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Douze géants pétroliers et gaziers, dont le mastodonte Saudi Aramco et les Américains ExxonMobil et Chevron, ont annoncé jeudi leur intention de réduire collectivement "l'intensité carbone" de leurs activités de production, une annonce relativisée par certains experts.
L'intensité carbone est la quantité de CO2 nécessaire à la production de biens, en l'occurrence de barils de pétrole.
Réunis au sein de l'Oil and Gas Climate Initiative (OGCI), coalition créée en 2014, ils promettent de faire tomber leur intensité carbone collective moyenne entre 20 et 21 kg d'équivalent CO2 par baril d'ici 2025. En 2017, celle-ci était de 23 kg éq.CO2 par baril, selon une moyenne de l'ensemble de ces multinationales.
Cependant cet engagement ne signifie pas une réduction en valeur absolue de leurs émissions de gaz à effet de serre, notamment si la production repart, ont aussitôt mis en garde des experts, qui mettent aussi en cause le choix d'une base de calcul collective.
Selon l'OGCI, cet objectif "est un pas supplémentaire pour soutenir l'accord de Paris", qui vise à garder le réchauffement sous 2°C par rapport à l'ère pré-industrielle en réduisant drastiquement l'émission des gaz à effet de serre issus aux trois quarts des énergies fossiles.
Cela "représente une réduction allant de 36 à 52 millions de tonnes équivalent CO2 par an d'ici 2025 (en supposant des niveaux de production constants), soit l'équivalent des émissions liées à l'énergie de 4 à 6 millions de foyers", ajoute le communiqué de l'OGCI, qui publiera un bilan annuel, visé par le cabinet EY.
Sont concernées les émissions de CO2 et de méthane, précise le groupement, qui explique vouloir améliorer l'efficacité énergétique, réduire le torchage - qui consiste à brûler les rejets de gaz -, électrifier certaines opérations en recourant à des énergies renouvelables et à déployer des techniques de capture et stockage du carbone (CCUS).
Pour Andrew Grant, expert au sein du think tank Carbon Tracker, "le secteur ne doit pas se considérer comme aligné sur les objectifs de Paris quand ses plans incluent des investissements constants dans la production d'énergie fossile". "Un objectif basé sur l'intensité permet une croissance absolue des émissions, et une moyenne collective peut déresponsabiliser les moins performants", précise-t-il.
"L'OGCI est un pont important réunissant des acteurs-clé du secteur autour du défi climatique, et nous saluons les tentatives visant à réduire les émissions liées par exemple aux fuites de méthane", appuie Mark Campanale, directeur de Carbon Tracker. "Mais l'initiative ne peut ignorer l'enjeu réel : des engagements de réductions absolues d'émissions, et nous espérons que l'OGCI va entamer la discussion, avec l'urgence évidente qu'impose la crise climatique".
L'OGCI a été créée en 2014 avec pour objectif de réduire les émissions du secteur, de plus en plus sous pression des activistes et des investisseurs. Dotée d'un fonds de plus d'un milliard de dollars pour financer des solutions, elle réunit des géants tels que BP, Eni, Petrobras, Shell ou Total, représentant plus de 30% de la production pétrolière et gazière mondiale.