Climat : le grand flottement de l'UE sur les ambitions pour 2040

  • AFP
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Dans un contexte de net recul des questions climatiques à l'agenda international, les atermoiements de Bruxelles interpellent : l'UE tarde à lancer la négociation sur son objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2040.

« Une proposition dès que possible » au Conseil

Depuis l'arrivée au pouvoir de Donald Trump aux États-Unis, les dirigeants européens sont, de fait, monopolisés par les questions de défense et de compétitivité. Sur le papier, la Commission européenne maintient ses objectifs climatiques ambitieux. Pour 2040, elle recommande une baisse de 90% des émissions de CO2 par rapport à 1990 au sein de l'UE.

Mais la proposition, formulée depuis plus d'un an, n'est toujours pas arrivée sur la table du Conseil, là où les 27 États membres se positionnent et nouent des compromis. Ce jeudi, elle ne figurait pas formellement à l'ordre du jour des ministres de l'Environnement réunis à Bruxelles.

L'exécutif européen présentera "une proposition dès que possible" afin d'offrir de la "prévisibilité" aux industriels, a assuré la vice-présidente de la Commission Teresa Ribera, chargée de la transition écologique.

COP30 en novembre 2025

Mais "plus l'UE attend, plus cela devient difficile d'expliquer sur la scène internationale pourquoi ils font traîner", réagit Linda Kalcher, directrice générale du centre de réflexion Strategic Perspective. Le risque de ce flottement ? "Que tout le monde utilise l'Union européenne comme excuse pour être également en retard", met-elle en garde.

L'UE a déjà pris du retard dans ses engagements internationaux. Comme d'autres, elle n'a pas publié sa feuille de route climatique (NDC) pour 2035, laissant filer le délai de février dernier. Le chef de l'ONU Climat, Simon Stiell, l'a martelé mercredi à Berlin : "Il est essentiel que l'Europe se dote d'un nouveau plan climatique solide."

La Commission indique que 2035 découlera de l'objectif européen 2040 et promet que tout sera prêt pour la prochaine conférence de l'ONU sur le climat (COP30) en novembre au Brésil. "Nous continuerons à jouer un rôle de premier plan" au niveau climatique, affirme un porte-parole.

Rien avant juillet et le changement de présidence ?

Mais certains s'inquiètent. La Commission "n'ose pas" lancer la négociation par "manque de volonté politique", juge Caroline François-Marsal, de l'ONG Réseau action climat. "Vu le contexte international, avec le retrait des États-Unis de l'accord de Paris, on a besoin que l'Europe soit très claire sur l'ambition climatique."

Dans les couloirs des institutions européennes, on laisse entendre que le contexte est défavorable. Et qu'il faut peut-être attendre juillet, quand la Pologne, peu encline à avancer sur le dossier, cèdera la place au Danemark à la présidence tournante du Conseil de l'Union européenne.

L'eurodéputé vert Michael Bloss redoute que les retards s'accumulent. La Commission européenne doit apporter "la preuve que nous poursuivons l'agenda climatique, ou pas", prévient-il. Cet élu allemand critique aussi la position "floue" de la France, qui ne s'est pas prononcée sur la réduction de 90% des émissions recommandée par la Commission.

Plutôt qu'un débat sur un chiffre, le gouvernement français réclame au préalable des engagements concrets pour parvenir à l'objectif 2040, par exemple sur la décarbonation de l'industrie. "L'objectif doit être solide et fondé sur des trajectoires qui sont réalisables", a dit la ministre Agnès Pannier-Runacher jeudi.

En Italie, le gouvernement de Giorgia Meloni suggère de viser plutôt moins 80 ou moins 85% pour ne "pas forcer" les Etats à prendre des mesures trop "incisives". La République tchèque, qui défend son industrie lourde, juge la cible des 90% impossible.

Détricotage du Green Deal

Comme sur le reste de la planète, les hésitations des 27 illustrent le changement de configuration politique en Europe, marquée par la progression de l'extrême droite. "Les politiques climatiques sont attaquées de toutes parts", estime l'écologiste Michael Bloss.

Au Parlement, la droite européenne regrette la "focalisation sur l'objectif 2040", alors qu'il "n'y a actuellement pas de majorité" pour le soutenir. "Cela nous empêche de nous intéresser suffisamment à 2035", l'échéance pour laquelle l'Union européenne a une "obligation internationale" vis-à-vis de l'ONU, souligne l'eurodéputé PPE Peter Liese.

À la Commission, Ursula von der Leyen a inauguré son nouveau mandat par des mesures de "simplification" afin de réduire certaines contraintes administratives des entreprises, en matière environnementale notamment. Mais l'ambition climatique demeure, a-t-elle assuré, alors que la précédente mandature avait été rythmée par la batterie de mesures environnementales du Pacte vert.

Aux yeux des ONG, le détricotage en règle de ce "Green Deal" a déjà démarré. La négociation autour de 2040 pourrait être le juge de paix.

Commentaires

Serge Rochain
C'est exacte, l'Union Européenne a clairement changé d'avis et souhaite maintenant accroitre la proportion de CO2 émise par le secteur automobile, et elle a pris les mesures appropriées dans cette optique. La premiere mesure a été immédiatement efficace, MG a cessé d'importer des VE et afin que ses concessions qui ne vendaient que du VE puissent se maintenir à flot, l'importateur a imméditement remplacé les importations de VE par des VT taxés à 10% seulement et non touchés par les super taxes de douanieres de 55,3% que la marque n'importait pas précédement. Objectif atteint !

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