Une première à Paris sur l'impact énergétique de l'intelligence artificielle

  • AFP
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L'intelligence artificielle (IA) promet de venir à la rescousse du monde de l'énergie, mais son essor fulgurant soulève aussi un enjeu climatique majeur pour sa consommation vorace en électricité. Pour la première fois, un congrès international sur l'énergie se penche mercredi et jeudi sur les "deux faces de la médaille" de l'IA.

Une requête sur ChatGPT : 10 fois plus d'énergie que sur Google

Les centres de données (data center), ces millions de serveurs qui hébergent nos données informatiques, représentent aujourd'hui seulement 1% de la consommation d'électricité mondiale, selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE).

Mais à certains endroits, les chiffres s'envolent déjà sous l'effet de la course effrénée à l'intelligence artificielle : en 2023, plus de 20% de la demande d'électricité en Irlande provenait des centres de données, et plus de 25% dans l'État de Virginie aux États-Unis, selon l'agence de l'énergie de l'OCDE.

Le développement de l'informatique à distance (cloud computing) a déjà démultiplié la consommation d'énergie des géants du secteur, tels Google, Microsoft ou Amazon, du fait de l'utilisation de ces centres de données. C'était sans compter l'essor fulgurant de l'intelligence artificielle dite générative qui nécessite des quantités de données et de puissance de calcul encore plus colossales.

"Cela commence à susciter des inquiétudes quant à l'augmentation spectaculaire de la consommation d'électricité", explique à l'AFP Thomas Spencer, à la direction des prévisions. Concrètement, une requête sur ChatGPT demande 10 fois plus d'énergie qu'une recherche sur Google.

Mieux comprendre les vertus et défauts de l'IA

Ce n'est qu'une partie du problème. Car les centres de données - l'AIE en recense 11 000 - ont aussi "tendance à être concentrés", essentiellement aux États-Unis (Virgine, Texas, Californie), au Royaume-Uni, à Singapour et dans certains centres urbains (Pékin, Shanghai, Tokyo, Francfort et Paris). Une concentration qui met le réseau électrique à l'épreuve localement et peut créer un "goulot d'étranglement" au niveau des demandes de raccordement, explique Siddharth Singh, à la direction des prévisions de l'AIE.

Pour une conférence internationale inédite, l'Agence internationale de l'énergie a invité autour d'une même table des énergéticiens (EDF, BP, TotalEnergies), des industriels, des représentants des États-Unis, de l'UE, du Japon, du Maroc, des Emirats arabes unis, de l'ONU, les géants de la tech tels que Microsoft, Google, Nvidia (micro-processeurs). Environ 200 représentants de 25 pays sont attendus mercredi et jeudi à Paris.

"Pour avoir une vision globale de ce que signifie l'IA pour le monde de l'énergie (...), nous devons réunir le secteur de l'énergie, le secteur technologique et les décideurs politiques, ce qui ne s'est jamais vraiment produit auparavant", explique M. Spencer.

L'objectif pour l'AIE, vigie de la sécurité énergétique mondiale: mieux comprendre "les deux faces de la médaille" de l'IA, ses vertus, ses défauts pour le monde de l'énergie de demain.

Une hausse de 48% des émissions de CO2 de Google en 5 ans

D'un côté, l'intelligence artificielle suscite de grands espoirs pour optimiser le système électrique, d'une "manière plus flexible et plus intelligente", par exemple pour piloter le chauffage ou l'éclairage dans les bâtiments mais aussi la production des parcs d'énergies renouvelables, par définition intermittentes. Dans les voitures électriques, l'IA peut accélérer la recherche pour rendre les batteries plus performantes et moins gourmandes en métaux rares.

De l'autre côté, il y a sa voracité énergétique. Que consommera l'IA ? Où et à quelle vitesse ? Et comment réduire la facture énergétique de l'IA accusée d'accélérer la crise du réchauffement climatique ? En cinq ans, les émissions de CO2 de Google ont bondi de 48%.

Pour verdir leur consommation d'électricité, le trio du secteur Microsoft, Google et Amazon, s'appuyaient déjà sur l'éolien et le solaire; c'est désormais le nucléaire qu'ils convoitent pour étancher leur soif d'électrons décarbonés.

Pour l'AIE, il est crucial à ce "moment-clé" d'avoir "cette discussion parce que le sujet est tellement nouveau" et "qu'il n'y a pas beaucoup de données" pour alimenter des analyses et des prévisions, selon M. Spencer. "Nous savons très bien combien de voitures sont vendues chaque année dans le monde (...) combien d'entre elles sont électriques (...) Mais si vous voulez savoir combien de centres de données sont en construction en France (...), en Irlande, il est assez difficile d'aller chercher cette information", dit-il.

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