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Les foyers français installent de plus en plus de panneaux solaires et les injections d’électricité de ces derniers sur le réseau font l'objet de nombreuses questions. Connaissance des Énergies a interrogé le gestionnaire de réseau Enedis à ce sujet.
Combien la France compte-t-elle aujourd'hui de ménages produisant de l'électricité grâce à des panneaux photovoltaïques ?
Enedis fait état de 494 490 producteurs photovoltaïques en auto-consommation raccordés à son réseau à fin mars 2024, soit 79% de plus qu'à fin mars 2023. La puissance cumulée de ces installations s'élève à 2 590 MW, soit l'équivalent de la capacité d'environ deux réacteurs nucléaires(1).
Source : Enedis - Graphique : Selectra
Et les projets en cours sont plus de 5 fois plus importants : « nous dénombrons 92 866 projets photovoltaïques en cours, en auto-consommation ou en injection totale, pour une puissance totale de 13 297 MW », indique un expert d'Enedis (donnée toujours à fin mars 2024).
« C'est effectivement beaucoup et des solutions doivent être développées en parallèle pour flexibiliser le réseau (conversion d’installations hydrauliques en STEP, vehicle to home, etc.) », souligne Maxence Cordiez, membre du comité des Experts de Connaissance des Énergies. Il rappelle que RTE va entre autres doubler ses investissements dans les infrastructures de réseau dans les prochaines années (avec quasiment 4 milliards d'euros d'investissements prévus en 2027, contre un peu plus de 2 milliards en 2023(2)).
Qui effectue concrètement le raccordement des panneaux solaires au réseau ?
La nature des travaux nécessaires au raccordement d'une installation solaire dépend de nombreuses caractéristiques du projet (puissance, longueur de câble, etc.), rappelle Enedis qui assure les travaux de raccordement des unités de production au réseau. Toutefois, chez les particuliers, le raccordement des panneaux photovoltaïques ne nécessite en grande majorité pas de travaux « car le branchement existant pour la consommation est suffisant ».
Pour les particuliers, Enedis indique avoir un délai de raccordement de « 26 jours, soit un délai tout à fait conforme au délai de 1 mois fixé par la loi » (le délai est de 310 jours pour les installations « moyennes », la loi prévoyant un délai d’1 an pour réaliser les travaux, sauf exceptions de situations complexes).
Quel contrat signe un auto-producteur pour injecter sa production photovoltaïque sur le réseau ?
Pour être raccordée au réseau public d’électricité, une installation de production, notamment en autoconsommation, a l’obligation d’être déclarée au gestionnaire de ce réseau, à savoir Enedis pour 95% du territoire métropolitain. Cette déclaration se fait sous la forme du simple dépôt d’une demande de raccordement auprès du gestionnaire de réseau sur la page web dédiée.
Pour les installations de production de petites tailles, c’est-à-dire de moins de 36 kVA, cette déclaration peut donner lieu à :
- une unique convention d’autoconsommation sans injection avec Enedis(CACSI) si toute la production est consommée sur le site ;
- un contrat d’accès et d’exploitation (CAE) signé avec Enedis si une partie de la production doit être injectée sur le réseau public ;
- un contrat unique en Injection (CU-I), signé directement avec l’acheteur d’électricité (qui couvre à la fois l’accès au réseau en injection et l’achat d’énergie injectée sur le réseau).
Pour les installations de plus grandes tailles (> 36 kVA), une convention de raccordement et une convention d’exploitation sont contractualisées entre Enedis et le client producteur ainsi qu’un contrat d’accès au réseau en injection si une partie de la production est injectée sur le réseau public.
Sur les près de 500 000 installations de production actuellement raccordées en autoconsommation (sur le périmètre du réseau public opéré par Enedis), plus de 80% injectent le surplus de leur production sur le réseau. Elles sont en très grande majorité de petites tailles (moins de 36 kVA) et quasi exclusivement des installations photovoltaïques. Elles cumulent 2,8 GW (toutes filières confondues, dont plus de 2,5 GW solaires), soit un peu plus de 6% de la capacité totale de production raccordée au réseau Enedis(3).
Qui achète l'électricité injectée sur le réseau ?
Lorsque tout ou partie de la production n’est pas directement consommée et est donc injectée sur le réseau, un contrat d’achat de l’électricité doit être établi entre le producteur et un acheteur.
Aujourd’hui, «la grande majorité des installations solaires sur toiture sont en Obligation d’Achat, bénéficiant ainsi d’un soutien économique public, fondé sur des tarifs encadrés par la réglementation», précise Enedis. Dans ce cas particulier, l’acheteur concerné est « EDF-Obligation d’Achat ». Le contrat d’achat peut ultérieurement être repris par un autre acheteur ayant la qualité « d’acheteur agréé ».
Une exception est à mentionner, celle des installations de très petites tailles (moins de 3 kWc) qui sont autorisées par la loi à injecter leur électricité sur le réseau sans acheteur. L’électricité est alors cédée à titre gratuit au gestionnaire du réseau.
Selon Enedis, ces injections d'électricité - en forte croissance - ne présentent « pas de contraintes particulières, pour peu que la contractualisation adaptée soit réalisée ».
Un ménage doit-il toujours déclarer la pose de panneaux solaires ?
Toute installation de production d’électricité, y compris les kits de type Plug & Play, doit être déclarée auprès du gestionnaire du réseau public compétent avant sa mise en service (en ligne et gratuitement), quand bien même elle n’injecterait pas d’électricité sur le réseau, conformément à l’article L315-7 du code de l’énergie.
La responsabilité civile et/ou pénale du producteur pourrait être engagée en cas de dommages matériels ou corporels suite au fonctionnement de ces installations non déclarées. Et le le producteur ne sera « pas couvert par son assurance quant aux dommages causés à ses propres biens (par exemple, en cas d’incendie) », précise Enedis.
Enedis indique ne pas disposer « de donnée estimative du nombre d’installations non déclarées ».
La hausse du volume d'injection des autoconsommateurs présente-t-elle un risque pour l'équilibre du réseau ?
Le réseau de distribution est « dimensionné pour permettre l’évacuation de la production même dans la situation la plus exigeante – en été à midi notamment, lorsqu’elle atteint son maximum, quand la consommation est quant à elle à son minimum », souligne un expert d'Enedis.
Face à l'intégration croissante de capacités renouvelables, « le réseau est en constante évolution avec la création ou le renforcement des ouvrages électriques (câbles, postes sources, postes de distribution notamment). En parallèle, des solutions d’optimisation ont pu être implémentées ces dernières années pour augmenter la capacité du réseau à accueillir de la production renouvelable : nouveaux réglages des onduleurs photovoltaïques, technologies de câbles électriques etc. »
Enedis mentionne par ailleurs d'autres solutions au stade de l’expérimentation, notamment en matière de flexibilités et stockage : le gestionnaire de réseau a entre autres lancé en avril 2024 un nouvel appel d’offres concernant 44 opportunités de flexibilités locales, dont 41 pour contribuer à la performance du réseau public de distribution d’électricité et 3 pour accélérer le raccordement des énergies renouvelables(4).
Quelles sont les conditions tarifaires d'accès au réseau pour ces autoconsommateurs ?
Les tarifs d'utilisation des réseaux publics d'électricité (TURPE) sont destinés à couvrir l'ensemble des coûts supportés par les gestionnaires de réseaux de transport et de distribution d'électricité pour l'exploitation, le développement et l'entretien des réseaux. Ils sont composés de plusieurs composantes fixes (gestion, comptage notamment) et d’une part variable proportionnelle à l’énergie (en kWh) consommée issue du réseau public. En tant qu’auto-consommateur, un client a une part fixe plus élevée que celle d’un consommateur seul(5).
Des foyers équipés de panneaux photovoltaïques ont par ailleurs manifesté leurs inquiétudes face à la réforme annoncée des heures creuses à l'étude. Enedis est favorable à cette évolution pour inciter les clients à limiter leur consommation d’électricité aux heures de pointe et à consommer au moment où l’électricité est la plus abondante et décarbonée mais souligne la nécessité d'une « large concertation avec RTE, les fournisseurs et les associations de consommateurs pour définir de nouvelles modalités avant de les mettre en œuvre en lien avec la CRE ».
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