Et si les technologies vertes changeaient le monde? Bill Gates tente de rallier les investisseurs

  • AFP
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"Je ne suis pas fou d'être optimiste": le cofondateur de Microsoft, Bill Gates, a exhorté cette semaine les investisseurs à soutenir les technologies en faveur du climat qui sont, selon lui, rentables et pourraient engendrer une "révolution industrielle verte".

Pendant trois jours, dans un lieu chic de Londres, le milliardaire philanthrope américain a, lors de son sommet Breakthrough Energy, mis en lumière plus de 100 entreprises qui s'efforcent de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans les secteurs les plus émetteurs en carbone, tels que l'industrie manufacturière, l'énergie et les transports, principaux responsables du changement climatique.

Investisseur majoritaire d'un fonds qu'il a créé en 2015 et qui a investi environ 2,2 milliards de dollars dans des technologies naissantes telles que le ciment à faible teneur en carbone, l'aviation sans émissions et les matériaux de construction durables, M. Gates croit fermement au pouvoir de l'innovation.

Même si bon nombre de ces technologies n'en sont encore qu'à leur prémices, l'entrepreneur américain sait que le nerf de la guerre se trouve aussi dans l'argent.

Il cherche donc à élargir la base des investisseurs (capital-risque, fonds de pension, fonds souverains), et à les convaincre de la rentabilité des technologies vertes.

"Si vous contribuez à résoudre le problème du climat, vous aurez la possibilité de créer des entreprises très importantes et très rentables", leur a-t-il assuré.

- Distraction coûteuse ? -

L'innovation en matière écologique est l'objet de vives critiques, accusée d'être une coûteuse distraction reléguant au second plan la priorité: baisser drastiquement les émissions de gaz à effet de serre et financer les pays en développement pour leur transition énergétique et leur adaptation au changement climatique.

Bill Gates est conscient que l'innovation n'est pas forcément la réponse à tous les maux, mais qu'elle peut apporter sa pierre à l'édifice.

"Je pense que les choses peuvent avancer grâce l'ingéniosité humaine", a-t-il déclaré aux journalistes à l'issue du sommet.

"Je suis convaincu que nous pouvons fournir tous les services dont l'humanité a besoin avec des émissions nulles sans augmenter le coût de ces services... Je ne pense pas être fou d'être optimiste", a martelé Bill Gates.

- Intérêt croissant -

Il y a moins de dix ans, l'intérêt des investisseurs pour les technologies climatiques était très limité, se souvient-il.

Après avoir levé un premier milliard de dollars avec d'autres fortunes, dont Jeff Bezos d'Amazon et Jack Ma d'Alibaba, la première édition du Breakthrough Energy, en 2022, n'avait attiré que quelques centaines de participants.

Mais, depuis, d'autres investisseurs commencent à s'intéresser aux jeunes pousses du secteur, longtemps considérées comme un pari trop risqué.

Cette année, environ 1.500 dirigeants de banques, de fonds d'investissement soutenus par des Etats et de grandes entreprises, se sont massés pour regarder avec attention des moteurs d'avion à hydrogène conçus par ZeroAvia, de l'acier bas-carbone de Boston Metal ou encore un énorme aimant utilisé par Commonwealth Fusion Systems pour tester la fusion nucléaire.

L'intérêt croissant des investisseurs est compréhensible, a noté Tim Heidel, PDG de Veir, une entreprise soutenue par Bill Gates, qui étudie la conduction à haute température de l'électricité. "Ils ont la possibilité de créer certaines des plus grandes entreprises de la planète", a-t-il estimé auprès de l'AFP, lors d'une soirée avec des cocktails aux noms évocateurs, comme "élixir d'électricité".

"Je pense que ce que vous voyez (...), ce sont les fondations d'une révolution industrielle verte", a souligné M. Gates dans son discours d'ouverture, après son entrée au son de "Revolution" des Beatles.

- Question de vie ou de mort -

Une ferveur qui contraste fortement avec les premières réunions diplomatiques sur le climat organisées par les Nations unies en vue de la COP29 et qui se sont soldées par un désaccord amer sur le montant que les Etats les plus riches devraient payer pour soutenir les pays les plus pauvres face au changement climatique.

Pour John Kerry, ancien émissaire américain pour le climat, il faut plutôt se tourner vers le secteur privé que vers les Etats pour mobiliser les milliers de milliards de dollars nécessaires chaque année pour relever ce défi. Et l'innovation pourrait y contribuer.

"On ne parle pas d'une mission à visée technologique lambda. C'est une question de vie ou de mort", a-t-il déclaré jeudi.

Pour Julia Reinaud, responsable Europe du sommet Breakthrough Energy, il est temps de "redoubler d'efforts" pour faire passer les technologies vertes du stade de prototype à celui d'éléments opérationnels du réseau électrique.

"Nous n'avons pas 30 ans devant nous, comme nous avons pu l'avoir pour développer l'énergie solaire", a-t-elle alerté.

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