« Rupture » pour la filière biogaz : les projets industriels de méthanisation vont être privilégiés, estime la Cour des Comptes

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Biogaz

Vue du digesteur, du post-digesteur et de la cuve de stockage de digestat sur le site de méthanisation de la ferme de la Tremblaye. (©ARENE-C. Bertolin)

Le développement de la filière biogaz française, qui s'appuie surtout sur la méthanisation agricole, risque désormais de se faire au profit de structures plus industrielles en raison du mécanisme de soutien retenu pour ne pas peser sur les comptes publics, estime mercredi un rapport de la Cour des comptes.

Un « important développement » prévu par le projet de 3e PPE

"La production de biogaz permet de répondre à de multiples objectifs de politique publique : la décarbonation de la production d'énergie, la transition agroécologique et la résilience des exploitations agricoles, la gestion et le traitement des déchets", rappelle la Cour dans son rapport.

Ce biogaz, issu de la fermentation de matières organiques, la "méthanisation", fournit une énergie renouvelable utilisée pour produire de l'électricité ou de la chaleur, "par cogénération", ou injectée directement dans les réseaux de gaz après épuration sous forme de "biométhane".

Des soutiens multiples ont permis l'émergence d'une filière en France, constituée désormais de plus d'un millier de méthaniseurs "essentiellement de nature agricole et de taille modeste", par laquelle la France "se singularise" des autres pays européens, où les installations sont de taille plus conséquente, comme au Danemark.

Or, la troisième Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) et la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) établies par les pouvoirs publics prévoient "un important développement de la production de biogaz", avec 50 TWh à l'horizon 2035 contre 12 TWh en 2023, rappelle la Cour.

« Rupture avec le paysage de la filière française actuelle »

Pour atteindre cet objectif, l'État a prévu un soutien principalement via un mécanisme extrabudgétaire, les "certificats de production de biogaz", qui visent à faire contribuer les fournisseurs de gaz au développement de la filière et à "limiter" ainsi son impact sur les finances publiques. Les coûts liés à ces certificats "sont donc supportés in fine par les consommateurs finals de gaz et non par le budget de l'État", indique la Cour.

Mais cela "favorise les installations de grande taille et le portage des projets par des industriels ou des énergéticiens". Cela "constitue une rupture avec le paysage de la filière française actuelle, essentiellement agricole, et dont l'organisation demande à être davantage structurée", souligne l'institution de la rue Cambon.

Fin 2023, la France comptait 1 911 méthaniseurs et la production d'électricité à partir de biogaz s'est élevée à 3 TWh en 2023, représentant 0,7% de la consommation électrique française au cours de cette période, indique le rapport.

La production de biométhane injecté dans le réseau de gaz, s'est élevée à 9,1 TWh et a représenté 2,4% de la consommation française.

La Cour rappelle par ailleurs que la disponibilité de biomasse pour la méthanisation pourrait être insuffisante dès 2030, ce qui "est susceptible de susciter des conflits d'usages" entre le développement du biogaz, la production alimentaire ou entre certains biocarburants.

Commentaires

CSNM
Plus que ces subventionnements hors normes, il faut bien voir qu'un méthaniseur ne fonctionne tout au plus que 20 ans. La méthanisation, non seulement condition la souveraineté alimentaire et la santé au sens large (sols compris), mais en plus n'est pas durable : 18 Mds d'€ injectés en 6 ans, dans 3 fois ça il faudra recommencer ...
Silicate
seulement 1 Milliard € par an finalement... il faut trouver des terres à remettre en production pour alimenter la filière
CSNM
18/6= 3 ... et le rachat du gaz représente 5 Mds/an, pour un cinquantième de la consommation du gaz naturel. Et une occupation de SAU de plus d'un département: pas assez de surface pour atteindre les objectifs Et plus de 600 accidents, multiplication par 6,5 de l'accidentologie depuis 2015 ... On arrivera à rien avec le biogaz, sauf à tuer un peu plus les agriculteurs (déjà 30 cessations d'activités de méthaniseurs)
CSNM
Normal, voici: https://drive.google.com/file/d/1vDpfuJAS6aXRpQ600XumWpRZfg9BxeKW/view?usp=drive_link et les observations du CSNM: https://drive.google.com/file/d/1Mz8ndRIzL2YUvzkZH0KmT0yDfpBY5XzN/view?usp=drive_link sincèrement
Du CLARY
Merci pour la fourniture de ces liens. Je n'ai pour le moment lu que le document du premier lien. Et ce document est truffé d'approximations, de fausses informations, d'analyses biaisées et d'interprétations douteuses. Il est regrettable de voir des scientifiques sérieux - il y en a que je connais personnellement dans la liste - se fourvoyer dans une telle publication. Je soupçonne que la plupart ne l'ont pas lue avant que leur nom y soit associé. Pour être franc, j'hésite à lire le document auquel conduit le second lien que vous m'avez donné. Et pour être franc encore davantage, je vais continuer de faire plutôt confiance aux travaux de l'INRAE et à ma propre expérience dans le domaine de la méthanisation agricole. --- Je voudrais au passage faire remarquer une chose qui pourrait vous intéresser : il y a quinze ans il a eu un fort mouvement de développement de méthaniseurs à la ferme, ou d'installations collectives portées et exploitées par des agriculteurs. A force de cracher sur ces installations les pouvoirs publics ont durci les réglementations auxquelles elles sont soumises, parfois c'était légitime, parfois c'était absurde. Le résultat est qu'aujourd'hui ce sont des groupes industriels qui se penchent sur le sujet : le dernier exemple est celui d'une installation en Bourgogne. 3000 Nm3/h de biométhane, 300 000 tonnes d'entrants exclusivement végétaux produits sur 4200 ha (ce sont des cultures intermédiaires, ces ha continuent de produire de l'alimentation)... Pour une production de 289 GWh/an. Que vaut-il mieux ? 300 méthaniseurs de ce type ou 3500 portés et exploités par des agriculteurs, alimentés majoritairement par les déjections de leurs animaux ?
CSNM
Merci pour vos commentaires. Je vous laisse vos appréciations, puisque factuellement elles préfèrent ne surtout pas dire ce qui ne va pas. Mais je reviens sur votre remarque et deuxième passage, plus étayé. Il y a 15 ans le CSNM n'existait pas, et si vous aviez bien tout lu, vous auriez compris que notre collectif ne "s'attaque" pas aux méthaniseurs à la ferme, initiaux, à très petite échelle (vous auriez pu lire le diaporama au moins jusqu'au milieu, "la méthanisation oui mais". De facto le CSNM n'a pas et ne crache pas sur les méthaniseurs "raisonnables". L'exemple que vous citez est certainement celui de Sécalia à Cérilly en Côte d'Or, une absurdité sans nom, au moins sur ce point nous sommes d'accord. Si vous avez bien suivi la filière, depuis 2015, le tonnage augmente, et la raison est simple: les gourvernements successifs promeuvent la méthanisation industrielle, celle que nous critiquons. Je vous ferais remarquer que depuis 2018 il n'est plus question de 3500 (nous en sommes déjà à plus de 2000 tous types confondus), mais de 10000 méthaniseurs gros calibres, injecteurs. Mais dans le même temps entre 30 et 50 % des méthaniseurs initiaux ont augmenté leur tonnages, et ont développé les cultures énergétiques (cives ou autres). Il serait plutôt bienvenu que vous vous présentiez. Sincèrement
Erjuanito
que des affirmations fausses. Les méthaniseurs peuvent fonctionner bien plus que 20 ans. La méthanisation ne conditionne pas la souveraineté alimentaire (0.4 % des surfaces utilisées en cultures dédiées, le reste étant des dérobées ou des déchets de toutes sortes), et la durabilité des sites est estimée au travers de la Directive RED2, avec de très bons résultats
Silicate
donc les allemands ont 3000 méthaniseurs et nous 300 et c'est nous qui devons arreter ? bizarre... tout ça pour acheter du gaz importé ?
Silicate
vous avez raison sur ces chiffres . eh bien on va continuer :) c'est un super moyen de recycler des déchets; au lieu de laisser partir le méthane dans l'athmospère on le récupère. C'est une super solution
Zamur
S'agit il vraiment du méthane ?
CSNM
Oui, et le méthane généré en faisant pousser exprès des cultures n'était pas là avant. Une filière ecocide

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