Source : Sven Lachmann-Pixabay.
L’adaptation au changement climatique désigne « la démarche d’ajustement au climat actuel ou attendu, qu’il s’agisse de la variabilité climatique mais aussi des évènements climatiques extrêmes », selon les termes du Ministère de la Transition écologique(1).
Définition
L'adaptation au changement climatique est définie au fil des rapports du GIEC : dans le glossaire du 6e rapport d'évaluation, elle est qualifiée comme le « processus d’ajustement au climat actuel ou futur et à ses impacts, afin d’en modérer les dommages ou d’en exploiter les bénéfices potentiels ».
Les actions dites « d'adaptation » visent ainsi à limiter les impacts du changement climatique et les dommages associés sur les populations, sur la nature ou encore sur les activités socio-économiques.
Cette démarche occupe une place croissante dans les discussions lors des Conférences Climat (COP) et est complémentaire des actions d’atténuation (ou « mitigation » en anglais) qui visent à réduire les émissions de gaz à effet de serre afin de limiter l'impact du du changement climatique.
En d'autres termes, « l’action climatique se subdivise en deux grandes branches : l’atténuation qui agit sur les causes du réchauffement ; l’adaptation qui vise à renforcer la résilience face à ses impacts », résume Christian de Perthuis dans son ouvrage « Climat - 30 mots pour comprendre et agir ».
Exemples concrets
Les politiques publiques d’adaptation ont « pour objectifs d’anticiper les impacts à attendre du changement climatique, de limiter leurs dégâts éventuels en intervenant sur les facteurs qui contrôlent leur ampleur (par exemple, l’urbanisation des zones à risques) et de profiter des opportunités potentielles », selon le Ministère de la Transition écologique.
Sans surprise, « à mesure que les effets du changement climatique s’accélèrent, notamment les conditions météorologiques plus extrêmes et l’élévation du niveau des mers, il devient de plus en plus urgent pour les pays et les communautés de s’adapter », souligne le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD)(2).
L'ONU rappelle que des mesures simples d'adaptation peuvent être développées au quotidien. « Par exemple, on peut planter ou préserver des arbres autour de chez soi afin de maintenir une température plus fraîche à l’intérieur. Le débroussaillage peut réduire les risques d’incendie. Si l’on est propriétaire d’une entreprise, il faut commencer à réfléchir aux risques climatiques éventuels, comme les fortes chaleurs qui certains jours empêchent les ouvriers d’effectuer des tâches à l’extérieur, et à s’organiser en conséquence »(3).
« Dépenser maintenant permet de sauver des vies et de réduire les coûts plus tard »
« Il est bien plus judicieux de miser sur l’adaptation que d’attendre, puis d’essayer de compenser par la suite, comme de nombreux pays en ont fait l’expérience au cours de la pandémie de COVID-19. Le fait de protéger les personnes dès maintenant permet de sauver plus de vies et de réduire les risques à l’avenir. C’est également logique sur le plan financier, car plus nous attendrons, plus les coûts augmenteront », met en garde l'ONU.
« À l’échelle mondiale, un investissement de 1 800 milliards de dollars en faveur de systèmes d’alerte précoce, d’infrastructures à l’épreuve des changements climatiques, de l’amélioration de l’agriculture, de la protection globale des mangroves le long des côtes et du maintien des ressources hydriques pourrait générer 7 100 milliards de dollars du fait d’un cumul de coûts évités et de divers bienfaits aux niveaux social et environnemental », selon les estimations de l'ONU qui publie chaque année un rapport dédiée à l'adaptation au changement climatique (le dernier est accessible ci-après).
Deux autres exemples de l'intérêt des politiques d'adaptation : « l’accès universel à des systèmes d’alerte précoce peut produire des bénéfices jusqu’à 10 fois supérieurs au coût initial. Par ailleurs, si davantage d’exploitations agricoles installaient des systèmes d’irrigation fonctionnant à l’énergie solaire, cultivaient de nouvelles variétés végétales, avaient accès à des systèmes d’alerte météorologique et adoptaient d’autres mesures d’adaptation, le monde serait à l’abri d’une baisse des rendements agricoles mondiaux pouvant atteindre 30 % d’ici à 2050. »
Défis
Financement
Les principaux obstacles à la mise en œuvre de mesures d’adaptation sont la disponibilité du financement et l’accès à celui-ci, et le manque d'informations et les contraintes institutionnelles et de gouvernance, selon le PNUD. Il est en particulier estimé « que les besoins financiers des pays en développement en matière d’adaptation sont 10 à 18 fois supérieurs aux flux actuels de financement public ».
Complémentarité ou concurrence avec les politiques d'atténuation
« Si on ne misait que sur l’adaptation pour lutter contre le réchauffement, le monde aurait toutes les chances de s’engager sur les scénarios climatiques les plus émissifs », met en garde Christian de Perthuis dans son livre « Climat - 30 mots pour comprendre et agir ».
Le fondateur de la Chaire Economie du Climat (Paris Dauphine) souligne que « les économistes du climat font parfois preuve d’une certaine méfiance à l’égard des stratégies d’adaptation. Leur crainte est que l’adaptation mobilise trop de ressources, au détriment des réductions d’émissions ou de l’investissement dans les puits de carbone ».
« Cette crainte renvoie à la question plus générale de la complémentarité ou de la concurrence entre adaptation et atténuation. Il y a des cas où apparaissent des concurrences. Un exemple bien connu est la lutte contre les îlots de chaleur par l’utilisation de climatiseurs qui consomment beaucoup d’énergie et rejettent des gaz à effet de serre très puissants. On peut limiter ces cas. Pour les îlots de chaleur, on peut par exemple améliorer l’isolation thermique des bâtiments et végétaliser les espaces urbains, actions qui contribuent à la fois à l’adaptation et à l’atténuation. »
Adaptation des infrastructures énergétiques au changement climatique
Dans un rapport publié en mars 2024, la Cour des comptes a demandé des investissements supplémentaires pour adapter les 18 centrales nucléaires, les barrages et le réseau de distribution d'électricité français au réchauffement climatique.
Le changement climatique « est largement intégré dans les référentiels et normes de sûreté, mais l'adaptation fait peser des exigences nouvelles pour les exploitants », y souligne la Cour. Son rapport recommande notamment d'envisager « si nécessaire » un accroissement « des capacités d'entreposage des centrales », comme cela a déjà été envisagé à Civaux sur la Vienne après la canicule de l'été 2022 afin de stocker les effluents lorsque l'étiage des cours d'eau (leur plus bas niveau) est trop faible pour que ceux-ci soient rejetés sans dommage pour l'environnement.
En bord de mer, les futurs réacteurs EPR2 prévus à Penly en Seine-Maritime seront installés à « 11 mètres au-dessus du niveau de la mer » (ce qui n'est pas le cas de ceux prévus à Gravelines dans le Nord, note la Cour).
Vulnérabilité accrue des pays du Sud
Les arguments en faveur de l’adaptation sont clairs mais certaines des populations les plus vulnérables aux changements climatiques sont les moins à même de s’adapter, car elles sont démunies et/ou se trouvent dans des pays en développement qui ont déjà du mal à trouver des ressources suffisantes pour des services de base comme les soins de santé et l’éducation.
Selon les estimations, les coûts de l’adaptation dans les pays en développement pourraient atteindre 300 milliards de dollars par an d’ici à 2030. Et à l’heure actuelle, seuls 21% du financement de la lutte contre les changements climatiques assuré par les pays riches pour aider les pays en développement sont consacrés à l’adaptation et à la résilience, soit environ 16,8 milliards de dollars par an(4).
Un Plan national d'adaptation en France
« Il devient crucial que l'action climatique protège efficacement les enfants, les ménages et les entreprises. Malgré des avancées importantes, les efforts d'adaptation restent en décalage par rapport aux vulnérabilités et aux besoins », a rappelé la présidente du Haut Conseil pour le Climat (HCC), la climatologue franco-canadienne Corinne Le Quéré, en juin 2024.
Le rapport du HCC publié à l'été 2024 prône ainsi un « changement d'échelle dans l'adaptation ».
Le gouvernement de Gabriel Attal était alors en train de préparer le troisième Plan national d'adaptation au changement climatique (PNACC-3), fondé sur l'hypothèse d'un réchauffement de 4°C en France d'ici la fin du siècle, mais le processus de mise en consultation a été retardé et la crise politique liée à la dissolution a encore repoussé l'adoption de ce Plan.
En octobre 2024, le nouveau Premier ministre Michel Barnier a souligné que les travaux de planification dans le domaine de l'énergie et du climat allaient « reprendre immédiatement », en s'appuyant sur 3 « outils » : la Stratégie française énergie-climat, le troisième plan national d'adaptation au changement climatique et la nouvelle programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE).