De grandes chouettes comme la chouette effraie et la chouette lapone ont servi de modèles d’étude pour concevoir un revêtement silencieux. (©photo)
Des chercheurs américains ont mis au point un revêtement qui, appliqué sur les pales d’éoliennes, pourrait permettre de réduire sensiblement le bruit que ces dernières émettent lors de leur rotation. Ce revêtement a été mis au point sur la base d’observations des ailes de chouettes. Explications.
Le bruit des pales d’éoliennes réduit de 10 dB
Les battements d’ailes de chouettes sont très silencieux, ce qui permet à ces dernières de chasser en toute discrétion. Partant de ce constat, l’équipe du Professeur Nigel Peake(1) de l’Université de Cambridge (Massachusetts) a cherché à comprendre les caractéristiques de ces ailes et à les reproduire, en collaboration avec les chercheurs de Virginia Tech, Lehigh et Florida Altlantic.
Suite à une étude microscopique des ailes de chouettes, ils ont constaté que celles-ci possédaient un revêtement duveteux, comparable à une canopée de forêt. Les premières plumes, appelées vibrisses, constituent une espèce de « peigne de soie » flexible qui a la faculté de « laminariser » l’écoulement de l’air(2). Les turbulences sonores liées au décollement de l’air le long des ailes sont ainsi minimisées.
Pour reproduire un effet similaire, les chercheurs ont recouvert des pales d’un matériau semblable à celui utilisé dans la constitution des voiles de mariées. Celui-ci a permis en laboratoire de diviser par plus de 2 le son produit mais le matériau a été jugé inadapté pour recouvrir les pales d'une éolienne en conditions normales de fonctionnement.
Un autre matériau prototype en plastique, imprimé en 3D, a donc été conçu. Suite aux essais en soufflerie, il est estimé que le bruit des éoliennes pourrait être réduit de 10 décibels (dB) avec ce nouveau matériau sans modifier l’aérodynamisme de la pale. Les résultats complets de ces travaux de recherche ont été publiés le 22 juin dernier auprès de l’AIAA (Institut américain d’aéronautique et d’astronautique).
Quelles perspectives ?
En réduisant les nuisances sonores liées à l’éolien, le revêtement serait susceptible de diminuer les réactions de type Nimby. Au pied d’une éolienne, le bruit avoisine 55 dB selon France Énergie Éolienne, soit l’équivalent d’un lave-linge peu bruyant.
Les parcs éoliens sont soumis depuis 2010 à la législation des ICPE (Installations Classées pour la Protection de l’Environnement) qui prévoit des seuils limites d’émergence du bruit perturbateur. Concrètement, une distance de 500 m entre les éoliennes et les habitations est imposée et permet de garantir ces conditions (le Sénat avait plaidé pour une distance minimale de 1 000 m en 1re lecture du projet de loi de transition énergétique).
Selon les chercheurs, leur revêtement pourrait également permettre d’augmenter la vitesse de rotation des pales grâce à leur meilleure pénétration dans l’air et donc in fine d’accroître la production d’électricité des éoliennes. Pour rappel, les parcs éoliens ont généré 17 TWh en France en 2014, soit 3,1% de la production électrique nationale.
Le nouveau matériau mis au point doit encore être optimisé et testé sur une éolienne en conditions réelles. Il pourrait dans le futur être appliqué sur des ailes d’avions ou sur les ailettes des ventilateurs d’ordinateurs bien que ces applications entraînent, selon les chercheurs, des contraintes supplémentaires par rapport aux éoliennes.