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L'Iran a jugé mardi "contre-productive" l'insistance des puissances occidentales, Européens en tête, qui ont soumis à l'AIEA une résolution exhortant le pays à autoriser des inspections sur deux sites suspects alors que Téhéran s'y refuse.
Réunis depuis lundi par visioconférence, les 35 États membres du Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) débattent notamment d'une proposition de résolution soumise par l'Allemagne, la France et la Grande-Bretagne.
L'ambassadeur iranien auprès de l'AIEA, Kazem Gharib Abadi, a estimé que la présentation de ce texte est "décevante et absolument contre-productive" pour la suite du dialogue sur le programme nucléaire iranien.
La résolution entend rappeler le pays à ses obligations de coopérer avec le gendarme du nucléaire, qui demande en vain l'accès à deux sites soupçonnés d'avoir abrité dans le passé des activités nucléaires non déclarées.
Dans une déclaration transmise aux médias, le représentant iranien prévient que si la résolution était adoptée, son pays "n'aurait d'autre choix que de prendre des mesures appropriées, dont les conséquences seraient supportées par les auteurs de telles approches à caractère politique et destructrices".
La dernière résolution de l'AIEA admonestant l'Iran remonte à 2012, période de fortes tensions avec la communauté internationale qui soupçonnait Téhéran de vouloir se doter de la bombe atomique, ce que l'Iran a toujours nié.
Plusieurs années de marathon diplomatique avaient permis de conclure en 2015 un accord historique visant à garantir la nature pacifique du programme nucléaire iranien. En 2018, le retrait unilatéral des États-Unis de ce texte jugé trop laxiste par le président américain Donald Trump a ouvert une nouvelle phase de tensions avec Téhéran.
Deux rapports produits début juin par l'AIEA ajoutent au risque de délitement définitif de l'accord de 2015.
L'un des documents constate que l'accumulation d'uranium faiblement enrichi de l'Iran dépasse de près de huit fois la limite autorisée. C'est le résultat de la décision de Téhéran de s'affranchir de ses obligations en représailles au retrait américain de l'accord.
Soutien russe
Dans l'autre rapport, le gendarme du nucléaire constate l'impasse dans laquelle se trouvent, après plus d'un an, ses demandes d'explication à propos de matériel et d'activités nucléaires non déclarés par Téhéran au début des années 2000.
Trois sites suspects situés en Iran intéressent l'agence onusienne, qui a requis l'accès à deux d'entre eux en janvier.
Ce blocage est à l'origine de la résolution élaborée par les Européens qui viendrait alourdir le climat des discussions avec l'Iran, alors que les États-Unis poussent à l'adoption de nouvelles sanctions contre ce pays.
Une résolution de l'AIEA peut être le prélude à une transmission du litige au Conseil de sécurité de l'Onu, habilité à prendre des sanctions.
Rien n'indique que les activités nucléaires présumées remontant à plus de 15 ans constituent une quelconque menace à l'heure actuelle. Mais en vertu de ses engagements auprès de l'AIEA, l'Iran est tenu d'accepter les inspections demandées, martèlent les responsables de l'agence.
Téhéran considère au contraire ne pas "avoir à satisfaire toutes les demandes fondées sur des allégations malveillantes fabriquées par ses ennemis", selon l'ambassadeur, qui accuse Israël d'avoir dénoncé les sites suspects.
La République islamique peut compter sur le soutien de la Russie, membre du Conseil des gouverneurs de l'AIEA. Lors d'une rencontre mardi à Moscou entre les ministres des Affaires étrangères des deux pays, le Russe Sergueï Lavrov a fait allusion aux "développements actuellement à Vienne et (aux) idées que nos amis occidentaux laissent flotter à New York" (États-Unis), où siège le conseil de sécurité de l'Onu.
"La situation est préoccupante (...) Nous nous opposerons très fermement à toute tentative d'utiliser cette situation pour manipuler le Conseil de sécurité et promouvoir un programme anti-iranien", a assuré M. Lavrov.
A Vienne, l'ambassadeur russe s'est opposé à ce que le vote sur la résolution puisse se dérouler par visioconférence, et une réunion physique devra être organisée, ce qui rend le calendrier incertain.
En dépit du contentieux lié à ses activités passées, l'Iran continue de se soumettre sans entrave aux inspections confiées à l'AIEA sur son programme nucléaire actuel dans le cadre de l'accord de 2015.