
- 1997 : Protocole de Kyoto : sur une initiative d’Al Gore, 184 pays signent une résolution pour lutter contre les émissions de GES. Non ratifié par les États-Unis car non engageant pour la Chine et l’Inde ;
- 2007 : Prix Nobel de la Paix pour Al Gore et le GIEC, dont Jean Jouzel est Vice-président ;
- 2015 : COP 21 et accord de Paris : engagement des signataires de réduire leurs émissions de GES pour stabiliser le réchauffement climatique dû aux activités humaines « nettement en dessous » de 2°C d’ici à 2100 (par rapport à la température de l’ère préindustrielle) en renforçant les efforts pour atteindre la cible de 1,5°C.
En 2023, stimulé par la recrudescence d’événements climatiques extrêmes, un fort consensus en faveur d’une décarbonation mondiale en 2050 est perceptible et acté dans les accords les plus récents. La prise de conscience climatique est aujourd’hui une étape qui semble acquise.
Mais trois constats obligent à la réserve :
- l’énergie primaire consommée en 2022 est restée à plus de 80% du carbone fossile ;
- la pression démographique mondiale reste forte, avec un accroissement restant proche de 80 millions par an ;
- les deux pays les plus peuplés du monde (Chine et Inde), mais aussi l’Indonésie, dépendent étroitement du charbon pour leur développement et n’ont pas d’autres solutions à court terme.
Comment alors atteindre techniquement et économiquement la décarboxydation en 2050 ?
IX La succession du carbone fossile d'ici 2050 ?
Au terme de ce propos il se dégage donc clairement que, le plus vite possible et pour des siècles, l’humanité va devoir s’abstenir d’utiliser comme source d’énergie primaire le carbone fossilisé dans l’écorce terrestre.
La raison profonde de cette interdiction est que ce carbone a été soustrait de l’atmosphère par le vivant, pendant des dizaines de millions d’années, pour réguler la température terrestre, en modulant par photosynthèse l’effet de serre du CO2 de façon à l’adapter aux fluctuations externes majeures du climat, en particulier du rayonnement solaire et des oscillations de l’orbite terrestre.
Jusqu’ici, à l’échelle géologique, seul le volcanisme réinjectait épisodiquement dans l’atmosphère de grandes quantités de gaz à effet de serre qui le réchauffait et que la photosynthèse s’employait à contenir dans des limites favorables. En seulement deux siècles de Révolution industrielle, réinjectant des quantités « géologiques » de CO2 dans l’atmosphère, l’humanité s’est immiscée brutalement dans une régulation fragile, qu’elle n’avait pas comprise, puis qu’elle n’a pas voulu comprendre, puis dont elle a enfin pris conscience lorsque il a commencé à se retourner contre elle.
Aujourd’hui, pour un objectif fixé de fin du recours au carbone fossile en 2050, de multiples voies s’ouvrent pour rallier l’économie mondiale à un comportement cohérent avec son environnement. L’inertie considérable de l’énergétique fait que paradoxalement l’urgence de ces actions réside dans la lenteur de leurs effets.
Sobriété et efficacité dans la consommation de l’énergie disponible sont donc à rechercher en priorité car seules à effets immédiats et d’ampleur potentielle considérable (- 20 à - 30%). Les efforts de pédagogie, d’investissements et de mesure qui doivent les accompagner auprès de tous les acteurs économiques ne doivent cependant pas être minimisés.
En 2020, les pays les plus émetteurs de CO2, dans des logiques de développement consommatrice de charbon, n’ont majoritairement pas encore pris conscience de la fragilité de l’atmosphère et plus généralement des limites de leur environnement et de ses ressources utilisables, en particulier l’eau.
Le redéveloppement de la biomasse (gaz vert) est aussi une solution de substitution au gaz fossile, immédiatement cultivable sur les surfaces agricoles disponible et injectable dans les réseaux de traitement et de distribution pré- existant (gazoducs, liquéfacteurs,….).
La récupération du CO2 atmosphérique, sa captation systématique dès l’émission dans l’industrie et les transports puis son recyclage par l’hydrogène en hydrocarbure constituent aussi des sources d’économies substantielles.
Au-delà de ces solutions de première urgence, le tout électrique décarboné apparait comme une solution pour 2050 réalisable dans les pays développés en combinant :
- l’hydroélectricité, idéale car renouvelable, permanente, puissante et disponible en permanence, mais son extension nécessiterait de nouveaux sites (et de l’eau) en raréfaction ;
- l’éolien et le solaire, inépuisables, mais intermittents à faible rendement foncier, sauf implantations venteuses (mer) ou désertiques. Adaptés à une transition énergétique rapide ;
- l’uranium et la fission : les centrales actuelles de 3e génération très puissantes (GW), continues et pilotables exploitent des technologies maitrisées (1970). Elles seront nécessaires à un tout-électrique 2050. Puis la 4e génération en préparation (neutrons rapides, très hautes températures, surgénération, modularité industrialisable) pourrait permettre la production directe d’hydrogène et d’électricité d’ici 2100. Or l’hydrogène parait la seule source d’énergie capable de remplacer le carbone fossile. Sa ressource, l’eau, est illimitée et non polluante. Il est utilisable en substitut direct du gaz naturel. Il est directement transformable en électricité dans une pile à combustible. Mais comment le produire sans gaspiller par électrolyse une électricité directement utilisable ? La seule solution est de dissocier directement l’eau à très haute température. C’est le défi majeur à relever par le nucléaire d’ici 2050 ;
- dans cette perspective urgente, la fusion nucléaire contrôlée (deutérium-tritium en hélium), dans des plasmas à 150 millions de °K, apparait comme la solution à plus long terme (2100), mais à potentiel définitif et global. Son rendement est supérieur d’un ordre de grandeur à la fission. Son combustible est inépuisable et sans danger (33 g/m3 de deutérium dans l’eau de mer). Le risque d’accident par emballement est nul. Il n’y a pas de déchets. En 2023, deux filières sont en phase exploratoire depuis plusieurs décennies : le confinement magnétique lent par tokamak ou stellarator et le confinement inertiel ultra-rapide par impulsions laser. Des fusions amplificatrices sont obtenues localement sur les plasmas. Les premiers rendements globaux positifs pourraient être atteints par les grands instruments en construction (ITER, Laser Mégajoule…). L’ampleur des problèmes physiques et technologiques à résoudre fait de la fusion nucléaire une solution industrielle encore lointaine Elle doit cependant s’inscrire dès maintenant dans l’effort technologique global vers l’énergie « Hydrogène-Électricité » de 2050.
Conclusion
En ayant émis plus de 2 500 milliards de tonne de CO2 fossile dans l’air depuis le début de la Révolution industrielle, l’humanité a porté sa teneur atmosphérique, en un temps ultra-court, de 280 ppm (1850) à 410 ppm (2020).Elle est ainsi entrée en concurrence frontale avec la photosynthèse, régulateur multimillénaire de la température terrestre par dissociation du CO2 et enfouissement du carbone. Au Pliocène, il y a environ un millions d’années, pour le même taux de CO2 de 400 ppm, les températures étaient supérieures de 3 à 4°C à celles d'aujourd’hui, les pôles étaient verts, le niveau des océans plus haut de 15 mètres.
Ayant enfin pris conscience du danger, l’humanité quasi-unanime a affiché sa résolution de décarboxyder son énergie en la sevrant du charbon, du pétrole et du gaz. Elle aurait pu (et dû) le faire des décennies plus tôt, tant les observations scientifiques corrélaient clairement taux de CO2 et températures. Mais elle en avait été jusque là détournée par le climato-scepticisme prêché par des parascientifiques influents, mais aussi par la diversion anti-nucléaire, tous discrètement soutenus par la toute-puissance financière de « l'Oil and Gas ». Il a fallu que s'intensifie la fréquence et l'ampleur des phénomènes climatiques extrêmes (canicules, inondations, sécheresses) pour que les opinions publiques se convainquent de la réalité de la menace. Aujourd’hui, « Décarboxyder » d'ici 2050 est devenu un objectif planétaire.
Or la situation de départ est catastrophique. En 2022, 82% de l’énergie primaire consommée a été encore d’origine fossile, ainsi que 61% de l’électricité. Le charbon a produit 35,4% de cette électricité. En résumé, l’activité humaine est, encore aujourd’hui, massivement émettrice de CO2.
Déoxycarboner complètement l’économie mondiale d’ici 2050 apparait ainsi comme une tâche de déconstruction gigantesque, extrêmement coûteuse économiquement et technologiquement. Il va falloir abandonner de nombreuses merveilles techniques, en particulier la motorisation thermique, et démanteler d’énormes infrastructures (raffineries, ports, cimenteries…).
Simultanément, l'édification d’une énergétique nouvelle « Électricité-Hydrogène » d’ici 2050 suppose des investissements colossaux, porteurs encore aujourd’hui de nombreux risques et incertitudes. C’est le cas en particulier de la production industrielle massive d’hydrogène par dissociation thermoélectrique de l’eau à très haute température.
Face à l’énormité de la tâche, le Carbone va être engagé sur de multiples fronts, en particulier :
- en tant que matériau léger, résistant et facile à allier grâce à sa tétravalence, il va jouer un rôle central dans l’émergence de la nouvelle mécanique adaptée à la mobilité électrique (avions, drones, automobiles, navires) ;
- allié au silicium dans des alliages ultrarésistants (carbures) à la température et au rayonnement, il pourrait être le matériau-clé des réacteur nucléaires de nouvelle génération produisant l’hydrogène par dissociation thermique ;
- à l’échelle quantique, son noyau C12 étant dépourvu de spin, les nanotubes de carbone pourraient constituer les Qubits des futurs simulateurs et ordinateurs quantiques, vecteurs de la rupture énergétique nécessaire pour fournir à l'IA des vitesses de calcul adaptées.
Enfin, il ne faut pas écarter que, face à une violence imprévue et hétérogène de la transition climatique, le contrôle proactif de la température terrestre par capture/dosage du CO2 ne devienne une priorité géostratégique majeure, du ressort d’une Gouvernance mondiale.
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