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Des investissements massifs ont fait de la Chine la championne mondiale de l'énergie solaire, mais sa production jugée excessive lui vaut désormais des surtaxes à l'étranger et une guerre des prix sur son territoire.
8 panneaux solaires sur 10 fabriqués en Chine
La COP29 sur le climat aura lieu du 11 au 22 novembre à Bakou en Azerbaïdjan, avec comme mission de fixer un nouvel objectif pour la finance en direction du climat. L'an dernier, les pays participants s'étaient engagés à tripler la capacité installée en énergies renouvelables d'ici 2030.
Pékin a une longueur d'avance : le géant asiatique installe actuellement près de deux fois plus d'énergie solaire et éolienne que tous les autres pays réunis. Huit panneaux solaires sur dix, dans le monde, sont fabriqués en Chine.
Sans surprise, les dix premiers fournisseurs au monde de panneaux solaires sont chinois, avec des exportations à un niveau record de 45 milliards d'euros l'an dernier, selon le cabinet Wood Mackenzie.
Le soutien de l'État a été crucial pour permettre cette avancée, souligne les analystes : entre 2011 et 2022, les autorités chinoises ont investi plus de 46 milliards d'euros en nouvelles capacités d'énergie solaire, selon l'Agence internationale de l'énergie.
Le secteur a aussi bénéficié d'un accès à des matériaux peu coûteux, à un financement souple des banques d'Etat et d'une main d'œuvre quasi-illimitée.
Une accusation de « surcapacité » pour tuer la concurrence
"Les producteurs chinois étaient en avance sur tout le monde en termes de coût", explique Lauri Myllyvirta, co-fondateur du Centre de recherche sur l'énergie et l'air propre, un cercle de réflexion. "Cela veut dire que les nouveaux investissements ont lieu en Chine, car c'est là qu'ils sont les plus compétitifs".
De quoi permettre "une très forte progression (...) tant au niveau de la technologie des cellules solaires que du savoir-faire manufacturier", renchérit Johannes Bernreuter, analyste du secteur de l'énergie solaire, ce qui a aussi permis de créer "un écosystème industriel efficace".
Mais cette suprématie inquiète de plus en plus dans le monde : nombre de pays occidentaux, les Etats-Unis en tête, accusent Pékin de "surcapacité" délibérée lui permettant d'inonder le marché de matériel solaire à prix cassés et de tuer ainsi toute concurrence.
En représailles, Washington a doublé les taxes douanières sur les panneaux solaires chinois, les faisant passer à 50%. L'Union européenne enquête sur de possibles subventions excessives reçues par les fabricants chinois de ce secteur. La plupart des panneaux solaires importés par les Etats-Unis viennent désormais d'Asie du Sud-Est, mais Washington affirme que certains fabricants chinois y ont installé leurs usines pour contourner les surtaxes douanières.
La Chine apporte aussi la quasi-totalité des importations européennes de panneaux solaires venant de l'extérieur de l'UE. Cela veut dire que de nombreux pays vont avoir du mal à rattraper "deux décennies de politique industrielle chinoise très déterminée et fructueuse", estime Lauri Myllyvirta.
Réseau surchargé
Sur son territoire, le secteur solaire chinois est lui aussi confronté à des difficultés : son expansion vertigineuse fait que ses principaux acteurs sont surendettés et le réseau énergétique surchargé, tandis qu'une guerre des prix fait rage, sans que le gouvernement intervienne pour l'instant.
Cette année a été marquée par une vague de faillites et le nombre de nouveaux projets dans l'énergie solaire a chuté de plus de 75% au premier semestre 2024, selon une association du secteur.
Et même si l'an dernier, les exportations ont atteint un niveau record, les recettes ont baissé, reflétant la féroce guerre des prix. C'est comme "un serpent qui se mange la queue", observe David Fishman, analyste de Lantau Group, société de consultants sur le secteur énergétique chinois.
"Beaucoup d'entreprises vont échouer en cours de route", déplore-t-il. Certes, en mettant l'accélérateur, la Chine a réussi à atteindre son objectif d'installation d'éoliennes et de panneaux solaires avec presque six ans d'avance. Mais son réseau électrique a du mal à suivre le rythme.
Parfois, il faut donc bloquer l'approvisionnement en énergie renouvelable pour éviter un débordement du réseau.
Et cela arrive de plus en plus : le recours à cette procédure dite d'écrêtement a augmenté de 4% sur un an au premier trimestre 2024, selon Fitch Ratings.
Bientôt, les autorités devront donc "arrêter d'approuver de nouveaux projets ou d'autoriser des projets à se connecter au réseau énergétique", prédit David Fishman.
La Chine doit aussi se chercher de nouveaux marchés dans le domaine de l'énergie solaire, notamment en Afrique où ses exportations dans ce secteur ont bondi de 187% en 2023, selon le cercle de réflexion Ember, même si l'Europe reste le principal fournisseur du continent.