Il n’y a pas de chemin vers la neutralité carbone sans sobriété

Christian de Perthuis

Professeur d’économie à l’université Paris-Dauphine - PSL

Fondateur de la Chaire Économie du Climat

L’Agence Internationale de l’énergie vient de publier son bilan énergétique pour 2024. Le déploiement des énergies renouvelables freine les émissions de CO2, mais ne parvient pas à les enrayer. En cause : la consommation d’énergie progresse de 2,2%. Un rappel qui vient à point nommé : il n’y a pas de chemin vers la neutralité carbone en 2050, sans sobriété dans les usages énergétiques.

Les moteurs de la demande d’énergie

En 2024, la Chine est encore la première source d’augmentation de la demande d’énergie dans le monde. En rythme d’accroissement, elle est cependant largement dépassée par l’Inde et les pays du Sud-Est asiatique, Indonésie et Viêt-Nam en particulier.

Source : AIE

La demande totale d’énergie a été portée par celle d’électricité qui a progressé plus vite que le PIB mondial. Le dynamisme de la demande électrique s’explique par deux mécanismes distincts :

Source : AIE

Duopole sino-russe sur les mises en chantier nucléaires

En 2024, 8% de la demande globale d’énergie a été assurée par le nucléaire. Cette reprise du nucléaire a deux origines :

  • la remise en route de réacteurs fermés après l’accident de Fukushima et la remontée du taux d’utilisation du parc français ;
  • la mise en production de nouveaux réacteurs et la poursuite des stratégies de développement chinoise et russe. Ces deux pays ont exercé un véritable duopole en matière d’ouverture de chantiers de nouveaux réacteurs ces dernières années.
Source AIE

La baisse de l’utilisation de charbon dans les pays développés

En 2024, les pays développés ont consommé deux fois moins de charbon que lors du pic de la fin des années 2000. Une fois le pic charbonnier dépassé, la tendance structurelle à la baisse de l’utilisation de charbon devient un facteur majeur de décarbonation. Une observation porteuse d’espoir si un tel enchaînement se reproduit en Chine dans les années qui viennent.

Source : AIE

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Commentaire

Serge Rochain
Je ne crois pas que la solution soit dans l'abstinence, il me parait plus important et prioritaire de convertir le plus possible et le plus rapidement possible les usages de l'énergie fossile à l'énergie électrique. Se serrer la ceinture n'est pas une solution d'avenir mais une régression sans profit.
Albatros
Je suis pleinement en accord avec la première partie de la première phrase et avec la seconde phrase du commentaire de M. Rochain. Pour la seconde partie de la première phrase, je ne pense pas que ce raisonnement doive être généralisé au plan global, notamment dans les pays où l'accès à l'énergie oblige d'utiliser (très mal et très dangereusement) la biomasse pour cuisiner dans des conditions insalubres. Il est indécent de priver des millions de gens de l'accès à l'énergie (gaz ou électricité de toutes origines) pour améliorer leur existence et leur environnement. Sincères salutations.

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