Les pays baltes se déconnectent sans incident du réseau électrique russe

  • Connaissance des Énergies avec AFP
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Les trois pays baltes ont achevé samedi sans incident leur déconnexion historique du réseau électrique russe, pour intégrer le système de l'Union européenne (UE), un processus lancé il y a des années et accéléré par l'invasion russe de l'Ukraine.

L'Estonie, la Lettonie et la Lituanie, membres de l'UE et de l'Otan depuis 2004 après avoir été des républiques soviétiques, l'ont mené à bien pour des raisons de sécurité et d'indépendance énergétique vis-à-vis de Moscou.

"Nous sommes en sécurité car nous nous sommes déconnectés du réseau russe", a déclaré à l'AFP Nerijus Cesiulis, maire d'Alytus, dans le sud de la Lituanie.

C'est essentiel, a-t-il ajouté, pour éviter des incidents "comme ceux de la mer Baltique", où plusieurs câbles sous-marins d'énergie et de télécommunications ont été endommagés ces derniers mois.

Experts et dirigeants politiques ont accusé la Russie de mener ainsi une guerre hybride, ce que Moscou dément.

Les autorités baltes craignaient des sabotages ou autres perturbations, mais la déconnexion s'est déroulée sans incident. Les opérateurs des réseaux électriques des trois pays ont affirmé que la Russie avait coopéré.

"C'est un jour historique", a lancé le commissaire européen à l'Energie, Dan Jorgensen.

"J'aime mieux la lumière quand il n'y a pas d'électrons russes impliqués", a-t-il déclaré à des journalistes à Tallinn, en Estonie. "Il s'agit de sécurité... Aucun pays européen ne devrait dépendre de la Russie pour quoi que ce soit", a-t-il ajouté.

Le ministre ukrainien de l'Energie, German Galushchenko, a lui salué un "événement important pour l'ensemble de l'Europe": "de telles mesures privent l'agresseur de la possibilité d'utiliser le réseau électrique à des fins de chantage".

- "Financé en grande partie par l'UE" -

Après que les trois Etats baltes ont achevé le processus de déconnexion samedi matin, un câble électrique reliant la Lettonie à la Russie a été concrètement, et symboliquement, coupé.

"Nous avons désormais le contrôle total de notre réseau électrique", a déclaré à la presse le ministre letton de l'Energie, Kaspars Melnis, en tenant à la main un bout de ce câble.

Son homologue lituanien Zygimantas Vaiciunas a assuré à l'AFP que la Russie ne pouvait plus "utiliser le contrôle du réseau énergétique comme une arme".

Il a précisé les trois pays baltes devaient fonctionner environ 24 heures en "mode isolé", avant de s'intégrer dimanche au réseau électrique européen via la Pologne.

Les responsables lituaniens et polonais entameront le processus de synchronisation aux alentours de midi dimanche.

"Nous devons effectuer des tests pour garantir à l'Europe la stabilité de notre système énergétique", a expliqué Rokas Masiulis, directeur de Litgrid, l'opérateur public du réseau électrique lituanien.

Il a ajouté samedi soir que tous les "tests de contrôle de fréquence" étaient terminés et que tout se déroulait comme prévu.

Au total, 1,6 milliard d'euros --surtout des fonds européens-- ont été investis dans le projet. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, devait assister dimanche à Vilnius à une cérémonie avec les dirigeants baltes.

-"Il n'y a pas de surprise"-

Le Premier ministre lituanien Gintautas Paluckas a loué sur X "le début d'une nouvelle ère d'indépendance énergétique" des trois pays.

Le processus a pris des années du fait de problèmes technologiques et financiers et du besoin de diversifier l'approvisionnement via notamment des câbles sous-marins.

Le changement est devenu urgent après l'invasion russe de l'Ukraine en 2022, qui a réveillé chez les Baltes la crainte d'être les prochains visés par Moscou.

Les trois pays ont depuis cessé d'acheter du gaz et de l'électricité russes, mais leurs réseaux sont restés connectés à la Russie et au Bélarus, la régulation de la fréquence étant contrôlée depuis Moscou.

Aussi dépendaient-ils toujours de la Russie pour un flux d'électricité stable, crucial pour les appareils nécessitant une alimentation électrique fiable, notamment dans des processus industriels.

Litgrid et l'opérateur de réseau letton AST ont assuré samedi que la Russie avait coopéré.

"Ils ont également coupé le courant sur la même ligne de leur côté, la plus grande surprise aujourd'hui étant qu'il n'y a pas de surprise", a déclaré à l'AFP Rolands Irklis, le PDG d'AST.

"Quand on fait partie du même système (électrique), on ne peut pas nuire à l'autre sans se nuire à soi-même", a ajouté M. Masiulis, selon qui la Russie devait assurer la sécurité énergétique de l'enclave russe de Kaliningrad, "qui dépendait en partie de nous".

Cette enclave, située entre la Lituanie et la Pologne, n'a pas de frontière avec le reste de la Russie.

Après le découplage balte, son système énergétique fonctionne désormais en "mode insulaire".

Dans cette perspective, Kaliningrad renforce sa capacité de production d'électricité depuis des années, et le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a écarté tout problème.

Il a assuré la semaine dernière que la Russie a "pris toutes les mesures pour garantir le fonctionnement fiable et ininterrompu" de son "système énergétique unifié".

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