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En 2024, plus d'un quart des consommateurs Français ont eu du mal à payer leurs factures énergétiques, selon le Médiateur de l'énergie, et s'exposent à la menace d'une coupure d'électricité ou d'une restriction de puissance pour seulement quelques appareils.
Journée de lutte contre la précarité énergétique le 12 novembre
A une semaine de la Journée nationale de lutte contre la précarité énergétique, le 12 novembre, le Médiateur de l'énergie rappelle que "la précarité énergétique est toujours forte" mais constate qu'elle "est un peu moins présente dans les esprits" des personnes logeant dans les 2.007 foyers interrogés en septembre.
Durant l'hiver 2023-2024, un tiers des Français ont souffert du froid dans leur logement, deux fois plus qu'en 2020. Et 75% des ménages déclarent avoir restreint le chauffage pour ne pas avoir de factures trop élevées, une proportion qui reste importante même si elle diminue après cinq années consécutives de forte hausse.
Pour 28% des consommateurs, les factures d'énergie étaient tellement élevées qu'ils ont du mal à les payer.
Bien de première nécessité
En cas d'impayés, un foyer risque une coupe d'électricité de la part de son fournisseur ou une réduction de la puissance électrique de son logement s'il est bénéficiaire du chèque énergie ou que son fournisseur a décidé de ne plus pratiquer de coupures, comme EDF, qui alimente autour des deux tiers des ménages français en électricité.
Le nombre d'interventions pour impayés a dépassé le million en 2023, selon le Médiateur de l'énergie : 265.000 coupures d'électricité et de gaz, en baisse de 18% sur un an, mais les réductions de puissance d'électricité ont augmenté de 15%, à 736.000.
Ces chiffres "très inquiétants" pour Hélène Denise, chargée de plaidoyer lutte contre la précarité énergétique à la Fondation Abbé Pierre. Selon elle, "l'énergie devrait être reconnue comme un bien de première nécessité", comme l'eau.
Les réductions de puissance, à 1 kilovoltampère (kva), permet tout juste de faire fonctionner un frigo, de s'éclairer et de charger un téléphone, essentiel pour appeler les services sociaux ou le fournisseur d'électricité, rappelle le Médiateur de l'énergie.
"C'est vraiment les besoins essentiels", les ballons d'eau chaude électriques dépassent généralement cette limite et "les chauffages électriques encore plus", indique Frédérique Feriaud, directrice générale des services du Médiateur national de l'énergie.
Puissance réduite veut aussi dire plus de machine à laver et la nécessité d'aller à la laverie ou encore un disjoncteur qui saute souvent dans les premiers jours le temps de comprendre quels appareils peuvent être utilisés.
« Sandwichs pendant un mois »
Une situation qui rend difficile "l'organisation de la vie autour du foyer" pour 88% de ménages concernés et interrogés en 2023 par EDF, mais qui est "évidemment mieux que de se retrouver dans le noir du jour au lendemain", ce qui peut être vécu comme "un traumatisme", affirme Hélène Denise.
Une situation qu'Yvon S., un habitant de la Somme âgé de 70 ans, a connu durant l'été dernier, pendant un mois. "Chez moi j'ai une plaque chauffante donc je ne pouvais plus me faire de café, ni à manger. Pendant un mois j'ai mangé des sandwichs!", témoigne-t-il auprès de l'AFP.
Une assistante sociale l'a aidé à obtenir des aides et à échelonner ses dettes, mais avec ses 920 euros de retraite et l'hiver qui approche, il est inquiet. "Heureusement ils (le fournisseur d'électricité, NDLR) n'ont plus le droit de couper à partir du 1er novembre".
La fondation Abbé Pierre s'inquiète cependant de l'arrêt de l'envoi automatique des chèques énergie à leur bénéficiaires, pour qui les fournisseurs d'électricité doivent, en cas d'impayés, réduire la puissance pendant 60 jours avant une coupure sèche.
"Il y a un risque important que les individus n'aient pas recours à ce chèque énergie et les fournisseurs ne seront plus en mesure d'identifier les ménages fragiles" et donc de leur octroyer ces protections spéciales, souligne Hélène Denise.
L'envoi des chèques énergie ne se fera plus de manière automatique en raison de la disparition de la taxe d'habitation qui servait au calcul du chèque.
L'association de consommateurs CLCV craint elle aussi l'exclusion, "pour non-recours, d'un grand nombre de ménages très modestes du dispositif".