Les productions intermittentes compliquent l'ajustement entre offre et demande d'électricité.
Les prix négatifs de l'électricité surviennent lorsque la production excède largement la demande, obligeant les producteurs à payer pour que leur électricité soit consommée, souvent pour éviter d'arrêter et de redémarrer les centrales, ce qui est coûteux et complexe. Cela se produit fréquemment dans les systèmes avec une forte part d'énergie renouvelable, comme le solaire et l'éolien, où la production est variable et parfois très abondante.
Offre et demande
La formation des prix de gros de l’électricité résulte de la rencontre d’une offre (la production) et d’une demande (la consommation). Schématiquement, plus l’offre est forte par rapport à la demande, plus le prix de l’électricité baisse. Une offre trop importante peut même induire ponctuellement un prix négatif du MWh sur les marchés à court terme (spot).
Le tarif de l'électricité sur le marché SPOT est tombé jusqu'à -87 euros/MWh en France en 2024. En Suisse, les prix ont dégringolé à -400 euros/MWh le 14 juillet 2024. Ces prix s'observent généralement en été, à la mi-journée, au moment où la production solaire bat son plein.
Surproduction, intermittence et stockage
L’offre ne peut pas toujours s’ajuster à la demande quelques heures auparavant, notamment parce que l’électricité est difficilement stockable à grande échelle. L’intégration croissante de capacités de production intermittentes telles que les éoliennes et les panneaux photovoltaïques rend cet ajustement encore plus délicat à maîtriser. En effet, ces dernières produisent de l’électricité lorsque la ressource est disponible (vent, soleil) et pas toujours lorsque la demande peut absorber cette production.
Avec l'essor des énergies solaire et éolienne, l'électricité est de plus en plus souvent vendue sur les marchés à des prix en-dessous de zéro, une tendance paradoxale qui menace un secteur en première ligne de la lutte contre le réchauffement climatique.
Rappelons que l’électricité générée par les capacités intermittentes est « prioritaire » sur le réseau devant les autres moyens de production (centrales hydroélectriques, nucléaires, à gaz, charbon ou fioul). Elle est par ailleurs subventionnée avec un tarif de rachat fixe, ce qui a tendance à accentuer la croissance de certaines capacités, indépendamment des besoins du marché.
Une question de réseau
Lorsque la production issue de ces capacités intermittentes est très importante alors que la demande est faible, il faut évacuer cette électricité par moments, quitte à la vendre à prix négatifs, pour éviter une « surchauffe » du réseau. Pour des raisons techniques, la quantité d'électricité injectée sur le réseau doit en permanence être égale à la quantité d'électricité soutirée, plus les pertes en ligne par effet Joule.
Une incitation à réduire la production
Un prix négatif signifie qu'il y a beaucoup trop de production sur le réseau et encourage les producteurs qui le peuvent à arrêter. Les exploitants d'énergie renouvelable sont sollicités, car elles sont pilotables : il faut une minute pour stopper un parc photovoltaïque, deux à trois minutes pour une éolienne.
Mais tous les producteurs ne le font pas.
Certains producteurs sont en effet rémunérés par un prix fixé par arrêté
Aussi ,lors de ces plages de surproduction, certaines centrales « traditionnelles » (à gaz par exemple) continuent parfois à produire car les arrêter ou les redémarrer pour quelques heures est coûteux ; ou plus exactement plus coûteux pour le producteur que de payer un acheteur pour consommer l’électricité. Ces situations font baisser leur rentabilité.
Solutions
Des opérateurs, notamment ceux qui disposent de STEP, peuvent alors être rémunérés pour absorber cette électricité excédentaire.
La récurrence de prix négatifs envoie un signal urgent montrant qu'il faut plus de flexibilité de l'offre et de la demande, par :
- des renouvelables davantage pilotables ;
- le développement des capacités de stockage de l'électricité ;
- l'incitation financièrement à déplacer les consommations dans le creux de l'après-midi, par exemple pour recharger les véhicules.
Une tendance forte
Au premier semestre 2024, la France avait connu 235 heures de production électrique à prix négatif en 2024, soit 5% des heures de production, surpassant déjà le record de 2023 (147 heures), selon RTE, le gestionnaire du réseau à haute tension.
Dans le sud de l'Australie, cela a été le cas 20% du temps depuis 2023, relève l'Agence internationale de l'énergie (AIE).
A l'origine du phénomène : une production renouvelable abondante qui fait s'effondrer les prix quand la demande est faible.
Quel impact sur la facture des particuliers ?
Les prix négatifs modèrent la facture finale car ils la lissent avec les prix parfois très élevés observés.
Les industriels électro-intensifs peuvent en bénéficier s'ils parviennent à déplacer leurs consommations aux moments les plus avantageux : on parle d'effacement.